Au Maroc, des élèves s’engagent pour faire revenir leurs camarades qui ont décroché

Par Epoch Times avec AFP
28 juin 2025 11:48 Mis à jour: 28 juin 2025 13:06

Saïd Rifaï est fier. L’adolescent marocain de 15 ans a contribué à ramener plusieurs jeunes sur les bancs de l’école dans le cadre d’une campagne contre le décrochage scolaire, un problème majeur qui alimente les inégalités sociales au Maroc.

« Il faut les aider à revenir », lance Saïd, convaincu de sa mission.

Au collège Al Jawhara de Tiflet, à une soixantaine de kilomètres de Rabat, « nous avons réussi à faire revenir huit de nos 17 amis avant qu’ils ne sacrifient leur avenir », indique à l’AFP une camarade de Saïd, Doha El Ghazouli, 15 ans aussi.

« Écoles de la deuxième chance » 

Chaque année, 276.000 enfants de moins de 18 ans quittent l’école dans le royaume de près de 37 millions d’habitants, d’après Hssain Oujour, responsable des « Écoles de la deuxième chance » au sein du ministère de l’Éducation nationale.

Des élèves échangent avec leurs enseignants pendant une pause à l’école de la « Seconde Chance – Nouvelle Génération » à Tiflet, Maroc, le 22 mai 2025. (ISSAM ZERROK/AFP via Getty Images)

Un fléau auquel le Maroc tente de remédier depuis longtemps et contre lequel il mise sur les enfants eux-mêmes pour faire revenir les décrocheurs, notamment via les « Écoles de la deuxième chance ».

Huda Enebcha, 16 ans, a réussi avec Doha à convaincre leur voisine de reprendre le chemin de l’école. « On l’a aidée à revoir les matières les plus difficiles, et on lui a montré des vidéos des activités à l’école », raconte-t-elle. « Elle a fini par accepter après beaucoup d’efforts. »

Une personne sur quatre ne sait pas lire

Dans les zones rurales marocaines, les abandons scolaires sont fréquents, souvent liés à la pauvreté, à la précarité ou à des difficultés d’apprentissage, explique le directeur de l’établissement, Saïd Tamouh. Ce phénomène reflète aussi les fragilités de l’enseignement public au Maroc, marqué par des classes surchargées et un niveau en recul face au privé, en dépit des réformes engagées ces dernières décennies.

Selon l’Unicef, 250 millions d’enfants dans le monde ne parviennent pas à acquérir les compétences de base en matière d’alphabétisation. Au Maroc, l’analphabétisme touche près d’une personne sur quatre, soit environ neuf millions de personnes.

Au total, 47,5% de la pauvreté dans le pays s’explique par des déficits en matière d’éducation, selon le Haut-Commissariat au Plan, ce qui contribue à alimenter les inégalités sociales, un problème de taille au Maroc.

« Ils m’ont donné une vraie seconde chance »

Près du collège Al Jawhara, 110 élèves suivent avec attention les formations proposées par l’école de la deuxième chance Abou el-Kacem Chebbi, gérée par l’association d’aide à la réinsertion Salam.

Des élèves participent à un atelier de maquillage à l’école de la « Seconde Chance – Nouvelle Génération ». (ISSAM ZERROK/AFP via Getty Images)

Entre ateliers de coiffure, d’arts décoratifs et cours d’arabe classique, chacun tente de rattraper le fil de sa scolarité. « Quand on quitte l’école, c’est le vide. C’est pour ça que j’ai décidé de revenir, notamment grâce aux enseignants de ce centre. Ils m’ont donné une vraie seconde chance », dit Sanae Sami, 17 ans, en plein cours de maquillage.

Soutien et accompagnement

Pour Hafida El Fakir, présidente de l’association Salam, il n’y a pas de secret : « quand ils trouvent du soutien et de l’accompagnement pour reprendre leur scolarité, ils peuvent réussir et aller loin. » « En fin d’année, on évalue leur niveau. Selon leurs compétences, ils peuvent être réintégrés dans le système scolaire formel », explique Lahbib El Fakir, coordinateur administratif et pédagogique de l’école.

Des élèves assistent à un cours d’arabe. Ce programme accompagne les jeunes déscolarisés avec des cours de soutien et une formation professionnelle. (ISSAM ZERROK/AFP via Getty Images)

D’après M. Oujour, environ 70% des bénéficiaires de ces écoles rejoignent des centres de formation professionnelle et 20% réintègrent le système scolaire classique. Repêché l’an dernier par des amis, Amine Othmane a choisi cette année de participer activement à la campagne. Il anime des rencontres à la maison de jeunes de la ville.

Pour convaincre quelqu’un de revenir à l’école, « il faut d’abord qu’il regrette et ait envie d’y retourner », dit-il, confiant avec pudeur avoir convaincu trois jeunes. Parmi eux, Aya Benzaki, 18 ans, une jeune fille qui rêve désormais d’obtenir son bac, et Jihane Errafii, 17 ans, qui se dit reconnaissante envers ses camarades. « J’avais juste besoin que quelqu’un me tende la main. »

Soutenez Epoch Times à partir de 1€

Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?

Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.