Crise de la filière cognac : les sanctions chinoises sur les produits français demeurent après les négociations

Par Epoch Times avec AFP
15 mai 2025 17:10 Mis à jour: 13 juin 2025 19:07

Le cognac reste « à ce stade » soumis à des sanctions chinoises, a affirmé jeudi le ministre de l’Économie Éric Lombard après une réunion avec le vice-Premier ministre chinois, He Lifeng, qui a lui appelé à un climat d’affaires « plus équitable » entre les deux pays.

Les discussions entre la France et la Chine concernant le contentieux sur le cognac français n’ont pas permis d’aboutir à une solution « à ce stade », a affirmé jeudi le ministre français à l’issue d’une réunion avec le dirigeant chinois.

« Mais je sais néanmoins pour en avoir longuement parlé avec son excellence He Lifeng que la porte de la discussion reste ouverte », a-t-il poursuivi, à l’heure où des sanctions chinoises contre ce secteur affectent durement la filière française.

Pourtant le Président Emmanuel Macron s’était montré optimiste lors de son interview télévisée sur TF1 le mardi 13 mai 2025. « Je suis raisonnablement optimiste, je pense qu’on va y arriver. Et donc dans les semaines et les mois qui viennent, on va tout faire pour essayer d’obtenir une levée de ces droits de douane, pour rouvrir le marché chinois » aux importations de cognac, avait-il déclaré.

Après avoir mené ces derniers jours pour la Chine des négociations à Genève avec les États-Unis sur le dossier des droits de douane punitifs, He Lifeng achevait jeudi une visite de trois jours en France au cours desquels il s’est notamment entretenu avec des représentants d’entreprises de la cosmétique, de la pharmacie et de l’aéronautique, et a visité une ferme dans l’Eure.

Jeudi s’est tenu la 10e édition du dialogue économique et financier de haut niveau franco-chinois auquel, outre He Lifeng et Éric Lombard, a aussi participé la ministre de l’Agriculture Annie Genevard, sur fond de conflit persistant autour des sanctions chinoises sur l’industrie du cognac.

Représailles de Pékin frappé par des taxes européennes

Des mesures antidumping temporaires de Pékin imposent depuis mi-novembre aux importateurs de brandys européens (eaux-de-vie de vin, essentiellement du cognac) de déposer auprès des douanes chinoises une caution, en représailles à une procédure européenne visant les subventions d’État dont bénéficient les véhicules électriques fabriqués en Chine.

Sur cette photographie prise le 9 février 2018, des visiteurs assistent à une visite dans les chais de Hennessy à Cognac. (NICOLAS TUCAT/AFP via Getty Images)

Une perte de 60 millions d’euros par mois pour la filière

Ces mesures ont porté un coup en France à la filière cognac, qui affirme perdre 60 millions d’euros par mois depuis leur instauration. Les expéditions charentaises vers la Chine sont déjà en chute de 65 % sur les 4 derniers mois, a rapporté Florent Morillon, le président du Bureau National Interprofessionnel de Cognac (BNIC), au média Vitisphere. Les conséquences se font déjà lourdement sentir sur l’économie charentaise : arrachage, plans sociaux… dans la vigne, les négoces, les fournisseurs et la vie des territoires, précise le site d’informations.

« J’ai souhaité insister sur l’importance pour nous de revenir à la solution qui prévalait avant 2024 », Éric Lombard, rappelant que le cognac représente 1,4 milliard d’euros d’exportations annuelles françaises vers la Chine. « Il s’agit pour la France d’un sujet de première importance », a-t-il encore dit devant la presse.

La Chine représente à elle seule un quart des exportations de cognac, selon le Bureau national français interprofessionnel du cognac.

La réponse du dirigeant chinois sur ce sujet a été brève, He Lifeng se contentant de dire qu’« à la demande de l’industrie nationale chinoise, la Chine a ouvert une enquête antidumping sur le brandy originaire de l’Union européenne, conformément à la loi ». « L’autorité chargée de l’enquête prendra une décision sur la base des faits », a-t-il poursuivi.

La France s’insurge contre les accusations de dumping

La Chine suspecte les producteurs français de baisser excessivement le prix de leurs produits pour faciliter l’accès au marché chinois, une accusation que la France rejette fermement.

Pékin a déjà infléchi sa position ces dernières semaines en repoussant de trois mois l’application définitive de droits de douane supplémentaires, à l’issue d’une visite du chef de la diplomatie Jean-Noël Barrot.

Si la situation ne change pas, la Chine taxera de 35 % en moyenne les eaux-de-vie de vin français à partir du 5 juillet prochain.

La taxation visait « spécifiquement la France »  car elle « s’était targuée d’être à l’origine de la décision européenne (sur les véhicules électriques ndlr) », déclarait la négociante Patricia Gaborieau, vice-présidente de l’AOC Cognac, à Vitisphere.  « Les autorités chinoises ont donc cru que la France saurait défaire ce qu’elle se targuait d’avoir initié. Et donc aujourd’hui, la filière cognac est la victime collatérale d’un contentieux qui la dépasse avec des enjeux commerciaux totalement déséquilibrés », condamnait-elle.

Un fabricant de cognac récolte des raisins dans son vignoble à Saint-Preuil, le 15 octobre 2024. Les fabricants français de cognac avait plaidé le 8 octobre pour la fin de l’escalade de la querelle commerciale entre l’UE et la Chine, après que Pékin a annoncé des mesures antidumping contre les importations de brandy de l’UE. (CHRISTOPHE ARCHAMBAULT/AFP via Getty Images)

He Lifeng a toutefois dit souhaiter que « les entreprises françaises augmentent leurs investissements en Chine », tout comme il a appelé les entreprises chinoises à « investir » et « faire des affaires en France ». Il s’est aussi dit ouvert à la coopération dans les domaines de l’intelligence artificielle, la transition climatique, les services financiers, le nucléaire et l’agriculture.

Le dirigeant chinois s’est montré en revanche plus offensif au sujet du climat des affaires : son pays « espère que la France offrira un climat (…) plus équitable, plus juste et plus prévisible », a-t-il affirmé.

Embargo chinois sur la viande bovine depuis fin 2024

Outre le conflit sur le cognac, la France n’exporte par ailleurs plus de viande bovine vers la Chine depuis fin 2024, du fait d’un embargo total décrété par Pékin, lié à la fièvre catarrhale ovine (FCO), une maladie non transmissible à l’homme qui affecte essentiellement les ovins mais aussi les bovins.

La viande bovine française est « bienvenue » sur le marché chinois, avait déclaré mardi le vice-Premier ministre chinois lors d’une visite dans une ferme bovine à Harquency (Eure), sans donner ni calendrier ni détails sur la levée des restrictions actuelles.

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