Cette réunion des ministres du Travail de l’Union à Luxembourg est un test pour la méthode de négociations au sein de l’UE du président français Emmanuel Macron.
Après une campagne électorale française, où les extrêmes de droite comme de gauche avaient vilipendé « l’Europe du dumping social », M. Macron, à peine élu, avait réclamé un durcissement de la réforme du travail détaché, s’en prenant à la Pologne et aux trois autres pays du groupe de Visegrad (Hongrie, République tchèque, Slovaquie), partisans d’un statu quo.
« Nous espérons arriver à un accord et avoir tout le monde à bord », a déclaré lundi, en arrivant à la réunion, le ministre estonien du Travail, Jevgeni Ossinovski, dont le pays assure la présidence tournante de l’UE.
« Nous avons travaillé très dur, ces derniers mois, ces derniers jours et même ces dernières heures pour surmonter les différends entre les pays sur ce dossier important », a-t-il ajouté.
« Le diable est dans les détails, mais si tout le monde met de la bonne volonté, on peut avoir un accord », a estimé de son côté avant la réunion la commissaire européenne aux Affaires sociales, Marianne Thyssen, à l’origine de la réforme, présentée il y a dix mois, d’une directive datant de 1996.
L’objectif majeur de la révision des règles européennes encadrant le détachement –un système permettant à des Européens de travailler dans un autre pays que le leur, tout en cotisant dans leur pays d’origine– c’est d’avoir un « salaire égal, à travail égal, sur un même lieu de travail ».
En effet, dans la directive initiale, il est simplement spécifié que les travailleurs détachés doivent toucher le salaire minimum du pays d’accueil.
Or, l’élargissement de l’UE à l’Est en 2004, avec l’arrivée de dix nouveaux pays aux niveaux de vie et salaires plus bas a bouleversé la donne, engendrant une concurrence déloyale entre entreprises, ainsi que du dumping social.
En révisant la directive, l’exécutif européen veut désormais que toutes les règles valables pour les travailleurs locaux s’appliquent aux détachés: ainsi, par exemple, si le pays d’accueil prévoit une prime de froid, de pénibilité, d’ancienneté, un treizième mois, ces bonus devront aussi leur être versés.
Trois points posent encore problème
Premièrement, la durée du détachement: l’exécutif européen a proposé de le limiter à 24 mois, mais la France, qui a réussi à convaincre l’Allemagne, les pays du Benelux et l’Autriche, plaide pour 12 mois.
Deuxièmement, la date d’application de la nouvelle directive: Paris souhaiterait qu’elle s’applique dans les deux ans suivant son adoption. La Commission a proposé trois ans, les pays de l’Est réclament cinq ans.
Et troisièmement, le transport routier: ce dernier point est particulièrement délicat, car les pays de Visegrad, mais aussi l’Espagne et le Portugal, s’inquiètent des conséquences négatives de la réforme sur leurs chauffeurs.
Jeudi soir, M. Macron a profité d’un sommet de l’UE à Bruxelles pour évoquer ce dossier en tête-à-tête avec le chef du gouvernement espagnol Mariano Rajoy.
L’Espagne comme le Portugal, qui n’ont que la France comme porte d’entrée sur l’Union, effectuent des opérations de cabotage –une pratique qui consiste à quitter un pays avec un véhicule et à charger puis décharger, à plusieurs reprises, dans un autre pays– en France et concurrencent ainsi les routiers français.
Selon deux sources proches du dossier, un compromis pourrait se dessiner, en appliquant aux chauffeurs routiers l’ancienne directive du travail détaché concernant la rémunération –c’est-à-dire qu’ils recevraient le salaire minimum du pays d’accueil, mais pas les primes–, jusqu’à ce qu’une autre réforme consacrée au transport routier spécifie les règles pour ce secteur.
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