Les usines ont suspendu leur production. Les camionneurs sont bloqués sur les autoroutes. Les conteneurs s’empilent dans les ports. Les navires attendent de pouvoir décharger.
L’économie chinoise va payer un lourd tribut, car la détermination du régime communiste à éradiquer l’épidémie de Covid‑19 par des mesures de confinement draconiennes paralyse ses pôles industriels et commerciaux, comme Shanghai.
Shanghai approche de sa troisième semaine de confinement. La fermeture brutale de cette ville très prospère, qui contribue pour environ 4 % au produit intérieur brut (PIB) annuel du pays, a débuté le 28 mars. Si les autorités ont autorisé 4,8 millions de personnes à sortir de chez elles le 12 avril, 25 millions d’habitants sont toujours enfermés. Alors que les infections ont atteint un niveau record le 14 avril, il n’y a, dans l’immédiat, aucun indice de reprise normale des activités.
Shanghai est loin d’être le seul endroit confiné actuellement en Chine. Environ 373 millions de personnes sont sous confinement partiel ou total, estiment les analystes de la banque japonaise Nomura, ce qui représente 40 % de l’économie.
Le Premier ministre chinois Li Keqiang a également averti que les contraintes pesant sur l’économie se sont intensifiées.
« Nous devrions coordonner la prévention et le contrôle des épidémies avec le développement économique et social », a‑t‑il déclaré aux responsables locaux lors d’un séminaire organisé le 11 avril, selon le média officiel Xinhua.
Les économistes prédisent que le pays risquait n’atteindra probablement pas son objectif officiel de croissance du PIB de 5,5 % cette année. Si la Chine reste paralysée, estime‑t‑on, les effets pourraient se répercuter bien au‑delà de ses frontières.
« Quand l’économie chinoise éternue, la chaîne d’approvisionnement mondiale s’enrhume », a déclaré la banque d’investissement française Natixis dans un compte‑rendu du 14 avril. « La tendance est inquiétante. »
Déboires technologiques
La moitié de la production chinoise de puces provient du delta du Yangzi, soit la région autour de Shanghai, et 10 % directement de Shanghai, selon Natixis.
La semaine dernière, de nombreux fournisseurs ont déclaré que le durcissement des restrictions à Shanghai et dans la ville voisine de Kunshan les avait conduits à interrompre leur production. Un responsable de la Commission de surveillance financière de Taïwan a déclaré le 10 avril que quelque 161 entreprises taïwanaises de Shanghai et de Kunshan ont signalé l’arrêt temporaire de leurs activités, 41 d’entre elles sont des fabricants de produits électroniques.
Le 12 avril, l’entreprise taïwanaise Pegatron Corp, un des principaux assembleurs d’iPhones, a suspendu ses activités dans ses usines de Shanghai et de Kunshan, conformément aux exigences de prévention du Covid‑19. La société a déclaré qu’elle reprendrait ses activités dès que les autorités lui en donneraient l’autorisation, sans pouvoir avancer de date précise.
Unimicron Technology Corp, qui fabrique des circuits imprimés pour des sociétés comme Apple Inc. et Intel, a déclaré le 12 avril que la fermeture de son usine de Kunshan serait prolongée jusqu’au 19 avril.
Les difficultés de l’industrie automobile
Les constructeurs automobiles ont été durement touchés. La gigantesque usine de Tesla à Shanghai n’a pas encore repris ses activités. L’usine qui a produit plus de 65 000 voitures en février est à l’arrêt depuis le 28 mars, a rapporté Reuters, citant un avis interne et des sources internes.
Son rival chinois, Nio, a déclaré le 9 avril que le travail s’était temporairement arrêté dans une usine à Hefei, une ville de l’est de la Chine qui n’est pas sous confinement, parce que ses fournisseurs dans d’autres villes ont cessé de travailler.
« Si les fournisseurs de Shanghai et des environs ne parviennent pas à trouver un moyen de reprendre leurs activités et leur production, en mai, tous les constructeurs automobiles chinois devront peut‑être arrêter leur production », a déclaré le PDG du fabricant de voitures électriques Xpeng le 14 avril.
La paralysie chinoise a également entraîné une baisse des ventes d’automobiles. Les ventes sur le plus grand marché automobile du monde ont chuté de 11,7 % en glissement annuel en mars, après une hausse de 18,7 % en février, selon les données de l’Association chinoise des constructeurs automobiles.
Le géant allemand des pièces automobiles Bosch a déclaré qu’il avait temporairement fermé des sites à Shanghai et à Changchun, une ville du nord de la Chine qui est bouclée depuis le 11 mars. Il a ajouté que deux autres usines fonctionnaient en « circuit fermé ».
« Nous constatons actuellement des effets temporaires sur la logistique et l’approvisionnement de la chaîne d’approvisionnement », a déclaré l’entreprise dans un communiqué du 12 avril.
Perturbation de la production
La prolongation des confinements pèse sur l’économie manufacturière, émergent de nombreux indices. L’indice PMI manufacturier Caixin montre que l’activité manufacturière s’est contractée en mars au rythme le plus marqué depuis février 2020, lorsque le régime chinois lançait son programme zéro Covid.
L’indice PMI manufacturier Caixin, qui porte surtout sur des petites et moyennes entreprises du secteur privé, est tombé à 48,1 en mars (donc sous la barre des 50), alors qu’il avait connu une légère hausse en février.
« Bien des fois les entreprises ont signalé que les mesures visant à contenir la propagation du Covid‑‑19 perturbait les opérations, l’approvisionnement et freinait la demande des clients », peut‑on lire dans le rapport Caixin.
Les grandes usines ont également du mal à faire tourner leurs lignes de production. Si certaines d’entre elles sont autorisées à maintenir les opérations en « circuit fermé », les employés dormant et travaillant sur le site de l’usine, « certains travailleurs ne se portent plus volontaires », a déclaré Bettina Schoen‑Behanzin, vice‑présidente du principal groupe d’entreprises européennes de Chine, aux médias le 6 avril.
L’exaspération des camionneurs
Le trafic routier national a chuté de 40 % par rapport à la mi‑mars, et les activités autour de Shanghai ne représentent que 15 % des niveaux normaux, a indiqué Ernan Cui, analyste chez Gavekal, dans un rapport publié le 13 avril.
Les chauffeurs de camions longue distance en ressentent les effets. La semaine dernière, un camionneur a déclaré aux médias nationaux qu’un récent voyage pour livrer des marchandises à Shanghai, qui prend normalement deux jours, lui avait pris plus de deux semaines. Le chauffeur a déclaré être bloqué sur l’autoroute des jours entiers étant obligé de présenter un test avec un résultat négatif de moins de 48 heures aux points de contrôle fréquents. Certains points de contrôle ne lui permettaient pas de passer car le code santé de son smartphone, qui devait être vert devenait automatiquement rouge lors du passage dans des zones à risque.
Son histoire rejoint celle des autres chauffeurs routiers. Les médias officiels chinois estiment que 30 millions de camionneurs sont bloqués sur la route à cause de ces barrages sanitaires.
L’allongement du temps de transport entraîne d’énormes contraintes sur les chaînes d’approvisionnement. Les opérateurs de porte‑conteneurs ont signalé aux médias nationaux que les restrictions liées au Covid à Shanghai empêchaient les camionneurs de transporter les conteneurs jusqu’à l’entrée et la sortie des ports. Maersk, le deuxième plus grand transporteur de conteneurs au monde, a annoncé à ses clients le 11 avril que l’efficacité de son service de transports routiers à destination et en provenance de Shanghai serait encore affecté un certain temps par le confinement.
« Le transport routier reste limité et les terminaux sont toujours encombrés, tandis que les conteneurs frigorifiques sont très sollicités », a déclaré Ocean Network Express dans une explication du 14 avril.
Ports engorgés
Alors que Shanghai affirme que ses ports fonctionnent normalement avec un soutien spécial, les données de Refinitiv montrent que le nombre de porte‑conteneurs en attente au large de la ville et de la ville voisine de Zhoushan a plus que doublé depuis le début du mois d’avril pour atteindre les 118, soit près de trois fois plus qu’il y a un an.
La semaine dernière, la Chambre de commerce européenne en Chine a estimé que les volumes hebdomadaires dans le port de Shanghai (le port plus fréquenté au monde) ont diminué de 40 %.
Signe de la pression exercée sur les importations, les données officielles publiées le 13 avril montrent que les importations de la Chine en mars ont diminué de 0,1 %, la première baisse depuis août 2020.
Les armateurs tels que Maersk recommandent à leurs clients de détourner les expéditions du port encombré de Shanghai vers d’autres destinations chinoises, mais les analystes restent pessimistes.
« Si le port de Shanghai cesse de fonctionner, il est difficile pour les autres ports voisins de combler le vide, étant donné sa capacité gigantesque », ont déclaré les analystes de la société de services financiers BBVA dans un rapport du 7 avril. « À ce moment‑là, la chaîne d’approvisionnement mondiale ressentira directement la douleur du confinement de Shanghai. »
Cela pourrait être pire
Si le confinement actuel persiste tout le mois d’avril, Shanghai subira une perte de 6 % de son PIB, ce qui équivaut à une perte de 2 % du PIB pour l’ensemble du pays, a déclaré Iris Pang, économiste en chef Great China chez ING, dans une note du 7 avril.
ING a révisé les prévisions de croissance économique de la Chine pour 2022 à 4,6 %, contre 4,8 % auparavant.
Selon certains économistes ayant analysé les chiffres sur le flux des camions de ville à ville, si un dixième des villes chinoises sont confinées pendant deux semaines, le pays verra son PIB diminuer de 3,1 %.
Selon une étude réalisée le 7 avril par Gavekal Dragonomics, 87 des 100 plus grandes villes chinoises en termes de PIB ont imposé une forme de quarantaine.
La Chine a fixé un objectif de croissance du PIB d’environ 5,5 % cette année, soit le niveau le plus bas depuis près de trois décennies.
Dans une note du 30 mars, Natixis déclarait que la politique zéro Covid du régime « ne manquera pas de poser un autre obstacle à la croissance économique déjà ralentie ».
La banque a prédit le mois dernier que la forte réduction de la mobilité due au confinement et à d’autres restrictions réduirait de 1,8 point de pourcentage la croissance du PIB du pays au premier trimestre 2022.
Les données économiques officielles du premier trimestre doivent être publiées le 18 avril.
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