Près de 90% des Canadiens sont en faveur de la création d’un registre d’agents étrangers, selon un nouveau sondage, réalisé après qu’Ottawa a annoncé son intention de consulter le public sur l’établissement d’un tel registre, dans le contexte des préoccupations grandissantes sur l’ingérence étrangère de la Chine, de la Russie et d’autres États autoritaires.
Le sondage, réalisé par Nanos Research pour le compte du Globe and Mail, révèle que 88% des Canadiens sont « favorables » ou « plutôt favorables » à un registre d’influences étrangères, qui obligerait un individu ou une entité travaillant pour une autorité étrangère à s’inscrire auprès du gouvernement. Avec ce registre, le gouvernement fédéral vise à rendre ces opérations plus transparentes, et le non‑respect de cette obligation entraînerait probablement des amendes voire l’emprisonnement.
Selon l’enquête, seuls 7% des personnes interrogées « s’opposent » ou « s’opposent un peu » à l’obligation d’enregistrer les avocats, les lobbyistes et les hommes à la retraite lorsqu’ils assument des fonctions rémunérées par des gouvernements étrangers ou des entreprises liées à ces pays.
« La transparence en ce qui concerne ces types d’intérêts étrangers et la transparence en ce qui concerne les Canadiens travaillant pour ces intérêts étrangers est de bonne guerre », a déclaré le sondeur Nik Nanos au Globe and Mail. « La réalité est que si vous avez peur de déclarer que vous travaillez pour un pays étranger ou une organisation étrangère, cela devrait peut‑être être un signal d’alarme. »
Réalisé entre le 19 et le 22 décembre, il s’agit d’un sondage hybride à double cadre, par téléphone et en ligne, aléatoire, dont la précision est de plus ou moins 3,1 points de pourcentage, 19 fois sur 20, selon le journal, qui n’a pas précisé le nombre des personnes interrogées.
Le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, a déclaré début décembre que le gouvernement fédéral se préparait à lancer des consultations publiques sur la création éventuelle d’un registre d’agents étrangers. Cette initiative permettrait au Canada de rejoindre ses alliés, tels que l’Australie et les États‑Unis, qui ont déjà mis en place une organisation similaire pour lutter contre l’ingérence étrangère de la Chine et de la Russie.
Le gouvernement libéral s’était engagé à créer un registre d’agents étrangers bien avant l’annonce de Marco Mendicino. Le 23 février 2021, Robert Oliphant, le secrétaire parlementaire de la ministre des Affaires étrangères Mélanie Joly, a déclaré à la Chambre des communes que le gouvernement fédéral « envisageait activement » de créer un tel registre, sans toutefois donner d’échéancier précis.
M. Nanos a déclaré qu’il ne serait pas justifiable pour les libéraux de continuer à retarder la mise en place de ce que les Canadiens considèrent comme nécessaire pour assurer plus de transparence chez les ceux qui influencent la politique étrangère.
« S’ils tardent à agir et que nous découvrons qu’il y a des problèmes ou des risques potentiels au Canada, il y aura un prix politique à payer », a‑t‑il déclaré.
Les États‑Unis disposent d’une loi requérant l’enregistrement des agents étrangers, elle remonte à 1938. Ils ont également introduit de nouvelles lois, comme le Countering the Chinese Government and Communist Party’s Political Influence Operations Act, en 2018. [Loi sur la lutte contre les opérations d’influence politique du gouvernement et du Parti communiste chinois]
Plus tard en 2018, l’Australie a promulgué le Foreign Influence Transparency Scheme [Système de transparence de l’influence étrangère], décrit comme un projet de loi non discriminatoire et global visant à lutter contre les efforts d’influence de toutes les entités étrangères. Cependant, l’ancien premier ministre australien Malcolm Turnbull, en 2017, a spécifiquement mis en avant les « rapports inquiétants sur l’influence chinoise » comme un exemple des raisons pour lesquelles le projet de loi était nécessaire.
En octobre 2022, la Grande‑Bretagne a introduit le Foreign Influence Registration Scheme [Régime d’enregistrement des influences étrangères], obligeant les personnes agissant au nom d’intérêts étrangers à déclarer leur activité d’influence sous peine de sanctions pénales.
Réactions
L’ancien député conservateur Kenny Chiu a déclaré qu’il ne fondait pas de grands espoirs sur l’annonce de Marco Mendicino sur la consultation publique concernant la création d’un registre des agents étrangers. Selon lui, la procédure prendra trop de temps pour qu’un projet de loi soit présenté, après l’adoption de l’enquête.
« C’est vraiment déraisonnable », a déclaré Kenny Chiu, notant qu’en tant que gouvernement minoritaire, qui, selon lui, a une durée de vie typique d’un an et demi, les libéraux seraient probablement confrontés à une autre élection bientôt, ce qui mettra fin à tous les efforts législatifs même après la fin de la consultation publique, générant un rapport qui prendra également beaucoup de temps à être examiné.
« Comme beaucoup de choses que fait le gouvernement de Justin Trudeau, il s’agit plus de vertu ostentatoire que de quoi que ce soit de substantiel », a déclaré Kenny Chiu à Epoch Times.
« Les médias disent que [Mendicino] est prêt à lancer une telle consultation. J’attends toujours le jour où un registre, une loi sera adoptée à la Chambre des communes. Et s’ils sont si intéressés à faire ce qu’il faut, ils auraient pu accélérer mon projet de loi d’initiative parlementaire il y a un peu plus d’un an et demi. »
Kenny Chiu faisait référence au projet de loi C‑282, qu’il a présenté au Parlement en avril 2021, dans le but d’imposer « une obligation aux personnes agissant pour le compte d’un mandant étranger de produire une déclaration lorsqu’elles entreprennent des actions spécifiques à l’égard de titulaires de charges publiques ».
Il a ajouté que le gouvernement pourrait également soutenir le projet de loi d’initiative parlementaire S‑237, présenté en février par le sénateur Leo Housakos. Le projet de loi est toujours en cours de deuxième lecture au Sénat depuis mars.
« Tout ce qu’ils ont à faire, c’est d’accélérer le processus. Rien de tout cela ne se produit », a déclaré Kenny Chiu.
D’autres critiques du Parti communiste chinois, dont la Coalition canadienne pour les droits de l’homme en Chine, ont mis en garde contre l’ingérence étrangère de Pékin.
David Mulroney, ancien ambassadeur du Canada en Chine, a déclaré sur les médias sociaux le 27 décembre que le résultat du sondage Nanos est « encourageant », ajoutant que les nouvelles réglementations devraient également limiter la capacité des anciens fonctionnaires et responsables politiques à « tirer profit des connaissances, de l’expérience et des contacts acquis en servant le Canada ».
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