L’Internet que vous connaissez actuellement ne représente que 4 % de l’Internet réel. Le prochain Internet, en cours de construction par l’agence recherche & développement du Pentagone, a pour objectif de donner accès aux 96 % restants.
Le programme, appelé Memex, est conçu autour de nouvelles fonctions de recherche qui pourraient changer la façon dont nous utilisons l’Internet. Il a été développé par l’Agence pour les projets de recherche avancée de défense (DARPA) avec l’aide de 18 partenaires, comprenant le laboratoire Jet Propulsion de la NASA.
« Cela va avoir un impact énorme », déclare Chris Mattmann, chercheur principal de la NASA sur le projet Memex.
Le programme va travailler avec les données brutes que les médias sociaux fournissent dans les forums de discussion en ligne. Il se connecte à chaque information et établit les relations entre elles, ce qui rendra plus facile les recherches d’informations pour les utilisateurs.
L’objectif initial de la DARPA était d’aider à cartographier le Darknet (des réseaux internet à l’intérieur de l’Internet) utilisé par les réseaux de pair-à-pair (traduction de l’anglais peer-to-peer, souvent abrégé « P2P », modèle de réseau informatique). L’agence voulait utiliser Memex pour stopper les trafics humains en ligne.
« L’utilisation de forums, de chats, de publicités, d’offres d’emploi, de services cachés, etc., continue à servir la croissance d’industries pratiquant un esclavagisme moderne »– DARPA
« Ça a été naturel de changer l’objectif initial de l’outil [pour appliquer la loi] », a déclaré Chris Mattmann, ajoutant que « Memex est déjà activement utilisé aujourd’hui », y compris par le bureau du procureur du comté de New York.
Faire des recherches dans le Darknet
D’après le chercheur, « Memex est aujourd’hui axé sur la recherche des délits sur le Darknet ». Certaines utilisations du Darknet sont cependant bonnes, des internautes l’utilisant pour contourner la censure des gouvernements autoritaires. Ces utilisations ne font pas partie de leurs cibles, précise Chris Mattmann : « Nous ne prévoyons pas de faire d’Internet une zone moins anonyme ».
Mais le Darknet héberge aussi des choses beaucoup moins recommandables. On y trouve en effet de véritables marchés de traite d’humains, de vente de drogue et d’armes à feu, de pédophilie, de services de tueurs à gages et de mercenaires. C’est une zone de non-droit où la loi a toutes les difficultés à s’appliquer, en partie à cause de réseaux non indexés par les moteurs de recherche traditionnels.
Memex pourrait donc être en mesure de changer cette zone de non-droit du Darknet. Selon le site web de la DARPA, « l’utilisation de forums, de chats, de publicités, d’offres d’emploi, de services cachés, etc., continue à servir la croissance d’industries pratiquant un esclavagisme moderne ». En indexant le Darknet, il sera « mis en place des moyens pour découvrir et mettre fin à ces entreprises de trafic illégal ».
Pour Chris Mattmann, Memex a été conçu pour faire deux choses essentielles : la première, il peut contrôler chaque pixel d’une information et en comprendre ses plus petites implications ; la seconde, il peut rechercher dans les métadonnées – les informations qui existent déjà derrière chaque image et vidéo sur le web mais qui sont actuellement invisibles pour les moteurs de recherche.
Selon le chercheur, « les métadonnées deviennent quelque chose de vraiment important », notant qu’« il y a des métadonnées associées aux images et vidéos qui permettent de faire des liens entre elles ». Il déclare que Memex est une technologie qui peut dévoiler la partie invisible de l’Internet grâce à des outils permettant de parcourir le Darknet. « Et il peut faire des relations entre les images et les gens », ajoute-t-il.
Grâce à ce dispositif, il sera possible de dire si une image ou une vidéo a été prise avec le même appareil et de voir quel autre contenu a été créé par la même personne. Il pourra faire également des connexions entre des drogues et les trafiquants qui les vendent, entre des images de personnes enlevées et celles qui ont pris les photos.
Certains sites de réseaux sociaux utilisent déjà les métadonnées pour trouver la géolocalisation d’une image mais Chris Mattmann précise : « Ces sites ne sont pas beaucoup utilisés par les organisations responsables des trafics illégaux ».
Un nouvel Internet
Memex n’est pas seulement un outil pour faire appliquer la loi, même si c’est bien son intérêt réel. Selon Chris Mattmann, Memex est aussi destiné à finir dans les mains des utilisateurs de tous les jours.
Quand le chercheur a rejoint le projet Memex, il avait « la ferme intention que ces technologies développées par le gouvernement au sein de la DARPA puissent devenir un jour des technologies téléchargeables par tout un chacun ».
Des parties de Memex sont d’ailleurs en Open source, c’est-à-dire qu’elles sont accessibles au public et peuvent être utilisées sans frais de licence. En tant que membre du conseil d’administration bénévole d’Apache, Chris Mattmann avait été intéressé pour appliquer Memex dans des technologies comme Apache, qui sont les fondements de l’Internet.
Apache, par exemple, a déjà commencé à utiliser Memex. Les serveurs Web d’Apache ont une puissance suffisante pour supporter 53 % de l’Internet. Une autre technologie basique d’Internet, Drupal, a aussi commencé à l’utiliser, ainsi que Google.
Pour Chris Mattmann, il est possible que les utilisateurs commencent à remarquer que leurs recherches leur fournissent de meilleurs résultats, avec « des informations plus pertinentes, en particulier sur le contenu multimédia ».
Selon le chercheur de la Nasa, « les recherches vont être plus riches sur le plan sémantique », notant que l’information sera plus facile à trouver et « que les résultats seront beaucoup plus significatifs ».
Le principal problème avec les moteurs de recherche actuels – selon la page du projet Memex sur le site de la DARPA, est qu’ils utilisent une approche « centralisée et sans pondération, qui recherche sur Internet avec le même ensemble d’outils, et ceci pour toutes les requêtes ».
Selon le chercheur, le modèle actuel est encore fortement « un processus manuel qui n’a pas de sessions de sauvegarde, qui ne peut chercher que dans une dimension et qui n’organise pas ses résultats cumulés au-delà d’une liste de liens ».
« Bien que ce modèle ait eu énormément de succès dans le commerce » d’après la DARPA, « il ne fonctionne pas bien pour de nombreux cas d’utilisation par le gouvernement ».
Bien sûr, le nouvel Internet ne sera pas mis en service publiquement comme une nouvelle application téléchargeable. Il sera intégré progressivement dans l’Internet existant et son développement se poursuivra en conséquence. Ce processus a déjà commencé.
Dans un an ou deux, déclare Chris Mattmann, il est probable que nous serons tous en train d’utiliser l’Internet Memex. En prenant pour référence l’ Arpanet le réseau créé par la DARPA et qui a contribué à créer Internet, Chris Mattmann prévoit que « l’influence qu’a eue Arpanet sur l’Internet sera aussi importante que celle que Memex a eu sur la recherche sur le web ».
Article original : DARPA Is Creating a New Internet, Based Around Search
Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?
Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.