La « gauche » historique, au sens de l’ensemble des tendances du social-progressisme, est en crise existentielle : avec une persistance troublante, les sondages prédisent à tous ses candidats des scores entre 1 et 10% au premier tour de l’élection présidentielle, soit l’élimination garantie.
Pour faire face à cette question de survie, l’apiculteur Arnaud Montebourg a assommé ces derniers jours les répondeurs téléphoniques de tous les candidats, avec un succès mitigé ; Anne Hidalgo a pris la robe de diaconesse pour proposer une « primaire populaire » afin qu’un, ou une, se retrouve ceint de rameaux et porte le bâton d’une candidature unie. Depuis la Guyane, Christiane Taubira a saisi au bon cette belle occasion pour faire savoir sa disponibilité. Ségolène Royal, avec un hermétisme admirable au faible taux d’adhésion derrière son nom dans les sphères de gauche, n’a pas manqué de faire de même.
Jean-Luc Mélenchon, qui seul émerge encore un peu de l’eau dans les enquêtes d’opinion, a expliqué avec son habituelle clarté de verbe qu’il n’entendait pas s’embourber par solidarité avec des perdants ; personne n’a heureusement eu le mauvais goût de lui indiquer la dissonance entre ce discours de financier politique et les valeurs de défense des plus faibles qu’il entend incarner. Yannick Jadot, enfin, a assuré de son ouverture d’esprit pour un scénario dans lequel toute la « gauche » s’alignerait derrière lui.
Les candidats s’allieront-ils ? Resteront-ils cette « honte » qui fait rougir le front du député européen Raphaël Glucksmann ? Leur dynamique laisse entrevoir un éclatement plus profond et plus définitif de ces partis qui ont grandi sur les ruines de la Seconde Guerre mondiale, tous emballés serrés dans le linceul du parti socialiste pour être jetés à la Seine.
Le monde simple et lisible de la période de la guerre froide a vécu, et l’esprit communiste a éclaté en de multiples courants et tendances, sociales surtout, qui ont fait leur nid et grandi dans les différents replis du corps de la nation. Un peu comme dans l’exemple de l’hydre de Lerne, le sang d’une tête coupée en a fait grandir d’autres, qui ont pris d’autres formes, à l’école, à l’université, dans les médias, par la multiplication des structures de la démocratie sociale. L’idéologie n’a plus besoin de partis politiques pour être portée, elle a emprunté la voix du militantisme contre le racisme, celle de la protection de la planète pour faire des appels bienveillants qui ont progressivement dérivé en sectarisme militant.
Après quelques dizaines d’années, il ne reste qu’une peau morte de la gauche historique, alors que son corps bien vivant se manifeste dans les luttes anxieuses pour des diverses et toujours nouvelles minorités, toujours opprimées par un puissant quelconque et dont le bonheur futur dépendrait nécessairement de la destruction de l’ordre ancien.
Parler de gauche et de droite n’a donc aujourd’hui presque plus aucun sens. La distinction duale entre deux grandes orientations proposées au pays se fait plutôt en observant qui rejoint les progressistes, et qui les conservateurs. Chacun de ces deux camps est, en son sein, traversé par des courants sociaux ou libéraux. Si la politique est bien le domaine qui gère le devenir et « l’être » de la cité plutôt que sa seule gestion administrative, le paysage politique actuel pourrait alors être vu comme suit : du côté des progressistes, qui voient dans la création de nouvelles normes morales une nécessité du futur, se tiennent Emmanuel Macron, Anne Hidalgo, Jean-Luc Mélenchon, Yannick Jadot, Fabien Roussel. Le progrès passerait par la technologie, le changement de la structure sociale, le relativisme moral. Du côté des « réactionnaires » et des enracinés, Éric Zemmour, Marine Le Pen, Nicolas Dupont-Aignan, Jean Lassalle. En balance entre les deux, Valérie Pécresse.
La situation peu désirable de la « gauche » au vu des sondages n’est donc peut-être qu’un échec en trompe-l’œil, car aujourd’hui, 40 à 45% des Français s’alignent avec le camp progressiste contre seulement 30 à 35% avec le camp conservateur. Valérie Pécresse, créditée de 15 à 20% des voix au premier tour, doit au moins une moitié d’entre elles à des électeurs progressistes. La mort annoncée de la structure de la « gauche » telle qu’elle a été connue n’est donc que celle d’une enveloppe, dont l’esprit a retrouvé cent formes de substitution pour continuer de promouvoir la lutte des humains entre eux, sous le prétexte de défense d’opprimés réels ou inventés.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.
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