ÉTATS-UNIS

Elon Musk dévoile tout de la machine à censurer de Twitter en 2020

décembre 3, 2022 14:20, Last Updated: décembre 10, 2022 18:57
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Elon Musk, et le journaliste indépendant Matt Taibbi ont dévoilé vendredi ce qui a poussé les anciens dirigeants de Twitter à supprimer l’article du New York Post sur le portable de Hunter Biden dans les semaines précédant l’élection présidentielle de 2020.

Baptisé The Twitter Files, Matt Taibbi a publié son article dans un fil de discussion sur son compte Twitter, qui, selon lui, s’appuie sur « des milliers de documents internes obtenus par des sources » de Twitter.

Les tweets contenaient des communications entre les employés de Twitter, qui cherchaient à excuser leur décision de censurer l’article sur Hunter Biden.

Elon Musk, devenu grand défenseur de la transparence depuis son rachat de Twitter, a retweeté le fil de Matt Taibbi en faisant valoir que certaines de ces révélations indiquaient de potentielles violations du premier amendement.

Les outils de censure de Twitter

Selon Matt Taibbi The Twitter Files raconte « l’histoire incroyable » d’un des médias sociaux les plus influents au monde qui met à profit tous ses outils pour supprimer des tweets à la demande « d’acteurs connectés ».

Les outils utilisés par les employés de Twitter pour « contrôler la parole » ont été conçus à l’origine pour lutter contre les spams et les fraudeurs financiers, explique Matt Taibbi. Mais avec le temps, le personnel a commencé « à trouver de plus en plus d’usages ces outils ».

Bientôt, et à un rythme croissant, « des personnes extérieures ont commencé à faire des demandes auprès de l’entreprise pour manipuler la parole ».

Le système de censure de Twitter était bien établi lors de l’année électorale de 2020. Officiellement, les deux côtés de la politique américaine y avaient accès, mais le parti pris de la majorité des employés favorisait nettement les démocrates et ceux‑ci avaient bien plus de moyens « de se plaindre » des tweets.

« Par exemple, en 2020, les demandes de Trump et de Biden ont été reçues et traitées », écrit le journaliste.

« Cependant », ajoute-t-il, « ce système n’était pas équilibré. Il était basé sur les contacts. Parce que Twitter était et est très majoritairement composé de personnes d’une seule orientation politique, il y avait plus de canaux, plus de moyens de se plaindre, ouverts à la gauche qu’à la droite. »

Tout au long de son fil, Matt Taibbi a partagé des captures d’écran d’emails et de communications entre des cadres de Twitter, donnant un aperçu sur le fonctionnement de Twitter au moment de la censure de l’article du New York Post sur Hunter Biden.

Dans un courriel daté du 24 octobre 2020, un cadre de Twitter partage une liste de cinq tweets à supprimer, prétendument identifiés par des membres de l’équipe de campagne de Joe Biden.

« En 2020, les demandes des acteurs connectés pour supprimer les tweets étaient une routine. Un cadre écrivait à un autre : ‘Plus de révisions, de l’équipe Biden’. La réponse revenait : ‘Traité’. »

Twitter supprime l’article sur Hunter Biden

Afin de supprimer l’article de Hunter Biden, les cadres de Twitter l’ont marqué comme « dangereux », limitant sa diffusion, l’empêchant même d’être partagé en tant que message privé.

Matt Taibbi fait remarquer que des restrictions aussi extrêmes étaient normalement réservées à des contenus tels que la pédopornographie.

Pour avoir partagé l’article, le compte de l’attachée de presse de la Maison Blanche de l’époque, Kaleigh McEnany, a été bloqué. Mike Hahn, membre de l’équipe de campagne de Trump a donc riposté en envoyant un mail sévère à Caroline Strom, la responsable de la politique publique de Twitter.

Mike Hahn a exigé de savoir quand le compte de Kaleigh McEnany serait rétabli et pourquoi personne chez Twitter ne l’avait informé que l’entreprise censurerait des articles d’actualité.

« Comme je l’ai dit, faites au moins semblant de vous en soucier pendant les 20 prochains jours », a‑t‑il écrit.

Les communications internes de Twitter révèlent une certaine confusion

Selon Matt Taibbi, la décision de censurer l’article est venue des plus hauts niveaux de Twitter, mais à l’insu de Jack Dorsey, alors PDG.

Vijaya Gadde, qui était à la tête des services juridiques politique et d’intégrité de l’entreprise, a joué un « rôle essentiel », selon Matt Taibbi.

« ‘Ils ont fait ça indépendamment’, c’est ainsi qu’un ancien employé a expliqué cette décision », écrit Matt Taibbi.

Les messages entre les cadres des départements de communication et de politique de Twitter, partagés par Matt Taibbi dans des captures d’écran, montrent une certaine confusion, avec un cadre de la communication écrivant : « J’ai du mal à comprendre la base politique pour marquer cela comme dangereux. »

Matt Taibbi rapporte qu’un ancien employé lui a déclaré qu’à ce stade, « tout le monde savait que c’était [*** juron] », mais les cadres ont décidé de « se tromper à l’excès… et de continuer à se tromper ».

« The Mac Shop » à Wilmington, dans le Delaware, le 21 octobre 2020. (ANGELA WEISS/AFP via Getty Images)

Yoel Roth était le responsable de l’intégrité de la sécurité de Twitter avant d’être renvoyé en novembre. Selon lui, la censure de l’histoire de Hunter Biden était légitime du fait que « les matériaux avaient été piratés ».

Mais l’ancien vice‑président des communications mondiales de Twitter a remis en question l’honnêteté de cet argument.

« Pouvons‑nous honnêtement prétendre que cela fait partie de notre politique ? », a‑t‑il écrit dans un message.

L’ancien conseiller général adjoint de Twitter, Jim Baker, reconnaît qu’une partie de l’article du New York Post traitait d’informations provenant d’un ordinateur « abandonné » et non piraté.

Un démocrate soulève la question du premier amendement

Le représentant Ro Khanna (Parti démocrate‑Californie) a contacté Vijjaya Gadde le 14 octobre 2020 pour lui faire savoir que leur décision de censurer l’histoire et de bloquer le compte de Kaleigh McEnany générait une « énorme riposte » à Washington.

Vijjaya Gadde est revenu vers Ro Khanna, citant la politique de l’entreprise en matière de matériel piraté, ce qui a incité Ro Khanna à préciser explicitement que ses préoccupations étaient liées au premier amendement.

« Mais cela semble une violation des principes du premier amendement », a écrit Ro Khanna, notant que si le New York Times, de gauche, devait exposer un crime de guerre grave, il soutiendrait le journal.

« Mais dans le feu d’une campagne présidentielle, restreindre la diffusion d’articles de journaux (même si le New York Post est d’extrême droite) semble susciter plus de réactions négatives que positives », a ajouté Ro Khanna.

Le représentant Ro Khanna (Parti démocrate-Californie) lors d’une conférence de presse au Capitole, le 4 avril 2019. (Saul Loeb/AFP via Getty Images)

Si Ro Khanna était inquiet des implications de la censure quant au premier amendement, selon un sondage réalisé par NetChoice et mis en avant par Matt taibbi, les autres démocrates soutenaient globalement cette démarche.

Après que Matt Taibbi a publié son article, Ro Khanna a déclaré que la constitution américaine et le premier amendement étaient « sacrés » : « Donc j’ai soulevé ces préoccupations. »

La première partie de l’article de Matt Taibbi expose les rouages de la censure qui a permis à la direction de Twitter, majoritairement démocrate, de bloquer un scandale touchant au fils d’un candidat à la présidence.

Matt Taibbi, qui écrit habituellement pour ses abonnés sur Substack, a décidé de présenté son article sous la forme d’une série de « tweets en direct », avec de nouveaux paragraphes publiés les uns après les autres pendant un certain temps vendredi soir.

Il y a « beaucoup plus à venir », a‑t‑il écrit et a promis des réponses aux questions brûlantes que de nombreuses personnalités, généralement conservatrices, ont soulevées sur des questions telles que « le shadow‑banning, le boosting, le nombre d’abonnés, le sort de divers comptes individuels, et plus encore ».

« Ces questions ne touchent pas que la droite », a‑t‑il précisé.

Elon Musk a annoncé qu’un deuxième « épisode » serait publié samedi.

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