Emmanuel Macron, en prenant la parole après des jours de silence, a repris l’initiative dans l’affaire Benalla, sous une pression encore accrue mercredi par de nouvelles passes d’arme au Parlement et, en fin de journée, une perquisition à l’Élysée.
Les enquêteurs sont restés plusieurs heures dans le bureau d’Alexandre Benalla en présence de l’intéressé. Ils en sont sortis vers 20H00.
À plus de 800 km du palais, le président de la République a participé à un « dîner républicain » à Bonnemazon dans les Hautes-Pyrénées, en compagnie d’une quinzaine d’élus, dont François Bayrou, et du directeur du Tour de France, Christian Prudhomme. « On n’a parlé que des Hautes-Pyrénées », a commenté à la sortie Michel Pelieu, le président du Conseil départemental.
Alexandre Benalla, un collaborateur du chef de l’État, a été mis en examen dimanche pour des violences commises à la fin d’une manifestation le 1er mai, et révélées la semaine dernière par Le Monde.
Ces actes sont « une trahison », et « le seul responsable de cette affaire, c’est moi », avait lancé le président mardi soir à ses fidèles réunis pour un pot de fin de session parlementaire : « S’ils veulent un responsable, il est devant vous, qu’ils viennent le chercher ».
Il mettait fin à des jours de silence opposé à une demande de plus en plus forte d’explications de sa part.
Lors d’un bain de foule improvisé à Bagnères-de-Bigorre mercredi en début de soirée, non loin du lieu de son dîner, il a confirmé suivre une stratégie offensive en invectivant des journalistes de BFMTV et CNEWS : « Vous avez dit ces derniers jours beaucoup de bêtises sur soi-disant des salaires, des avantages. Tout cela était faux ».
« J’ai vu ces derniers jours beaucoup de gens perdre la raison avec des réactions disproportionnées et avec une violence… », a regretté M. Macron, fustigeant la recherche d’« un procès politique sur la base d’une affaire qui est triste mais qui est l’affaire d’un homme ».
Le chef de l’État revigore sa majorité
« Je suis fier de l’avoir embauché à l’Élysée », a souligné le président de la République « parce que c’était quelqu’un qui était dévoué et qui avait un parcours différent (…) ».
En prenant enfin la parole, M. Macron a montré qu’il restait « le maître des horloges », a commenté mercredi le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux : celui qui parle quand il l’a décidé, et qui n’a « pas à répondre aux convocations des uns ou des autres ».
M. Griveaux a d’ailleurs de nouveau écarté, au nom de la séparation des pouvoirs, la possibilité que le président s’exprime devant les commissions d’enquête parlementaires. Pour autant, promet ce ministre très proche du président, « toutes les leçons » de l’affaire Benalla seront « tirées à la rentrée » et « des changements profonds interviendront ».
En prenant la parole, Emmanuel Macron a revigoré sa majorité et ses fidèles. Il a « commencé à desserrer le nœud coulant » après « une phase de panique », juge pour l’Agence France Presse (AFP), anonymement, un spécialiste de la communication.
Les auditions continuent
Mardi déjà, les affirmations du Premier ministre Édouard Philippe, selon lesquelles l’affaire Benalla était l’histoire d’une « dérive individuelle » n’avaient fait qu’alourdir l’atmosphère orageuse à l’Assemblée nationale et au Sénat, où les auditions des commissions d’enquête culmineront jeudi avec la convocation d’Alexis Kohler, le plus proche collaborateur du chef de l’État.
Secrétaire général de l’Élysée, M. Kohler sera entendu au Sénat, mais sans doute pas à l’Assemblée.
Selon la présidente de la commission des Lois Yaël Braun-Pivet, la majorité de La République En Marche (LREM) juge en effet « inutile d’auditionner d’autres membres du cabinet du président de la République et du ministre de l’Intérieur », comme le réclame l’opposition Les Républicains (LR).
Philippe Bas, président LR de la commission des Lois du Sénat et qui fut secrétaire général de l’Élysée à l’époque de Jacques Chirac, a dénoncé de son côté « l’idée de minimiser les contre-pouvoirs » après qu’Emmanuel Macron s’en est également pris mardi soir à la presse, et aux pouvoirs judiciaire et législatif.
« Nous avons une presse qui ne cherche plus la vérité », avait lancé mardi Emmanuel Macron, jugeant qu’il y avait aussi « un problème » de fonctionnement de la justice et fustigeant ceux qui veulent faire du Parlement « un tribunal populaire ».
À propos de la réforme des institutions, dont l’examen a été ajourné par cette affaire, Benjamin Griveaux a reconnu que les oppositions avaient « gagné une bataille » tout en affirmant que la révision de la Constitution sera faite.
Après les Hautes-Pyrénées, Emmanuel Macron est attendu jeudi et vendredi en Espagne et au Portugal, pour un déplacement pendant lequel il sera question d’énergie – mais pas, espère sans doute l’Élysée, de l’électricité dans l’air à Paris.
D. S avec AFP
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