L’échec de la visite officielle d’Emmanuel Macron en Chine a été si flagrant que le président français a cru devoir s’en justifier dans une interview au journal Les Échos pendant le week-end de Pâques. Non seulement ses objectifs n’ont pas été atteints, ce qui confronte l’exécutif français à un deuxième camouflet après celui de la rencontre avec Vladimir Poutine en 2022 (un troisième si on remonte en 2021 à l’annulation par l’Australie de la « commande du siècle » de sous-marins français), mais l’armée chinoise a commencé « l’encerclement total » de Taïwan au moment même de la visite du président. Une insulte.
Une diplomatie courageuse ne peut toujours réussir : lorsqu’il s’agissait de courir au-devant de l’échec en rencontrant Vladimir Poutine – qui malgré tous les efforts d’Emmanuel Macron a déclenché l’invasion de l’Ukraine, la frustration était effacée par le courage du geste, une marque de belle diplomatie, à l’image de la tentative par Dominique de Villepin d’empêcher la seconde guerre d’Irak en 2003.
On peut davantage s’interroger sur ce déplacement en Chine d’Emmanuel Macron. Tout d’abord parce que, au vu des attaques incessantes du régime chinois, de ses infiltrations, de ses mensonges lors du Covid, de sa volonté affichée de vassaliser l’Europe, c’eut été à Xi Jinping de venir à Paris pour tenter de montrer que son régime veut changer. C’est au contraire Emmanuel Macron qui s’est présenté aux portes de la cour de Chine pour y demander faveurs et concessions. La marque la plus évidente du mépris du régime chinois a été le démarrage des exercices militaires à balles réelles autour de Taïwan alors même qu’Emmanuel Macron était encore en visite. La seule politesse concédée a été de n’en faire l’annonce officielle qu’une fois le président français dans son avion pour Paris. Quelle plus puissante illustration pourrait-on avoir de la dégringolade de la diplomatie française ? La blessure de l’insulte est d’autant plus cuisante quand on sait la volonté d’Emmanuel Macron de projeter une image de force et de fermeté au niveau domestique.
« L’ensemble de ce voyage a un petit air de Retour vers le futur », déclare à Foreign Policy Nadège Rolland, chargée d’études sur la Chine au Bureau national de la recherche asiatique, basé à Washington. À l’heure où de nombreux dirigeants occidentaux parlent de diversifier leurs intérêts économiques en s’éloignant de la Chine, « il utilise l’engagement économique et demande à la Chine de l’aider ». Mais « les dictateurs ont leur propre pouvoir et leurs propres ambitions, et une discussion avec notre cher président ne les apaisera pas, car leurs intérêts nationaux et personnels sont plus importants ».
Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, était également à Pékin. Elle y a atterri après avoir prononcé à Bruxelles un discours critiquant les pratiques commerciales chinoises et les relations étroites de Xi avec Poutine. Dans des remarques qu’elle a faites avec un drapeau européen en toile de fond, elle a averti la Chine de ne pas fournir d’équipement militaire directement ou indirectement à la Russie, car « armer l’agresseur serait contraire au droit international et nuirait considérablement à nos relations ». Au même moment, M. Macron tweetait en anglais, en français et en mandarin qu’il était « convaincu que la Chine a un rôle majeur à jouer dans la construction de la paix ».
Si Emmanuel Macron est reparti de Chine les mains vides, il y a laissé en gages, au bénéfice du régime communiste, de grands cadeaux de l’industrie européenne : l’avionneur Airbus a annoncé l’installation en Chine d’une nouvelle ligne d’assemblage pour ses avions A320 et A321. EDF renouvelle son partenariat dans le nucléaire avec le géant chinois CGN qui a déjà aspiré une grande partie des savoir-faire technologiques français et qui est soupçonné de les déployer de manière duale dans le civil et le militaire. La société d’ingénierie Gaztransport et Technigaz s’est associée à PipeChina et va lui transférer des technologies pour construire ses réservoirs de gaz naturel liquéfié ; soit un nouvel avantage pour la Chine qui va pouvoir acheter du gaz russe et, grâce à des technologies françaises l’exporter bien plus cher, sous forme liquéfiée, dans le monde entier.
Personne, bien sûr, ne voudrait être dans les chaussures du président quand tant de tensions croisées donnent l’impression que le monde pourrait s’embraser à tout moment. Il doit de plus s’appuyer sur des diplomates français qui, dans leur entre-soi, raisonnent encore en se croyant aussi importants qu’au début du XXe siècle. La France pourrait pourtant aujourd’hui encore bénéficier de respect et d’écoute, malgré sa perte de puissance économique et militaire. C’est ce qui faisait que dans la Grèce antique la parole des Argippéens était recherchée de tous. Ce droit au respect, cependant, a lui aussi été dilapidé au fil des ans par une diplomatie de salon et de petites compromissions. À l’international, le coq français évoque maintenant surtout celui des clochers, tournant toujours dans le sens du vent. S’il faut le dire de façon crue, il nous reste de belles ambassades et le souvenir de Chateaubriand. Mais pour le reste, la diplomatie française est à la rue.
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