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Ivan Rioufol : « Autoriser des tirs de missiles américains sur la Russie s’inscrit dans une stratégie escalatoire pouvant déboucher sur une guerre mondiale »

novembre 21, 2024 9:47, Last Updated: novembre 21, 2024 15:17
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ENTRETIEN – La décision de Joe Biden d’autoriser l’Ukraine à utiliser des missiles de longue portée de fabrication américaine pour frapper la Russie à quelques semaines seulement de la fin de son mandat constitue une tentative de provoquer une escalade avec Moscou pouvant conduire à une Troisième Guerre mondiale, dénonce la garde rapprochée de Donald Trump. Après la première utilisation de missiles américains, Kiev a tiré mercredi pour la première fois des missiles britanniques sur le sol russe. Ivan Rioufol, journaliste et essayiste, apporte son éclairage sur ces développements géopolitiques qui alimentent les craintes d’une mondialisation du conflit.

Epoch Times : L’entourage du futur président américain accuse Joe Biden de risquer une escalade « à des fins politiques ». Il s’agit « d’une nouvelle étape dans l’escalade et personne ne sait où cela va nous mener », a déclaré lundi sur Fox, Mike Waltz, prochain conseiller à la Sécurité nationale de Donald Trump. « Le complexe militaro-industriel semble vouloir s’assurer de déclencher la troisième guerre mondiale avant que mon père n’ait la possibilité d’instaurer la paix et de sauver des vies », a abondé sur X le fils de l’ancien président, Donald Trump Jr. Partagez-vous leur point de vue ?

Ivan Rioufol : Oui, globalement. Car la réalité observée sur le terrain est la suivante : l’Ukraine a perdu, et la Russie a gagné cette guerre. La bataille militaire est terminée, et le vainqueur est désigné. Pourtant, ce que nous voyons aujourd’hui, c’est un refus obstiné d’admettre cette réalité. Ce refus vient naturellement de Kiev, mais aussi de l’Union européenne et de l’administration Biden soutenue par les néoconservateurs américains.

Il se traduit par une prolongation fictive de la guerre, une sorte de théâtralisation morbide, avec l’aval de Joe Biden, qui semble vouloir orchestrer une sortie de scène à la mesure de son positionnement acharné dans ce conflit. Avec l’aval aussi, peut-être, d’Emmanuel Macron qui, de son côté, a autorisé la formation en France de 2300 soldats ukrainiens destinés à retourner sur le front, et promis six avions Mirage à Volodymyr Zelensky. Et ce, alors que l’armée ukrainienne subit défaite sur défaite.

Derrière cette tentative de prolonger artificiellement le conflit, cette stratégie escalatoire qui pourrait déboucher sur une nouvelle guerre mondiale, on peut imaginer que le président français entretient l’espoir de pouvoir recréer une unité autour de sa personne, alors même qu’il se trouve politiquement fragilisé par les crises successives : sociale, économique, gouvernementale, civilisationnelle…

Refuser de reconnaître l’issue de la guerre, et s’enliser dans cette posture enfantine de mauvais perdant, est néanmoins un jeu dangereux, dont les conséquences pourraient s’avérer catastrophiques.

En jugeant lundi « tout à fait bonne » la décision du président américain, Emmanuel Macron ambitionne donc de réendosser le costume de chef de guerre à des fins politiques, selon vous.

La situation de crise politique dans laquelle est plongée Emmanuel Macron le pousse à chercher des portes de sortie. Parmi celles-ci, la plus conforme à son tempérament conflictuel est celle que je viens d’esquisser : l’exacerbation des tensions, la création de peurs, et la recherche d’une union sacrée autour de sa personne.

On l’a vu lors de la crise du Covid, où il avait martelé à six reprises « Nous sommes en guerre », surjouant la menace hygiéniste. On peut donc imaginer une habileté à attiser le feu pour mieux s’ériger en pompier. Il y a quelque chose de Néron chez lui, une propension à jouer avec les conflits pour mieux détourner l’attention des nombreuses crises auxquels la France fait face – les mobilisations agricoles, la crise financière qui s’aggrave, ou encore la crise de régime. Marine Le Pen a d’ailleurs confirmé mercredi matin sur RTL ne pas exclure le vote d’une motion de censure contre le gouvernement Barnier.

Narcisse blessé, Macron agit en irresponsable, guidé avant tout par la préservation de son ego. Plutôt que de démissionner si la poursuite de son mandat devenait impossible, je tiens pour plausible l’hypothèse que le président français, abandonné de tous côtés, pourrait préférer alimenter des guerres inutiles dans le seul but de justifier son maintien au pouvoir.

Plus largement, ce comportement s’inscrit dans une logique irresponsable suivie par de nombreux responsables politiques et journalistes occidentaux qui jouent les va-t-en-guerre confortablement assis dans leur fauteuil et chaussés de leurs pantoufles. Bien entendu, ils n’osent regarder en face les centaines de milliers de morts qu’aura causés cette inutile guerre entre Slaves, peuples frères européens.

Plutôt que de chercher à trouver un terrain d’entente avec la Russie, historiquement proche de notre civilisation, nos dirigeants, belliqueux et bellicistes, ont choisi de la forcer à rejoindre l’Orient. C’est une grave erreur historique commise au motif que Poutine ne serait pas démocratiquement fréquentable, par ceux-là même qui, très souvent, n’hésitent pas à bafouer chez eux les libertés les plus fondamentales.

Dès la fin septembre, Vladimir Poutine avait averti que la Russie pourrait désormais recourir à l’arme nucléaire en réponse à une attaque menée par un pays non doté de capacités nucléaires, comme l’Ukraine, mais soutenu par une puissance nucléaire, comme les États-Unis, considérant alors une telle situation comme une « agression conjointe ». Ce mardi, le président russe a officiellement modifié la doctrine nucléaire de son pays en ce sens. Cette évolution vous inquiète-t-elle ?

À mes yeux, nous restons ici dans le domaine du théâtre stratégique, qui fait partie intégrante de la dissuasion. La dissuasion n’est pas seulement nucléaire, elle passe aussi par les mots. J’ai bien noté que Vladimir Poutine a récemment abaissé les conditions de déclenchement d’une riposte nucléaire. Cependant, il faut comprendre que l’usage du feu atomique n’est jamais un acte unilatéral. Si Poutine décidait de l’employer, cela entraînerait immédiatement une riposte proportionnelle de la part des autres puissances nucléaires.

C’est précisément ce qui rend l’idée d’un recours à l’arme nucléaire hautement improbable. Même si je prends au sérieux les déclarations de Poutine, elles s’inscrivent avant tout dans une stratégie de guerre psychologique. En cela, elles font partie d’une tactique classique destinée à exercer une pression maximale. Comme on dit, c’est de bonne guerre – si vous me permettez ce mauvais jeu de mots.

Selon vous, l’une des grandes victimes de la crise du Covid-19 et de la guerre en Ukraine : la pensée critique, pilier de la civilisation occidentale, au-delà même de la question de la liberté d’expression. Pouvez-vous développer ce point ?

J’ai établi ce parallèle entre la crise sanitaire, la guerre en Ukraine, mais aussi l’élection de Donald Trump car il y a un point commun évident : dans ces trois situations, une pensée unique s’est imposée de manière autoritaire, sommant tout un chacun de s’y conformer sans débat.

Pendant la crise du Covid, le discours hygiéniste et étatiste était présenté comme la seule voie légitime ; toute déviation de la ligne officielle était immédiatement étiquetée comme « complotiste ».

Durant la présidentielle américaine, les mêmes figures médiatiques et intellectuelles assuraient que Donald Trump était un clown incapable de l’emporter face à Joe Biden, étiquetant toute analyse divergente de « populiste » ou « d’extrême droite ». On connait la suite de l’histoire.

Sur la guerre en Ukraine, ces mêmes voix – parfois celles d’intellectuels censés incarner la rigueur et la modération – continuent de rejeter tout appel à la mesure. Ceux qui osent qualifier cette guerre entre deux peuples slaves d’inutile, appellent à une solution diplomatique, ou proposent une contre-argumentation factuelle, se voient immédiatement disqualifiés au travers des épithètes simplistes de « munichois » ou de « poutinistes ».

Non seulement cette pensée unique intolérante, manichéenne et incapable de s’ajuster à la complexité des faits interdit la confrontation d’opinions divergentes, seul moyen de parvenir à la vérité, mais elle est fausse : les mêmes qui pronostiquaient la défaite de Donald Trump étaient souvent ceux qui nous prédisaient une déroute russe.

À ce sujet, la nomination de Robert Kennedy Jr à la tête du ministère de la Santé des États-Unis a suscité une levée de boucliers dans les médias en France, jusqu’au Figaro, qui l’a présenté pour l’occasion comme « antivax notoire et conspirationniste » ainsi qu’« un adepte de théories farfelues ». De quoi cette nomination est-elle le symbole à vos yeux ?

Je perçois cette nomination telle un vent de liberté qui souffle pour tenter de balayer les interdits de pensée, en particulier ceux imposés durant la crise sanitaire. Seul le discours de l’Organisation mondiale de la santé, construit pour alimenter une peur artificielle, était toléré.

Aujourd’hui, il est largement reconnu que cet alarmisme était disproportionné. Je m’attends donc à des révélations importantes sur l’hystérie hygiéniste qui a terrorisé le monde entier et qui servi à imposer, sous la pression des laboratoires pharmaceutiques, la vaccination comme seule solution, au mépris des scientifiques proposant des alternatives thérapeutiques.

Ce que promet Donald Trump, c’est de s’attaquer à deux piliers majeurs de ce système. D’un côté, l’État profond, c’est-à-dire le pouvoir démesuré acquis par une bureaucratie fédérale aux États-Unis – une tâche qu’il a confiée à Elon Musk. De l’autre, Big Pharma, ce consortium de l’industrie pharmaceutique qui, comme l’industrie militaire dépend des guerres, ne prospère qu’en exploitant les épidémies.

Cette opération vérité sur ces politiques qui s’assimilent à une mise au pas mondialiste des peuples terrorisés par des peurs fictives ne pourra que profiter au débat démocratique.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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