Les Jeux Olympiques et Paralympiques pourraient être peu rentables si l’on s’appuie sur les précédentes éditions de la compétition et son budget public pourrait exploser.
Depuis l’attribution officielle des Jeux à la France en septembre 2017, les membres du comité d’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques (Cojop) et du gouvernement ont régulièrement justifié l’accueil de l’événement mondial par ses retombées économiques.
Mais à un moins de 100 jours des Jeux, la facture s’allonge en s’approchant des 9 milliards d’euros, avec une estimation des recettes pour le moins optimiste. La Cour des comptes estime, quant à elle, le coût pour les finances publiques entre 3 et 5 milliards d’euros, alors que tout n’est pas encore compté.
Le président du Cojop, Tony Estanguet, parle maintenant des recettes s’élevant à 10,7 milliards d’euros, alors que les auteurs de cette estimation table plutôt sur des retombées économiques estimées entre 5 et 8 milliards. Une différence qui s’élèverait alors à quelques milliards d’euros.
Un budget de plus de 10 milliards d’euros
D’après la dernière étude du cabinet Asterès parue le 5 février 2024, les dépenses publiques totales pour l’organisation des Jeux s’élèveraient à 5,2 milliards d’euros, pour un budget total de 11,8 milliards d’euros, avec le budget du Cojop.
Concernant son propre budget, la Cojop assure que la compétition est financée à 96% par de l’argent privé, principalement grâce aux sponsors (1,24 milliards), au Comité international olympique (1,2 milliard) et à la billetterie (1,4 milliard). Au total, 4,4 milliards d’euros vont servir à louer le Stade de France, à payer des agents de sécurité et les intermittents du spectacle pour la cérémonie d’ouverture, les lits du village olympique et les tribunes temporaires, etc. et bien sûr les salaires des dirigeants des JO de Paris 2024. Du point de vue de son budget, le Cojop insiste sur le fait que les Jeux financent le Comité d’organisation sans perte financière.
Mais si le budget de la Cojop sera à l’équilibre avec 4,2 milliards d’argent privé, du côté des dépenses publiques, on craint un dérapage de plusieurs milliards d’euros aux frais du contribuable.
Le budget total des Jeux qui était de 3,8 milliards d’euros lors du dépôt de la candidature en 2015, s’élève aujourd’hui à 8,9 milliards d’euros et des observateurs indiquent que la facture finale dépassera les plus de 10 milliards d’euros, avec l’objectif de ne pas dépasser les 12 milliards des JO de Tokyo.
Plus de 50% du budget total viendra de l’argent public
Les Jeux olympiques de Paris « devraient coûter » entre 3 et 5 milliards d’euros d’argent public, a estimé fin mars le premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, indiquant que tous les coûts ne sont pas encore connus.
Si « les Jeux financent les Jeux », d’après la formule des organisateurs – comprenez, le budget du Cojop mais pas le budget total – il a toujours été prévu que les infrastructures seraient prises en charge par l’argent public. Le village olympique qui sera transformé en logements mis sur le marché (646 millions d’euros dont 542 venant de l’État), la passerelle entre le Stade de France et le centre aquatique olympique, des contributions aux nouvelles piscines de Seine-Saint-Denis via la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo), ce sont déjà près d’1,8 milliard d’euros d’infrastructures venant de l’argent public (État, région IDF, Paris, Seine-Saint-Denis, etc) qui sont allés aux JO.
Parmi les dépenses encore difficiles à chiffrer figurent des dépenses de personnel, correspondant notamment aux primes versées aux policiers chargés d’assurer la sécurité durant cette période de forte intensité et aux primes des autres fonctionnaires impliqués. Des imprévus inhérents à la mise en place d’un événement de cette envergure sont également annoncés. La Cour des Comptes, qui est chargée de comptabiliser les finances des JO, devrait produire un rapport qui sera publié à l’automne 2025, soit plus d’un an après la fin des Jeux.
L’argument du comité d’organisation pour expliquer ces dépenses publiques est que les infrastructures construites pour les Jeux olympiques seront pérennes et que leur utilisation va perdurer dans le temps. Mais pour certains sites, comme le Château de Versailles, les installations temporaires n’ont pas vocation à être utilisées au-delà de l’événement et les principales installations pérennes se situent dans le département de la Seine-Saint-Denis.
Des retombées économiques surestimées
À chaque fois que le budget des Jeux a été réévalué et augmenté, la prévision des recettes augmentait miraculeusement en même temps, dépassant toujours d’une courte tête les coûts. La dernière estimation des retombées économiques fin mars 2024 était alors de 10,7 milliards d’euros nous assurait Tony Estanguet, quand au même moment l’estimation du budget commençait à approcher les 10 milliards d’euros, voir plus, d’après certains analystes.
Selon Complément d’enquête, cette estimation du président du Cojop provient d’une étude de 2016 supervisée par le professeur Wladimir Andreff, président du conseil scientifique de l’Observatoire national du sport, qui prévoyait trois scénarios : le ‘rose’ à 10,7 milliards d’euros, le central à 8,1 milliards d’euros, et le ‘gris’ à 5,3 milliards d’euros – le plus probable pour les statisticiens étant à ce moment-là le scénario central.
Si le comité d’organisation voit la vie en rose avec des recettes estimées de 10,7 milliards d’euros, l’auteur de cette étude se montre plus mesuré : « On leur avait recommandé de ne pas mettre ça », explique celui qui a apporté la caution à cette étude, affirmant avoir « poussé énormément pour que l’on communique sur les trois chiffres ».
Questionnés par Complément d’enquête, les organisateurs des Jeux disent avoir « privilégié le scénario le plus favorable de façon transparente, pour des raisons volontaristes ». Wladimir Andreff, de son côté, estime que les retombées économiques se dirigent au mieux, vers un chiffre qui se situera » entre 5 et 8 [milliards d’euros] : c’est très, très probable qu’on soit dans cette zone-là” en évoquant cependant aussi le scénario le plus pessimiste.
Selon le cabinet Asterès, la typologie d’effets économiques des Jeux olympiques est difficile à chiffrer. En ce qui concerne le tourisme, l’effet sera globalement positif mais « certains touristes peuvent ne pas venir dans la ville organisatrice justement à cause de l’événement, de crainte de payer plus cher les services (hôtels, restaurants) ou de voir les transports saturés. »
Le cabinet évoque aussi la difficulté d’estimer le coût économique de la perturbation du fonctionnement de certaines entreprises de par l’afflux du public ou des contraintes sécuritaires. En prenant l’exemple des précédentes Olympiades, ils constatent que l’organisation d’un tel événement n’a pas d’influence notable sur la croissance des pays hôtes.
« Pas de dérive budgétaire, pas de coût caché », affirme Amélie Oudéa-Castéra
La ministre des Sports et des JO, Amélie Oudéa-Castéra a réfuté tout dérapage budgétaire en assurant le 2 avril devant les députés qu’il n’y avait « pas de coût caché ni de dérive budgétaire » s’agissant de la facture des Jeux olympiques et paralympiques de Paris. La ministre a garanti qu’un « travail fin d’évaluation » était en cours, ministère par ministère, pour ce qui est des dépenses de l’État.
Mais à moins de 100 jours de l’évènement, « la zone de risque est maintenant », relève une source gouvernementale. Avec des retombées économiques surestimées par le comité d’organisation des Jeux, un budget des dépenses publiques qui ne cessent d’augmenter, on peut se poser la question de la réalité des retombées économiques avancées pour le pays et devant la masse des sommes dépensées, à qui vraiment vont profiter ces Jeux.
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