La vidéosurveillance dite « intelligente » que veut expérimenter le gouvernement lors des JO-2024 sera encadrée par de nombreuses « garanties », a plaidé mercredi le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin à l’Assemblée nationale, sans convaincre une gauche inquiète pour les libertés publiques.
La mesure en question est au cœur du volet sécuritaire du projet de loi de préparation des Jeux olympiques de Paris, examiné depuis lundi par l’Assemblée. Elle prévoit d’autoriser le couplage de la vidéosurveillance à un traitement algorithmique des images, capable d’alerter sur des situations jugées anormales.
« Beaucoup d’inexactitudes ont été évoquées » par les opposants à cette technologie, a estimé M. Darmanin dans l’hémicycle, rejetant toute idée de « surveillance de masse ». « Il s’agit d’avoir un outil d’aide à la décision des forces de l’ordre, il ne s’agit pas de reconnaître des personnes, mais des situations », a-t-il assuré, citant des colis abandonnés ou encore des mouvements de foule, alors que 13 millions de spectateurs sont attendus lors des JO. Un agent « devant un mur d’images décidera si cela mérite une intervention », a insisté M. Darmanin.
Une longue liste de « garanties prévues »
Le ministre, soutenu par les députés du camp présidentiel, a lu une longue liste de « garanties prévues ». Il a souligné que l’expérimentation, qui pourra concerner d’autres événements que les JO, s’arrêterait fin 2024 et qu’il y aurait une interdiction de la « reconnaissance faciale et du traitement biométrique ». Ses arguments n’ont pas convaincu les groupes de gauche de la Nupes et des députés du groupe indépendant Liot, qui ont tenté sans succès d’obtenir la suppression ou la réécriture de l’article autorisant les traitements des images par des algorithmes.
« Vous vous cachez derrière l’argument que la reconnaissance faciale sera interdite pour cacher le fait que les données sur les visages seront traitées par les algorithmes et archivées », a lancé la députée écologiste Sandra Regol. Cette loi « propose de transformer en cobayes l’intégralité de la population sur le territoire français », a-t-elle estimé.
La députée LFI Elisa Martin a elle aussi mis en doute les garanties avancées. « On analyse des données de mouvements corporels, donc c’est bien de la biométrie », a-t-elle estimé, pointant « un risque objectif pesant sur les libertés fondamentales ». Pour le socialiste Roger Vicot, le gouvernement demande « un chèque en blanc ». « Vous nous dites : on déterminera ce qu’est un comportement anormal, un futur décret le fera » mais « dites-nous en amont ce que les algorithmes vont traquer ». Le RN, favorable à la vidéosurveillance « intelligente », a demandé sans succès qu’elle soit strictement limitée aux lieux précis des événements visés, et non à leurs « abords ».
De nouveaux amendements rejetés
Des amendements demandant d’interdire la vidéosurveillance algorithmique depuis des drones ont également été rejetés. Clin d’œil, le député Liot Jean-Félix Acquaviva a présenté un amendement rédigé par une intelligence artificielle, en l’occurrence ChatGPT, qui suggérait « d’assurer une transparence adéquate quant aux traitements algorithmiques mis en place ». Il a été rejeté.
Les débats, interrompus à minuit, doivent reprendre jeudi à l’Assemblée. Le projet de loi a déjà été adopté avec une confortable majorité en première lecture au Sénat, dominé par la droite.
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