Shamima Begum, une épouse jihadiste qui s’était montrée jusqu’alors sans remords, a exprimé son regret d’avoir rejoint le culte de la terreur de Daech et a reconnu qu’elle avait subi un « lavage de cerveau ».
S’adressant au Times of London dans le camp de réfugiés d’al-Roj en Syrie le 1er avril, S. Begum a déclaré : « Je regrette d’avoir eu des enfants au califat », et a demandé aux autorités britanniques à l’autoriser à rentrer au Royaume-Uni.
« Je suis venue en pensant que ce serait un lieu d’appartenance où je pourrais élever une famille en toute sécurité », a déclaré S. Begum, citée par le Times. « Mais ce n’était pas un endroit pour avoir des enfants. »
La réadmission de S. Begum en Grande-Bretagne a été refusée en février lorsque les autorités britanniques l’ont considérée comme une menace pour la sécurité et lui ont retiré sa citoyenneté.
La jeune femme de 19 ans s’est enfuie de son domicile londonien en 2015 pour rejoindre Daech en Syrie, où elle a épousé une recrue djihadiste du Danemark.
Le mari de Shamima Begum, Yago Riedijk, a rejoint le culte de la terreur jihadiste en 2014 et l’a épousée un an plus tard à l’âge de 15 ans. Ils ont eu trois enfants, tous morts.
Dans un état de grossesse avancée pour son troisième enfant, S. Begum a fait surface dans un camp de réfugiés syrien en février après avoir fui le Baghuz meurtri par les combats. C’est là qu’elle a donné naissance à un petit garçon, décédé le 8 mars.
« Depuis que j’ai quitté Baghuz, j’ai vraiment regretté tout ce que j’ai fait, et j’ai envie de retourner au Royaume-Uni pour une deuxième chance de recommencer ma vie », a-t-elle déclaré au Times. « J’ai subi un lavage de cerveau. Je suis venue ici en croyant tout ce qu’on m’avait dit, tout en sachant peu de choses sur les vérités de ma religion. »
Reconnaissance de la radicalisation
La récente interview de S. Begum avec le Times est la première fois qu’elle admet avoir été radicalisée.
« Quand je suis sortie d’al-Dawlah[Daech], j’étais encore dans la mentalité du lavage de cerveau : je les ai toujours soutenus grâce à ce qu’ils m’ont dit et à ce qu’ils m’ont enseigné », a-t-elle déclaré à la publication.
Dans sa première interview en février, S. Begum a déclaré qu’elle n’était pas d’accord avec tout ce que le groupe terroriste avait fait, mais qu’elle n’avait « aucun regret » d’avoir rejoint Daech et a suggéré que les frappes aériennes contre le groupe terroriste en Syrie « justifiaient » l’attaque terroriste du Manchester Arena.
« C’est une chose à double sens », avait-t-elle dit à la BBC, ajoutant que l’attentat-suicide à la bombe qui a tué 22 personnes lors d’un concert d’Ariana Grande à Manchester était une « sorte de représailles » pour les bombardements des enclaves tenues par Daech, ajoutant : « Alors je pensais, OK, c’est une justification correcte. »
Interrogée sur son point de vue sur les atrocités particulièrement flagrantes que les extrémistes djihadistes ont commises, S. Begum a déclaré au Times que le fait de voir des « têtes décapitées » dans des bacs « ne l’avait pas déstabilisée ».
Interrogée par un journaliste de Sky News : « Saviez-vous ce que faisait l’État islamique[Daech] quand vous êtes partie en Syrie ? »
« Parce qu’ils avaient décapité des gens. Il y a eu des exécutions, répondit-elle, j’étais au courant de ces choses et j’étais d’accord avec ça. »
Après avoir fui Baghuz, elle a d’abord été cachée dans le camp d’al-Hol, où S. Begum a dit qu’il y avait des groupes de femmes jihadistes tunisiennes qui étaient « encore plus radicales que Daech ».
Elle a déclaré au Times dans la dernière interview qu’en plus d’être sous l’emprise de l’idéologie djihadiste, elle s’est sentie contrainte de ne pas s’exprimer contre Daech dans des entretiens antérieurs avec des journalistes.
« De retour à al-Hol, il y avait beaucoup de dangers à ne pas soutenir Dawlah[Daech]. Menacer de brûler ma tente et tout ça. Je savais que tout le monde suivait mon affaire, ce que les journalistes disaient de moi et ce que je disais, comment je me présentais aux journalistes, donc tout ce que je disais contre Dawlah, ils m’attaquaient immédiatement, donc j’en avais peur. »
S. Begum a été transférée à l’établissement d’al-Roj, où elle a dit : « J’ai en quelque sorte accepté de rester ici, je vais devoir en faire une résidence secondaire. »
Le retour de S. Begum en Grande-Bretagne a été bloqué par les autorités britanniques au motif qu’elle présentait un risque pour la sécurité.
Sa famille a contesté en justice la décision du gouvernement britannique de lui retirer sa citoyenneté et de l’empêcher effectivement d’entrer au pays.
Une foule de femmes de Daech assiègent al-Hol
Une foule violente d’épouses de Daech – dont certaines étaient armées – ont assiégé des gardes dans le camp de réfugiés d’al-Hol, blessant jusqu’à 30 membres du personnel de sécurité.
Selon le Times of London, les gardes du camp d’Al-Hol, dans le nord de la Syrie, ont été dépassés en nombre par un groupe important de femmes en tenue noire le 21 mars, et n’ont réussi à disperser les troubles qu’après des tirs d’avertissement.
« Les femmes criaient que si j’étais entre leurs mains, elles me décapiteraient », a déclaré Jani, 18 ans, qui s’occupe de ce camp qui a vu un afflux important d’extrémistes jihadistes fuyant le califat Daech en ruine.
Les autorités du camp avaient initialement prévu l’afflux d’environ 15 000 réfugiés, mais aujourd’hui ce chiffre est d’environ 72 000, selon le Times.
Les gardes ont dit que des sympathisants du jihadiste qui affluaient dans l’établissement ont été trouvés avec des ceintures de suicide cachées dans leurs vêtements, des couteaux dans leurs cheveux et de petites armes planquées dans leurs affaires.
Un haut responsable de la police a été cité par le Times comme ayant déclaré : « Daech est fini, alors il essaie de se venger ici. Ils peuvent même soudoyer des ONG pour qu’elles apportent des armes à l’intérieur. Même les magasins à l’intérieur du camp, ils peuvent leur donner de l’argent et les faire apporter des armes. »
Très dangereux
Des experts en matière de sécurité comme Alex Younger, chef des services de renseignement britanniques, ont averti que les candidats au retour comme S. Bégum pouvaient être « très dangereux » parce qu’ils se trouvaient dans « ce genre de situation » et que des gens comme elle avaient probablement acquis certaines « compétences ou relations ».
Les survivantes et les autres victimes du règne de terreur de la secte meurtrière sont furieuses à l’idée que les femmes de Daech puissent être entendues par la presse occidentale, ou pire, par la presse indépendante.
Ali Y. Al-Baroodi, qui a survécu à l’occupation sanglante de Mossoul par Daech, a déclaré au Jerusalem Post que les affirmations des épouses jihadistes selon lesquelles elles n’étaient « que des femmes au foyer », comme S. Begum a insisté, ne sont pas crédibles.
« C’était l’enfer sur Terre et chacune d’entre elles l’a rendu ainsi », a-t-il dit, demandant avec sarcasme si les victimes locales des femmes djihadistes ne devraient pas s’excuser d’avoir perturbé leur séjour là-bas.
« [Daech] a démoli des villes et des centaines de fosses communes, [et a fait] des milliers d’orphelins et de veuves », a-t-il ajouté.
« Il est impossible d’avoir de la sympathie pour elle », a écrit l’auteure et universitaire Idrees Ahmad en référence à S. Begum, selon le Post. « Elle s’est rendue en Syrie en tant que colonisatrice, plusieurs mois après que Daech a décapité des journalistes et des travailleurs humanitaires. »
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