ENTRETIEN – Le président de Reprenons le contrôle ! Charles-Henri Gallois analyse pour Epoch Times l’audition de Gabriel Attal par la commission d’enquête de l’Assemblée nationale la semaine dernière. Il revient également sur le budget 2025.
Epoch Times – La semaine dernière, l’ancien Premier ministre Gabriel Attal était auditionné par la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur les dérives des comptes publics en 2023 et 2024. « Nous avons pris des mesures souvent impopulaires, mais impératives pour baisser nos dépenses et tenir nos déficits », a-t-il déclaré. Quelle est votre réaction ?
Charles-Henri Gallois – Comme très souvent Gabriel Attal se moque du monde et fait de la communication. Il nous dit qu’il a pris des mesures pour réduire le déficit à l’époque, mais quand vous regardez les études d’impact du FMI, vous vous rendez compte qu’elles n’ont pas été importantes. Il explique, par ailleurs, que pour la première fois depuis 2015, les dépenses de l’État ont baissé.
Mais l’ex-Premier ministre a oublié de dire que ces dépenses ont baissé mécaniquement pour deux raisons : la fin du bouclier tarifaire, soit 8 milliards d’euros de dépenses en moins ; et la baisse de l’inflation. Souvenez-vous des fameux emprunts indexés sur l’inflation que j’ai été le premier à dénoncer. Cela a mécaniquement fait baisser de 4 milliards d’euros de plus les dépenses de l’État.
Outre ces éléments, les dépenses de l’État ont même continué à augmenter ! Gabriel Attal n’est donc pas sérieux quand il parle de diminution des dépenses. En plus de la faiblesse des mesures mises en œuvre, il y a ici un véritable problème d’information vis-à-vis de la représentation nationale et de l’opinion.
La semaine dernière, Le Figaro a révélé les notes confidentielles de Bruno Le Maire. Nous y apprenons que l’ancien ministre de l’Économie savait qu’il y aurait un dérapage dès le début de l’année 2024 et qu’il avait prévenu Gabriel Attal, mais que ce dernier n’a pas voulu en parler pour que le bloc central ne soit pas impacté lors des élections européennes. C’est un véritable scandale ! Cela signifie qu’il y a eu dissimulation avec pour but de fausser un résultat électoral.
Par ailleurs, nous apprenons également que même Emmanuel Macron a été tenu au courant par Bruno Le Maire. Le président n’a pas réagi non plus. C’est honteux. Ce dérapage des finances publiques de 2024 est catastrophique.
C’est d’autant plus grave que chacun pouvait aisément deviner qu’il y aurait un dérapage. Pour ma part, dès que la copie du projet de loi de finances (PLF) 2024 a été rendue publique, c’est-à-dire en septembre 2023, j’avais regardé les hypothèses et expliqué ensuite que ce budget ne permettait pas de réduire le déficit à 4,4 %. Ce dernier tablait sur une croissance de 1,4 % alors que tous les instituts sérieux donnaient une croissance située entre 0,9 et 1,1 %. Il y a donc eu des hypothèses qui sont irréalistes.
Quand vous gonflez la croissance, vous grossissez artificiellement les recettes fiscales et vous présentez un déficit qui est inférieur à ce qu’il va être si la prévision de croissance est inférieure. Il y a, là aussi, un scandale par la présentation d’un budget insincère. Malheureusement, ce n’est pas le premier. Depuis 2017, les gouvernements macronistes présentent des budgets trop optimistes.
À la fin, vous vous retrouvez avec un déficit bien plus important que prévu parce qu’il n’y a pas la croissance attendue, et par conséquent, les recettes fiscales qui vont avec.
Pourtant, devant le Sénat en novembre, Bruno Le Maire niait toute « dissimulation » ou « volonté de tromperie ».
Oui, il pouvait le nier, mais encore une fois, ces notes secrètes montrent que c’est bien le cas. Maintenant, Bruno Le Maire va certainement se couvrir derrière ces notes pour dire qu’il avait alerté le Président et le Premier ministre. Mais il n’a pas alerté le Parlement et le public. La dissimulation est donc bien là.
En plus, rien n’a été fait pour réduire le déficit et nous avons fini l’année 2024 avec un déficit de 6,1 %. C’est un dérapage de plus de 50 milliards d’euros ! Il est évident que cette tendance aurait pu se voir avant. Nous avions été nombreux à alerter à l’époque. Aujourd’hui, avec ces notes secrètes, vous avez les preuves réelles de cette dissimulation.
Les auteurs de ce scandale devraient être poursuivis. Je rappelle qu’en 2018, la macronie a fait adopter une loi pour lutter contre les fausses informations en période électorale. À eux d’être responsables et d’accepter d’être sanctionnés.
Le projet de loi de finances 2025 a été adopté la semaine dernière. Comment jugez-vous son contenu ?
Ce budget est très mauvais : nous avons atteint des niveaux records de dépense publique et le gouvernement l’augmente de 2,2 % en valeur et de 0,5 % en volume. C’est-à-dire que même sans l’inflation, la dépense publique continue à augmenter, de près de 40 milliards d’euros. Ce n’est pas acceptable. Aucune réforme économique structurelle n’a été proposée, ni de mesures sur la fraude sociale, l’UE, l’immigration ou le train de vie de l’État et la bureaucratie. Le gouvernement a coupé des crédits ici et là, mais sans plus.
Par une manipulation de la communication, il fait croire aux Français qu’ils sont en train de baisser la dépense publique. Non, il a baissé la dépense publique qu’il pensait augmenter, mais en valeur absolue, celle-ci est toujours en hausse.
En parallèle, il y a un matraquage fiscal, notamment une hausse de taxes et d’impôts de 21 milliards d’euros, ciblant principalement les entreprises, mais aussi les particuliers avec les droits de mutation et la taxe sur les billets d’avion.
J’ai entendu la gauche parler de budget « austéritaire » et ensuite le député macroniste Jean-René Cazeneuve expliquer que non puisque la dépense publique continue à augmenter. Quel aveu ! La macronie avoue qu’elle va continuer à jeter l’argent par les fenêtres. En outre, ce budget est austéritaire, non pas dans la dépense, mais pour les recettes.
Si vous augmentez de manière significative les prélèvements sur les particuliers, vous allez mécaniquement baisser la consommation qui constitue l’un des gros piliers de la croissance française. Et si vous faites de même avec les entreprises, vous allez freiner les investissements qui sont, eux aussi, un des leviers de la croissance.
Ce budget prévoit une croissance de 0,9 %, mais je vous le dis dès maintenant, il va amener un ralentissement économique supérieur de telle sorte que vous aurez une croissance bien inférieure à la fin. Et comme la croissance va être inférieure, les recettes fiscales seront elles aussi plus faibles. In fine, le déficit sera encore supérieur à ce qui est prévu.
Pourtant, il est précisé sur le site gouvernemental Vie publique que le budget prévoit de « réduire les dépenses de l’État et de ses opérateurs de 23,6 milliards d’euros ». Cela ne permet pas d’assainir les finances publiques ?
Non. Quand vous regardez les chiffres, ce n’est pas vrai. En fait, quand ils disent qu’ils réduisent la dépense publique, ils diminuent la hausse qu’ils considèrent comme naturelle ou qu’ils auraient prévu. Mais ce n’est pas une réduction. C’est une réduction de la hausse.
En fait, il n’y a pas d’économies structurelles dans ce PLF. Le gouvernement augmente de 40 milliards d’euros la dépense publique. C’est toute la problématique. Vous savez que dans la croissance du PIB, on retient l’inflation, donc leur croissance en volume des dépenses publiques est de 0,5 %. Et le gouvernement va vous dire que comme il prévoit une hausse du PIB de 0,9 %, la dépense publique va finalement augmenter moins vite que le PIB.
Mais encore une fois, le matraquage fiscal prévu par le budget va lourdement impacter la croissance. Je pense que cette dernière sera inférieure à 0,5 % de telle sorte que vous aurez la dépense publique qui aura encore augmenté davantage que la croissance du PIB. Ainsi, le ratio dette publique/PIB va continuer à augmenter.
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