Aussitôt nommé Premier ministre, Michel Barnier a promis parmi ses priorités la « maîtrise des flux migratoires avec des mesures concrètes ». Fin 2021, pendant sa campagne pour la primaire des Républicains, il défendait des positions fermes sur le sujet, en proposant le durcissement des critères du regroupement familial et un référendum sur l’immigration.
En début d’année, la loi immigration adoptée par les deux chambres avait été largement censurée par le Conseil constitutionnel. Trente cinq articles, comme le durcissement de l’accès aux prestations sociales, des quotas migratoires annuels, le resserrement des critères du regroupement familial, avaient été retoqués malgré le vote à l’Assemblée nationale et au Sénat.
Mais une tendance générale s’opère en Europe, la Suède, l’Italie et récemment les Pays-Bas et le Royaume-Uni commencent à durcir leurs règles sur l’immigration illégale, se disant victimes d’une violence endémique et de la menace du terrorisme islamiste. Le dernier exemple en date, le retour des contrôles aux frontières décidé par l’Allemagne contre l’avis de l’Union européenne, afin de faire face à des menaces pour l’ordre public à la suite d’attaques terroristes.
L’Allemagne rétablit des contrôles à toutes ses frontières
L’Allemagne a rétabli, pour six mois, des contrôles à l’ensemble de ses frontières pour lutter contre l’immigration illégale. Des contrôles policiers mobiles et stationnaires avec la France, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Belgique et le Danemark s’ajoutent désormais à ceux déjà en place aux frontières avec la Pologne, la République tchèque, l’Autriche et la Suisse.
En principe, de tels contrôles aux frontières intérieures sont proscrits au sein de l’Espace Schengen, mais en cas de menaces pour l’ordre public ou la sécurité, ils sont possibles pour une durée de six mois, avec prolongation pour une durée totale n’excédant pas deux ans.
Ces dernières semaines, l’Allemagne a été touchée par une série d’attaques islamistes commises par des étrangers, dont la plus meurtrière a été un attentat au couteau commis par un Syrien et revendiqué par le groupe jihadiste État islamique dans un festival à Solingen fin août, qui a fait trois morts et plusieurs blessés.
Depuis, le gouvernement du chancelier Olaf Scholz a durci son arsenal contre l’immigration illégale, alors que pendant des années, l’Allemagne a mené une politique d’asile ouverte, accueillant plus d’un million de réfugiés, essentiellement syriens, en 2015-2016.
La Commission européenne a rappelé que des mesures de ce type « doivent rester strictement exceptionnelles » et plaidé pour qu’elles soient « proportionnées ». Berlin a invoqué la nécessaire « protection de la sécurité intérieure contre les menaces actuelles du terrorisme islamiste et de la criminalité transfrontalière ».
L’Italie diminue son l’immigration clandestine de 65 % en 2024
Autre exemple de renforcement du contrôle des flux migratoires, l’Italie. Selon des données du ministère de l’Intérieur transalpin, l’immigration clandestine a diminué en 2024 de 65 %, une baisse notamment liée à une politique de partenariat avec des pays méditerranéens.
Pour arriver à ce résultat, l’Italie a signé des accords avec la Tunisie prévoyant des aides financières en contrepartie d’efforts accrus pour réduire les départs de migrants, ainsi qu’avec la Libye, en vertu duquel l’Italie fournit une formation et un financement aux garde-côtes libyens afin d’endiguer les départs de migrants ou de renvoyer en Libye ceux qui sont déjà en mer.
Un accord signé entre Rome et l’Albanie prévoit également l’ouverture d’un premier centre dans le port de Shengjin destiné à enregistrer les demandeurs d’asile, et d’un second dans la même région, où ils seront hébergés dans l’attente du traitement de leur demande. Ces deux centres – financés et gérés par l’Italie, sur le territoire d’un pays qui ne fait pas partie de l’Union européenne (UE) mais y aspire – pourront accueillir jusqu’à 3000 migrants arrivés en Italie par voie maritime. Les migrants dont la demande d’asile sera rejetée seront renvoyés dans leur pays d’origine, tandis que ceux dont la demande est acceptée seront admis en Italie.
Le Royaume-Uni reconnaît l’approche pragmatique de l’Italie
Le Premier ministre britannique Keir Starmer, en visite à Rome le 15 septembre, a salué les « progrès remarquables » de l’Italie dans la lutte contre les filières d’immigration clandestine et défendu dans ce dossier une « approche pragmatique » de son gouvernement.
« Vous avez fait des progrès remarquables, en travaillant d’égal à égal avec les pays se trouvant sur les routes migratoires afin de traiter, à la source, les facteurs de la migration et de contrer les réseaux, et le résultat est que les arrivées illégales par la mer en Italie ont baissé de 60 % depuis 2022 », a déclaré Starmer lors d’une conférence de presse avec son homologue italienne Giorgia Meloni.
Le Premier ministre britannique, qui a rejeté le plan du précédent gouvernement conservateur britannique d’expulser des migrants au Rwanda, se dit « intéressé » par la méthode de Giorgia Meloni. « Il y a eu ici [en Italie] une réduction assez spectaculaire [des entrées de migrants clandestins], donc je veux comprendre comment cela s’est produit », a expliqué Starmer en visitant le Centre national de coordination (NCC) sur la migration à Rome.
Dans la Manche, les traversées se poursuivent et les drames se succèdent : huit migrants sont morts dans le naufrage de leur embarcation de fortune, le 15 septembre, au large des côtes françaises. Au total, 46 personnes ont péri depuis le début de l’année.
La Suède veut faciliter le retour des migrants dans leur pays d’origine
D’autres pays européens mettent en place des mesures différentes pour lutter contre l’immigration clandestine. Le gouvernement suédois a proposé le 12 septembre de fortement augmenter en 2026 l’aide au retour des migrants, jusqu’à plus de 30.000 euros par personne, une nouvelle mesure de la coalition de droite au pouvoir pour réduire l’immigration.
« Nous franchissons de nouvelles étapes dans la réorientation de la politique migratoire », a déclaré dans un communiqué le ministre des Migrations Johan Forssell. Selon lui, une seule personne a accepté l’allocation l’an dernier. Un montant nettement amélioré pourrait séduire plusieurs centaines de milliers de migrants qui sont chômeurs de longue durée ou dont les revenus doivent être complétés par les aides sociales pour s’en sortir. D’autres pays européens proposent une aide au retour, de plus de 13.000 euros au Danemark, d’environ 1300 euros en Norvège et de jusqu’à 2500 euros en France.
La Suède a durci sa politique migratoire ces dernières années, restreignant le regroupement familial et relevant le niveau de salaire minimum nécessaire pour octroyer un permis de travail aux migrants extérieurs à l’Union européenne. Le gouvernement veut en outre faciliter l’expulsion des migrants en cas de consommation de drogues, de liens avec des gangs criminels ou s’ils « menacent les valeurs fondamentales suédoises ».
La Suède a accueilli un grand nombre de personnes souhaitant immigrer sur son sol depuis les années 1990, principalement en provenance de régions en proie à des conflits, notamment d’ex-Yougoslavie, de Syrie, d’Afghanistan, de Somalie, d’Iran et d’Irak. Sur la seule année 2015, pendant la crise des migrants en Europe, la Suède a accueilli 160.000 demandeurs d’asile, soit le taux d’accueil le plus élevé par habitant dans l’Union européenne.
Le Danemark renforce les contrôles avec la Suède après une montée des violences
Le Danemark a annoncé début août renforcer les contrôles à ses frontières avec la Suède, qui peine à contenir une recrudescence de la violence entre gangs. Copenhague entend éviter une propagation de la violence sur son territoire.
« Juste avant les vacances d’été, le Parlement danois a adopté […] un très vaste train de mesures concernant les gangs qui […] donne à la police de nouveaux et meilleurs outils pour lutter contre le crime organisé », a souligné le ministère de la Justice.
Depuis avril, des jeunes venant des cités suédoises sont impliqués dans 25 affaires liées au crime organisé, a expliqué le ministre danois de la Justice Peter Hummelgaard. La Suède peine à contenir la violence des luttes entre gangs criminels depuis plusieurs années, faisant très fréquemment face à des fusillades et à des explosions. Ces violences étaient initialement liées à la lutte pour le contrôle du trafic de drogue mais se sont étendues, entre autres, à des rivalités personnelles.
Les nouvelles mesures drastiques des Pays-Bas en matière d’asile
Le gouvernement néerlandais a présenté le 13 septembre ses plans prévoyant des restrictions drastiques en matière d’asile.
La coalition au pouvoir aux Pays-Bas veut entamer un processus pour déclarer une « crise de l’asile », lui permettant selon les médias néerlandais de déroger à certaines règles de la « loi sur les étrangers » en vigueur, et d’imposer des mesures plus strictes. Parmi celles-ci, l’abrogation d’une « loi sur la distribution » – qui oblige les municipalités à créer des places d’accueil pour demandeurs d’asile – ou un durcissement des règles sur le regroupement familial.
La Haye entend aussi faire savoir à Bruxelles « dans les plus brefs délais » vouloir une option de non-participation à l’asile européen et à la réglementation sur les migrations.
En France, le temps des promesses
Le nouveau Premier ministre Michel Barnier défendait dans le passé des positions fermes sur l’immigration et la sécurité : « On ne répare rien, on ne construit rien sans sécurité, si ce sont les passeurs et les juges qui décident qui peut entrer en France et qui peut y rester », affirmait-il au Figaro en novembre 2021, pendant la campagne des primaires des Républicains pour la présidentielle de 2022.
L’ancien commissaire européen proposait un « moratoire » sur l’immigration de trois à cinq ans : une « pause » qui serait un « préalable à la reprise en main de notre politique migratoire », expliquait-il. Dans cette optique, le candidat voulait « cesser les régularisations inconditionnelles des sans-papiers », « accélérer le parcours du demandeur d’asile », durcir les critères du regroupement familial, et réduire la délivrance des visas long séjour.
Il proposait aussi l’utilisation d’un référendum pour permettre de retrouver une « liberté de manœuvre » en matière d’immigration, suggérant que la France devrait s’affranchir des règles garanties par les instances juridiques de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe, un chemin que commencent à prendre de plus en plus de pays européens depuis le début de l’année.
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