Alors que le monde est en train de combattre une pandémie sans précédent, le Parti communiste chinois (PCC) profite de l’occasion pour réaliser ses projets industriels et devenir une superpuissance technologique.
Connu sous le nom de « Normes chinoises 2035 », le plan économique est le prolongement du plan industriel « Made in China 2025 » qui a pour objectif de permettre à la Chine de parvenir à son autonomie dans dix secteurs technologiques d’ici 2025.
Pékin a mis en place des normes chinoises en mars 2018 lors d’une réunion tenue à l’Académie chinoise d’ingénierie, gérée par l’État. L’objectif de ce plan est de permettre au régime chinois de dominer les nouvelles technologies comme l’intelligence artificielle, les grandes données et l’IdO (Internet des objets) en développant des normes technologiques et en les exportant sur le marché international.
Tirer profit de la pandémie
La pandémie fait désormais partie des normes chinoises 2035, après la publication par l’Administration nationale de normalisation (SAC) d’un nouveau document intitulé Principaux points du travail de normalisation nationale pour l’année 2020, en mars.
Le document constitue « la feuille de route initiale pour les normes chinoises 2035 ; l’ensemble des actions à prendre, et le positionnement à acquérir, au cours de l’année prochaine », a écrit la société de conseil indépendante basée aux États-Unis, Horizon Advisory, dans son rapport d’avril analysant le document.
Horizon Advisory a fait remarquer que ce document représentait le prochain pas que la Chine va franchir dans le cadre de sa grande stratégie.
Le document chinois explique comment la Chine devrait « accélérer le développement des méthodes de prévention et de détection des épidémies Covid-19 et des normes de contrôle de qualité », tout en promouvant des normes comprenant « les matériaux de prévention et de contrôle des épidémies et les équipements de soutien de la chaîne industrielle ».
Cela se traduit actuellement par l’envoi de matériel médical et d’experts de la santé par la Chine dans d’autres pays pour lutter contre le virus, a déclaré Emily de La Bruyère, cofondatrice d’Horizon Advisory, dans un entretien par courrier électronique. Pékin cherche à exporter « les normes chinoises relatives à l’administration et à la gestion des soins et de la santé publique », a-t-elle déclaré.
Plusieurs pays, dont Israël, les Pays-Bas, l’Espagne et la République tchèque, ont dénoncé la mauvaise qualité ou le mauvais fonctionnement du matériel médical chinois.
Emily de La Bruyère a précisé que l’aide de Pékin accordée à d’autres pays s’accompagne également de systèmes de technologie de l’information, comme le paquet de services internationaux « anti-épidémie » proposé par le géant technologique chinois Tencent.
Sur son site web, Tencent explique que ce paquet contient des services tels que des programmes informatiques permettant d’organiser des réunions en ligne et des bases de données sur les connaissances médicales concernant le virus.
Les responsables américains ont déjà attiré l’attention sur les risques inhérents à la société Tencent, en soulignant que ses liens avec l’appareil de sécurité de l’État chinois font de cette entreprise un « bras de surveillance du PCC« .
« Tencent exploite également la plate-forme internationale d’information Covid-19 de Pékin », a ajouté Emily de la Bruyère.
Alors que les entreprises du monde entier s’efforcent de développer un vaccin contre le virus du PCC*, communément appelé le nouveau coronavirus, Pékin est également désireux d’utiliser un grand nombre de participants aux essais cliniques, « pour tirer parti de cette position afin d’étendre ses normes en matière de recherche et développement, de production, de distribution et de soins, alors que la course pour trouver un traitement progresse », a déclaré Nathan Picarsic, un autre cofondateur d’Horizon Advisory, dans un entretien par courrier électronique.
Le régime chinois, a-t-il ajouté, a accordé une priorité particulière au développement de la production et des normes pharmaceutiques dans les normes « Made in China 2025 » et « Chine 2035 ».
Fusion militaire et civile
Les deux plans s’appuient sur l’initiative de Pékin, dirigée par l’État, qui consiste à tirer parti de la coopération entre l’armée et l’industrie privée pour faire progresser l’innovation technologique. L’effort est baptisé « fusion militaire-civile » et est désormais supervisé par une agence gouvernementale appelée la Commission centrale pour le développement de la fusion militaire-civile.
Dans le document du SAC du mois de mars, la fusion civilo-militaire a été mentionnée à plusieurs reprises, notamment les plans visant à accroître « les efforts conjoints des organisations techniques normalisées militaires et civiles ».
De nouvelles restrictions américaines à l’exportation vers la Chine ont été promulguées fin avril pour freiner le flux de technologies américaines vers l’armée chinoise dans le cadre de la stratégie de « fusion » de Pékin.
Le ministère du Commerce des États Unis exige désormais des entreprises américaines qu’elles obtiennent des licences pour vendre certains articles à des entreprises chinoises qui soutiennent l’armée chinoise, même si ces articles sont destinés à un usage civil. Cette liste d’articles comprend des équipements de production de semi-conducteurs et des capteurs.
Emily de la Bruyère a expliqué que les restrictions à l’exportation ne réduiront pas les ambitions du PCC, mais que « ces mesures sont les premières étapes nécessaires pour mieux comprendre la menace et rivaliser dans le domaine des normes ».
« La stratégie de Pékin repose sur l’accès à la technologie et à l’innovation américaines. Pékin craint un ‘blocus des hautes technologies' », a-t-elle ajouté.
Depuis mai de l’année dernière, le gouvernement américain a également ajouté une liste d’entreprises chinoises à la liste des entités, ce qui signifie que les entreprises américaines doivent obtenir des licences spéciales pour faire des affaires avec elles.
Parmi ces sociétés figurent Huawei et ses 114 filiales non américaines ; cinq sociétés chinoises de superordinateurs et leurs nombreux pseudonymes ; la plus grande société nucléaire d’État chinoise CGNPG et ses trois filiales ; des sociétés chinoises d’intelligence artificielle comme SenseTime Group et Megvii Technology, et des fabricants de matériel de surveillance comme Hikvision.
En novembre 2019, le ministère du Commerce a annoncé une procédure pour sécuriser les réseaux de télécommunications américains et leurs chaînes d’approvisionnement, en adoptant une « approche au cas par cas, spécifique aux réalités » pour examiner et interdire toute transaction qui présente des risques pour la sécurité. La procédure a été largement perçue comme ciblant les entreprises de télécommunications chinoises telles que Huawei et ZTE, selon Reuters.
Puis, en janvier, le ministère du Commerce a annoncé des restrictions à l’exportation pour les entreprises technologiques américaines fabriquant des logiciels d’intelligence artificielle pour l’analyse d’images satellites, ce que les experts ont également considéré comme une manœuvre visant à bloquer l’entrée de cette technologie en Chine.
Nathan Picarsic a expliqué que la Chine a une approche fondamentalement différente des autres pays dans sa quête d’innovation technologique.
Au lieu d’investir « dans la recherche fondamentale et dans les sciences et technologies fondamentales », le PCC profite des lacunes dans les réglementations et l’acquisition de parts des sociétés étrangères pour dominer les chaînes d’approvisionnement mondiales.
En fin de compte, le régime chinois utilise « cette emprise pour influencer les normes, en assurant le contrôle du segment industriel le plus important », a expliqué M. Picarsic.
Logistique en matière de transport
Le rapport de Horizon Advisory a fait remarquer que la Chine a déjà fait des progrès en matière de normes internationales grâce à sa plateforme logistique nationale de transport contrôlée par l’État, LOGINK.
LOGINK est un réseau de partage d’informations logistiques construit et mis en œuvre par plusieurs ministères du gouvernement chinois, notamment les Transports, la Science et la Technologie, le Commerce et la Sécurité publique, selon son site web. Il travaille avec des entreprises chinoises telles que le géant du transport maritime COSCO et l’opérateur logistique Cainiao, qui est dirigé par le géant de la technologie Alibaba.
La Chine veut que des pays adoptent le logiciel de données et de logistique LOGINK, pour pouvoir accéder à de grandes quantités de données utilisées dans le transport des marchandises.
Pékin « cherche à révolutionner l’accès à l’information et le contrôle du PCC au niveau mondial, à propulser le positionnement des entreprises et des systèmes d’information chinois et à cimenter les normes internationales – elles-mêmes comme normes de référence pour la fondation de l’information du transport moderne », a déclaré Horizon Advisory dans son rapport.
LOGINK est membre du groupe commercial, International Port Community Systems Association.
5G
La nouvelle génération de technologie de communication sans fil, la 5G, est une autre priorité pour le régime chinois.
Huawei est actuellement le plus grand fournisseur de normes 5G, selon un rapport publié au mois de mars par la société américaine de recherche et de conseil Strategy Analytics.
La société chinoise est particulièrement en avance en termes de fournisseur de logiciels et d’équipements matériels (dits de bout en bout) pour les infrastructures de réseau 5G, alors que d’autres entreprises de télécommunications sont à la tête pour des spécifications techniques particulières.
« La compétition sur les normes est l’épreuve de force stratégique du siècle », a expliqué Emily de la Bruyère. « Pékin l’a prévu, explicitement, depuis au moins l’an 2000 », a-t-elle ajouté.
Politique future
Le gouvernement américain, a-t-elle ajouté, doit bien comprendre la concurrence de ses normes avec Pékin, et notamment l’impact à long terme des réseaux et plates-formes détenus par Pékin, comment cette concurrence pourrait menacer les systèmes économiques, sécuritaires et politiques américains.
Il ne suffit pas que le gouvernement américain se concentre sur des entreprises chinoises spécifiques telles que Huawei, a déclaré Emily de la Bruyère, car « le soutien du régime de Pékin peut simplement les remplacer par une nouvelle armée ».
Nathan Picarsic a fait remarquer que « Pékin a l’intention de faire de cette compétition une affaire à long terme, en temps de paix ».
Il a expliqué que Pékin avait un avantage, étant donné la taille de son marché et « la protection minutieuse de ses propres infrastructures et données critiques ».
Les États-Unis ne peuvent rivaliser avec Pékin que s’ils collaborent avec des alliés, a conclu M. Picarsic.
* Epoch Times désigne le nouveau coronavirus, responsable de la maladie du Covid-19, comme le « virus du PCC », car la dissimulation et la mauvaise gestion du PCC ont permis au virus de se propager dans toute la Chine et de créer une pandémie mondiale.
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