Le chef de l’ONU a entamé lundi à Doha les discussions avec des représentants des puissances mondiales sur l’approche à adopter envers les autorités de Kaboul, et la manière de les inciter à assouplir leur position sur les droits des femmes.
Le gouvernement taliban est le grand absent à cette réunion à laquelle le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a convoqué 25 pays et organisations, dont les envoyés spéciaux des États-Unis, de la Chine et de la Russie, ainsi que les principaux donateurs. Les autorités de Kaboul n’ont pas été invitées à participer à la rencontre qui doit s’achever mardi.
Et la reconnaissance de leur régime « n’est pas à l’ordre du jour de cette réunion », a déclaré Stéphane Dujarric, porte-parole de l’ONU, annonçant le début des discussions qui se déroulent à huis clos.
L’objectif de cette réunion est de « parvenir à une compréhension commune au sein de la communauté internationale sur la manière de s’engager avec les talibans » sur les droits des femmes et des filles, la lutte contre le terrorisme ou encore le trafic de drogue, a-t-il dit. « Toute forme de reconnaissance des talibans est totalement exclue », a insisté la semaine dernière le porte-parole du département d’État américain, Vedant Patel.
Une manifestation de femmes à Kaboul
En amont de ce rendez-vous diplomatique, des femmes afghanes ont manifesté samedi à Kaboul pour exprimer leur opposition à toute reconnaissance internationale du gouvernement taliban. Dans une lettre adressée aux émissaires dimanche, une coalition de groupes de femmes s’est dite « indignée » qu’un quelconque pays puisse envisager d’établir des liens formels avec les autorités afghanes, en raison de leur bilan en matière de droits des femmes. Les droits des femmes relèvent d’une « question sociale interne », a indiqué lundi à l’AFP le porte-parole adjoint du gouvernement taliban, Bilal Karimi.
Si le gouvernement des talibans « souhaite un dialogue positif » avec la communauté internationale, il estime que les « questions internes », telles que les restrictions aux droits des femmes, ne doivent pas entrer en ligne de compte dans les discussions, a-t-il dit. « Ces questions ne doivent pas être utilisées comme des outils politiques. »
Une condamnation unanime des restrictions imposées aux femmes
Deux décennies après leur éviction, les talibans ont repris le pouvoir à l’été 2021 en chassant le gouvernement soutenu par la communauté internationale. Les autorités talibanes ont alors imposé une version rigoriste de la loi islamique, qualifiée d' »apartheid basé sur le sexe » par l’ONU. Les femmes se retrouvent désormais exclues de la plupart des établissements d’enseignement secondaire et des universités. Elles ne sont pas non plus autorisées à travailler dans la plupart des administrations publiques, ni dans les agences de l’ONU et les ONG.
Les 15 membres du Conseil de sécurité ont voté jeudi à l’unanimité une résolution condamnant les restrictions imposées aux femmes en Afghanistan, en exhortant tous les pays à œuvrer pour « inverser d’urgence » ces politiques. Après ce vote, le ministère afghan des Affaires étrangères a déclaré que « la diversité devrait être respectée et non politisée ».
L’ONU devant « un choix affreux »
Selon des diplomates et des observateurs, la réunion de Doha met en évidence le dilemme auquel est confrontée la communauté internationale dans ce pays, où l’ONU fait face à l’une des crises humanitaires les plus graves au monde.
Selon la secrétaire générale adjointe des Nations unies, Amina Mohammed, il est « clair » que les autorités talibanes aspirent à être reconnues. Une normalisation des relations avec l’ONU leur permettrait notamment de récupérer les milliards de dollars saisis à l’étranger après leur arrivée au pouvoir.
Selon des diplomates, Antonio Guterres devrait faire le point à Doha sur un examen des opérations humanitaires de l’ONU en Afghanistan, demandé en avril après l’interdiction faite aux femmes afghanes de travailler avec les agences de l’ONU. L’ONU, qui considère que les femmes sont essentielles à son travail en Afghanistan, se dit confrontée à un « choix affreux », celui de continuer ou non ses opérations dans ce pays de 38 millions d’habitants.
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