«Les antibiotiques, ce n’est pas automatique», scandait une campagne publique d’information lancée par les autorités sanitaires en 2000. Dix ans plus tard, l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament (ANSM) constate, dans un rapport, une baisse «significative» de la consommation d’antibiotiques, de l’ordre de 10,7%, mais se préoccupe désormais de voir une «augmentation de 5,9%», ces trois dernières années.
Le problème de la surconsommation des antibiotiques ne concerne pas que notre pays, loin s’en faut. Il y a quelques jours, le Premier ministre britannique s’alarmait de voir notre médecine «régresser au Moyen-Age» si rien n’était fait pour lutter contre les résistances aux antibiotiques développés par les bactéries. À Hong Kong, qui compte une forte densité de population, les médecins s’effraient d’une recrudescence de «super bactéries», qui infecteraient une personne toutes les 18 minutes.
Un tiers des infections impossible à traiter
L’ANSM observe également que la consommation d’antibiotiques en France est «de 30% supérieure à la moyenne européenne». De quoi préoccuper les experts du monde médical. «C’est un problème préoccupant car la hausse de la consommation se traduit par une résistance accrue aux antibiotiques et on observe un développement des situations d’impasse thérapeutique», explique Philippe Cavalié, responsable de l’ANSM.
Un lien qu’on ne peut ignorer: des bactéries comme les staphylocoques dorés sont résistants à la méthicilline dans 57% des cas en France, contre 1% au Danemark et 9% en Allemagne. Dans notre pays, plus d’un tiers des infections dues à cette bactérie sont devenus impossibles à traiter, que ce soit par antibiotiques ou par toute autre médication.
Ce qui est inquiétant, d’après les autorités sanitaires, n’est pas le fait qu’il y ait apparition de bactéries résistantes –un phénomène déjà observé dans la nature, mais bien que ceci se passe aussi rapidement et massivement. L’OMS fait état de 25.000 décès par an, qui seraient ainsi dus aux résistances développées par les bactéries.
D’ici à 2016, le gouvernement avait prévu de diminuer de 25% la consommation des antibiotiques dans notre pays. Un objectif «mal engagé», d’après l’ANSM, qui espère un renversement de tendances dès l’année prochaine.
Les Français, «responsables» face à la médication
D’après une étude réalisée par les Entreprises du Médicament (LEEM), 82% des Français font confiance aux médicaments, et 16% se déclarent «tout à fait confiants». C’est encore plus le cas lorsque ces derniers sont délivrés sur ordonnance (94%), ou remboursés (93%). «Prescription et prise en charge sont les 2 indicateurs d’efficacité les plus pertinents pour les Français.», conclut l’étude. Pour 63% d’entre nous, les médicaments sont associés à des mots majoritairement positifs. Comme les deux premiers termes qui reviennent le plus souvent, «soin» et «guérison». Et cette confiance augmente «particulièrement pour les médicaments remboursés», remarque le LEEM. Quant aux médicaments sans ordonnance, ils sont davantage associés à la notion de «soulagement» dans l’esprit du public.
Alors qu’on sait que dans notre pays, 9 consultations sur 10 finissent par une ordonnance, les interrogations vont bon train sur l’origine et la portée de la surconsommation médicamenteuse. On croit par exemple les Français «accros » aux antidépresseurs, mais il apparaît que si la France comptait 2 fois plus de patients victimes de dépression au début des années 2000, par rapport à l’Allemagne, notre pays est tout de même 10e en Europe dans leur consommation, et se situe dans la deuxième moitié du classement établi par l’OCDE.
L’usage d’antibiotique, une spécificité culturelle ?
Il n’est donc pas si facile de confirmer une «spécificité française» face à la surconsommation, d’après les résultats des différentes études. Toutefois, d’après Christian Lajoux, président du LEEM. Les Français font «preuves de responsabilité», contrairement aux «idées reçues». «Une écrasante majorité (94 %) estime que les médicaments sont des produits actifs présentant certains risques, ce qui va dans le sens des messages de bon usage que porte le LEEM», souligne-t-il.
Les antibiotiques feraient-ils donc exception? Les États-Unis rencontrent le même problème, avec une nette surconsommation dans ce domaine. Mais pas forcément pour les mêmes raisons. En France, malgré l’effet discutable des campagnes publiques sur le long terme, la sensibilisation sur une médication appropriée n’est pas sans résultat. D’après le LEEM, 93% des Français font confiance aux professionnels de la santé dans la prescription des médicaments, avec 82% pour les médecins et 57% pour les pharmaciens.
Une petite note d’espoir, pour finir: l’entreprise de biotechnologie Micreos, aux Pays-Bas, vient de présenter un nouveau traitement permettant de venir à bout des staphylocoques dorés insensibles aux antibiotiques. Le traitement, qui se présente sous forme de crème à étaler sur la peau, est basé sur l’utilisation d’une enzyme permettant de détruire les membranes des bactéries. Coïncidence? Les Pays-Bas sont le pays d’Europe le moins enclin à utiliser les antibiotiques (1%).
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