C’est le scénario d’un drame en trois actes. Le 12 août, le régulateur européen Thierry Breton décide d’adresser une lettre de mise en garde à Elon Musk avant son entretien avec Trump sur le réseau social X. Le lendemain, la Commission européenne se désolidarise de l’initiative de son commissaire européen en déclarant qu’un tel envoi n’avait pas été validé. C’est ensuite au Congrès des États-Unis de publier une lettre adressée à Thierry Breton, exigeant de mettre fin aux tentatives d’intimidations visant « à interférer avec le processus démocratique américain ».
En cause, l’application du Digital Services Act – ou DSA, nouvelle loi européenne de contrôle des plateformes et des contenus, dont l’interprétation peut donner lieu à une censure de la liberté d’expression.
Acte 1 : l’UE annonce vouloir prendre des mesures contre X
Le régulateur du marché intérieur de l’Union européenne (UE), Thierry Breton, a mis en garde le 12 août le propriétaire de X, Elon Musk, avant son entretien avec Donald Trump, indiquant que des « mesures provisoires » pourraient être prises à l’encontre du réseau social.
« Une grande audience implique une plus grande responsabilité », a écrit Thierry Breton dans une longue lettre publiée sur X, affirmant que les dispositions de la loi européenne sur les services numériques (DSA) « s’appliquent sans exception ni discrimination à la modération de l’ensemble de la communauté des utilisateurs et du contenu de X (y compris vous-même en tant qu’utilisateur avec plus de 190 millions d’abonnés) qui est accessible aux utilisateurs de l’UE », a écrit le commissaire.
Thierry Breton n’a pas précisé les mesures que l’UE pourrait prendre – toutefois, dans des avertissements précédents, le commissaire européen a prévenu que X pourrait se voir infliger une amende allant jusqu’à 6 % de son chiffre d’affaires annuel.
Linda Yaccarino, directrice générale de X, a réagi à la lettre de Thierry Breton en déclarant qu’il s’agissait d’une « tentative sans précédent d’étendre une loi destinée à s’appliquer en Europe » pour cibler des activités politiques sur le territoire des États-Unis.
Acte 2 : la Commission européenne se désolidarise de son commissaire
La Commission européenne a nié toute implication dans la décision de son régulateur du marché intérieur d’envoyer une lettre d’avertissement à Elon Musk. La porte-parole adjointe de la Commission, Arianna Podestà, a déclaré au Financial Times que Thierry Breton n’avait pas reçu l’approbation de la présidente de l’UE, Ursula von der Leyen.
« Le calendrier et la formulation de la lettre n’ont été ni coordonnés ni convenus avec la présidente ni avec les [commissaires] », a déclaré Arianna Podestà, lors d’un point de presse le lendemain de l’envoi de la lettre du commissaire européen. La porte-parole a déclaré que la lettre de Thierry Breton était « de nature générale » et faisait seulement référence à la loi sur les services numériques.
« Je crois que la lettre, je l’ai ici devant moi, était vraiment de nature générale, et la référence à l’entretien était un exemple d’un grand événement qui, bien sûr, attire beaucoup d’utilisateurs et peut potentiellement avoir des retombées importantes dans l’UE », a-t-elle ajouté.
Acte 3 : le Congrès des États-Unis répond à Thierry Breton
Le 15 août, c’était au tour du Congrès américain de répondre à Thierry Breton, en publiant sa réponse sur le réseau social X.
S’adressant directement au commissaire européen avec un « Cher M. Breton », la Chambre des représentants des États-Unis a rappelé qu’elle contrôle comment et dans quelle mesure des entreprises et d’autres intermédiaires peuvent censurer des discours légitimes sur le sol américain.
La lettre continue en expliquant que le Congrès a reçu des témoignages sur la manière « dont des fonctionnaires d’autres gouvernements, dont Thierry Breton et d’autres fonctionnaires de l’Union européenne ont cherché à censurer la liberté d’expression – notamment politique », lors de l’entretien entre Elon Musk et Donald Trump.
La lettre du Congrès finit par un avertissement au commissaire européen : « À la lumière de vos récentes menaces de représailles à l’encontre de X […], nous vous écrivons pour exiger que vous mettiez fin à toute tentative d’intimider des individus ou entités impliquées dans le discours politique aux États-Unis et que vous n’entrepreniez aucune action de nature à interférer avec le processus démocratique américain ».
Alors qu’en Europe, ce type de restrictions sur la liberté d’expression ne rencontre aucune résistance, aux États-Unis, c’est le Congrès lui-même qui s’est chargé d’en établir les limites.
Le Digital Services Act (DSA) en question
Le 17 février, le Digital Services Act est entré en vigueur dans l’Union européenne. Les fournisseurs numériques ont désormais l’obligation de lutter contre les contenus jugés illégaux sous peine d’amendes colossales. Pour Thierry Breton, le DSA permet d’encourager « tous les États membres à tirer le meilleur parti de notre nouveau règlement ». « Une application efficace est essentielle pour protéger nos citoyens contre les contenus illégaux et faire respecter leurs droits », a-t-il ajouté.
Cependant, certains analystes – comme le groupe de réflexion MCC Bruxelles – craignent que la loi permette à Bruxelles de dicter ce qui peut ou ne peut pas être dit en ligne. Dans un rapport publié en mai, le MCC Bruxelles dénonce un « système d’exploitation pour contrôler la liberté d’expression », intégré dans les institutions européennes, les ONG et les grandes technologies dans « une alliance contre nature des régulateurs ».
Jacob Reynolds, responsable de la politique du MCC Bruxelles, a déclaré à Epoch Times que même si la commission semble se distancier de Thierry Breton, le DSA reste une loi phare de l’UE. « Il semble qu’ils veulent se distancier de la lettre parce qu’ils n’aiment pas le genre de fureur qui s’ensuit », a-t-il déclaré, « mais ils ont lancé une procédure contre Musk, qui relève en grande partie de la Commission européenne », a-t-il ajouté.
Il a déclaré que même s’il peut y avoir une « sorte de tentative de distanciation en surface », il existe une « guerre contre la liberté d’expression » et « un empire de la censure » au sein de la politique officielle de l’Union européenne.
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