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Une bibliothèque vieille de 300 ans abrite des chauves-souris pour lutter contre les parasites et les insectes qui mangent le papier et les vieux livres

août 1, 2024 0:23, Last Updated: août 2, 2024 1:03
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Les chauves-souris replient leurs ailes de cuir le jour, suspendues par des griffes semblables à des crochets, haut dans les chevrons. Elles se reposent, invisibles, derrière les grandes bibliothèques dorées, jusqu’au crépuscule où elles sortent pour festoyer.

Ce sont les chauves-souris de la bibliothèque, qui attendent la nuit pour attraper les insectes qui, sans elles, se nourriraient des livres inestimables qui y sont conservés.

Le soir, lorsque les gens sortent du bâtiment baroque vieux de 300 ans, le personnel de la Biblioteca Joanina sait qu’il doit s’attendre à les voir sortir. En fait, depuis des siècles, les chauves-souris jouent un rôle essentiel dans la bibliothèque, à savoir la lutte contre les nuisibles dans ce qui est considéré comme l’une des plus belles bibliothèques du monde.

Vous ne les verrez pas lors de vos visites.

En arrivant à l’université portugaise de Coimbra, où se trouve la Biblioteca Joanina, les touristes seront impressionnés par l’intérieur flamboyant de la magnifique décoration du XVIIIe siècle lorsqu’ils entreront pour la première fois par l’ancienne place pavée du Palais des écoles. Ils passeront devant la statue du fondateur de la bibliothèque, le roi Jean V du Portugal, qui lui a donné son nom.

Les tables en bois exotiques sont recouvertes de grandes feuilles de cuir la nuit pour les protéger des déjections de chauves-souris. (agsaz/Shutterstock)
Derrière les étagères de la bibliothèque Joanina se trouve une colonie de chauves-souris. (Martin Lehmann/Shutterstock)
Une chauve-souris pipistrellus commune. (Corina Daniela Obertas/Shutterstock)

Le siècle des Lumières était en train de naître lorsque sa construction a commencé en 1717. La construction s’est achevée en 1728. Les premiers livres sont arrivés en 1750. Aujourd’hui, la bibliothèque compte quelque 70.000 volumes consacrés aux sciences, au droit civil et canonique, à la philosophie et à la théologie, dont certains remontent au XVe siècle. On dit que ces volumes représentent le meilleur de ce qui a été imprimé sur le continent.

L’entrée principale de la Bibliothèque Joanina depuis la place du Palais des Écoles de l’Université de Coimbra, au Portugal. (rui vale sousa/Shutterstock)
Vue depuis l’entrée principale vers l’intérieur de la Bibliothèque Joanina. (Benny Marty/Shutterstock)

Lorsque vous entrez par la place, vous vous trouvez en fait au troisième et plus haut étage de la biblioteca, appelé l’étage noble, richement orné. C’est là que se trouvent les grandes bibliothèques dorées. Les trois salles de cet étage sont séparées par de hautes arches ornementées et sont remplies d’étagères en bois de chêne exotique et multicolore. Les bois précieux et tropicaux du Brésil témoignent de la gloire impériale passée du Portugal.

Les portes d’entrée en teck ferment l’ensemble de la structure comme une chambre forte qui renferme un trésor. Des murs de pierre de plus de 2 mètres d’épaisseur permettent de réguler la température et l’humidité pour la conservation des volumes antiques qui y sont entreposés.

Il y a deux étages inférieurs, bien sûr, mais puisque nous parlons de conservation, il faut mentionner ces mammifères volants à fourrure.

Vous ne les verrez pas. Mais vous les entendrez peut-être. Au crépuscule, il peut y avoir des échos de gazouillis et de cris ou des vocalisations décrites comme des chauves-souris qui « chantent », selon la Smithsonian institution (Groupe de musées et de centres de recherche administrés par le gouvernement des États-Unis). Si vous restez dehors la nuit, on dit que vous les verrez voltiger à l’extérieur ou retourner à l’intérieur pour se mettre à l’abri.

Balcons et meubles décorés à l’intérieur de la salle Noble. (agsaz/Shutterstock)
La salle Noble présente un portrait central du roi Jean V du Portugal. (Sopotnicki/Shutterstock)

Si l’odeur du bois de chêne engendre un répulsif naturel pour les insectes, ces chauves-souris sont bien plus efficaces. Elles ont un appétit vorace pour les insectes qui adorent fouiller dans les livres en papier et les manuscrits. Mais les insectes dont elles raffolent le plus sont peut-être les moustiques. Le personnel préfère la nuisance des chauves-souris qui chassent les parasites à la tâche de s’occuper des parasites eux-mêmes.

Le seul vrai souci, ce sont les excréments des chauves-souris.

Selon la tradition, le personnel sait qu’il faut recouvrir les luxueuses crédences de vastes feuilles de cuir pour les protéger de ces déjections. Dans les bibliothèques et les églises européennes, cette méthode a fait ses preuves depuis des siècles. Le matin, le personnel enlève les protections de cuir et consacre un peu d’huile de coude à polir le sol en marbre où sont tombées les fientes.

C’est un petit prix à payer pour la protection de volumes inestimables.

Une fresque au plafond représente une allégorie distribuant des livres, symbole de la connaissance, aux quatre coins du monde. (Benny Marty/Shutterstock)

La colonie de chauves-souris fait partie intégrante de la bibliothèque depuis presque l’époque où le roi Jean V l’a construite – peut-être depuis l’époque où son portrait, accroché en face de la porte d’entrée en teck, était encore frais. Peut-être les fresques étaient-elles encore fraîches lorsque les chauves-souris ont volé sous elles, ces scènes représentant des allégories dans des teintes vives.

Au plafond, une figure féminine centrale tient un livre, symbole du savoir transmis aux quatre coins du monde : Europe, Amérique, Asie et Afrique.

Après avoir admiré les étagères dorées sur deux étages et les arcs ornés d’écussons, après avoir examiné les six tables de bois gaufré et les vérandas aux riches sculptures et dorées à l’or, sans oublier l’escalier secret caché dans une fausse arche de bois peinte comme du marbre, une porte secrète connue du seul personnel et qui mène au balcon, interdit aux visiteurs, nous pouvons descendre l’escalier.

La bibliothèque Joanina est considérée comme l’une des plus belles bibliothèques du monde. (Benny Marty/Shutterstock)
Vue extérieure de la Bibliothèque Joanina, montrant les niveaux inférieurs. (Rui vale sousa/Shutterstock)

L’étage du milieu est plus austère, taillé dans une maçonnerie de pierre simple. Cela peut paraître étrange, mais il y a longtemps, des gardes et des gardiens étaient postés ici. Jusqu’en 1834, l’université était un organisme autonome, ce qui lui permettait d’avoir sa propre prison au Palais royal. Difficile d’accès il y a quelques années, elle est aujourd’hui ouverte pour exposer des manuscrits et sert également de lieu de conservation.

Une prison médiévale se trouve à la base même de la structure. Des cellules étroites et un escalier en colimaçon constituent une prison primitive, la plus ancienne conservée au Portugal. Au rez-de-chaussée, elle sert aujourd’hui de dépôt de livres où les collections étaient apportées pour être cataloguées avant d’être mises en rayon à l’étage principal.

L’étage intermédiaire est doté de maçonnerie brute. (trabantos/Shutterstock)
On dit que l’étage intermédiaire de la Bibliothèque Joanina accueillait des gardiens lorsque la bibliothèque abritait la prison de l’université. (agsaz/Shutterstock)
Bibliothèque Joanina. (trabantos/Shutterstock)

Chaque année, un demi-million de personnes viennent à la Biblioteca Joanina, ce qui explique pourquoi la conservation est si méticuleuse. Le trafic entraîne des amas de poussière et modifie l’environnement. Seules 60 personnes sont désormais autorisées à entrer toutes les vingt minutes pour que la conservation reste sous contrôle. Elles ne peuvent pas rester plus de 10 minutes dans la salle principale.

Pendant ce temps, la petite armée de créatures qui vit derrière les étagères continue de mener une guerre contre les nuisibles. La colonie de chauves-souris est restée essentielle au fil des ans et continue à apporter sa contribution.

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