BIEN-êTRE

Améliorer la résilience peut nous faire rebondir devant les épreuves traumatisantes qui déconnecte le cerveau

février 25, 2023 19:41, Last Updated: mai 31, 2023 8:35
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Pourquoi certaines personnes gèrent avec sérénité la pression, les crises et les coups du sort, tandis que d’autres connaissent un stress important ?

Cela s’appelle la résilience et nous en sommes tous dotés, à des degrés variables. Mais la capacité de résilience de chacun reste inconnue tant qu’on n’est pas confronté à des événements stressants, des traumas.

Il existe de nombreuses façons de définir la résilience, mais pour faire simple, la résilience est le processus d’adaptation face à l’adversité, aux traumatismes, à la tragédie, aux menaces, à toutes les sources importantes de stress telles que les problèmes familiaux ou relationnels, les problèmes de santé graves ou les problèmes d’ordre professionnel et financiers. Cela signifie « rebondir » après des expériences de vie difficiles.

Pour les générations précédentes, ces « moments de stress traumatiques » étaient tout simplement appelés « la vie », et beaucoup d’entre nous ont appris à les « encaisser » et à y faire face. Mais les psychologues, les psychiatres et d’autres spécialistes commencent à comprendre que ces circonstances traumatiques et stressantes que nous vivons tous modifient en réalité le cerveau et peuvent changer notre façon de percevoir le monde et d’évaluer le danger.

Parfois, nous passons d’un état d’esprit « d’adaptation » à son contraire.

Plus globalement, au niveau de la société dans son ensemble, il semble que nous soyons passés d’une culture de battants à une culture qui cherche à éviter la souffrance et l’inconfort à tout prix. On peut d’ailleurs constater l’incapacité croissante de la société à gérer ses propres contradictions et le recours toujours plus important aux antidépresseurs.

Grâce à la compréhension nouvelle et évolutive du traumatisme par des pionniers tels que Bessel van der Kolk, qui a écrit le livre précurseur « Le corps n’oublie rien », Peter Levine, auteur de « Réveiller le tigre : guérir le traumatisme », et Gabor Maté, qui étudie et traite les traumatismes depuis des décennies, nous sommes plus à même de comprendre comment ces traumas nous affectent et, surtout, comment en guérir et rebondir.

Quels types d’événements peut‑on définir comme des traumatismes ? C’est une question délicate, car un événement peut être traumatisant pour une personne et non pour une autre. Ce n’est pas l’événement, mais la façon dont nous y réagissons qui le définit comme traumatisant. Il existe cependant des situations courantes qui sont considérées comme traumatisantes pour la plupart des gens. Une des définitions du traumatisme est le fait de se sentir dépassé par des événements qui échappent à notre contrôle.

Voici une liste de quelques causes courantes de traumatisme :

– une catastrophe naturelle, comme un tremblement de terre, une inondation, un incendie ou une tornade ;

– un accident grave, comme un accident de voiture ;

– un diagnostic de maladie ;

– une agression violente de la part d’un étranger (agression, vol) ;

– une agression violente de la part d’un parent ou d’une connaissance ;

– le décès soudain et inattendu d’un être cher ;

– les combats ou la guerre ;

– un abus physique ou sexuel pendant l’enfance ;

– la négligence ou abandon par les parents ou les soignants ;

– une agression sexuelle ;

– le décès d’un enfant, d’un frère ou d’une sœur, d’un ami ou d’un parent ;

– être témoin d’une agression ou d’un meurtre ;

– l’emprisonnement ;

– un divorce ou une rupture ;

– être témoin de mauvais traitements ;

– l’extrême pauvreté ;

– des procédures médicales effrayantes ou douloureuses ;

– être séparé d’un parent ou d’un être cher.

Ces événements et leurs conséquences sont complexes, car chacun réagit différemment en fonction de circonstances très diverses. Certaines personnes sont plus à même de faire face à la situation car elles ont naturellement plus de résilience que d’autres. La résilience peut toutefois être cultivée.

Le traumatisme et le cerveau

Trois parties du cerveau sont affectées lorsque nous vivons des événements traumatiques – traumatiques parce qu’ils nous dépassent et échappent à notre contrôle. Nous vivons tous beaucoup de choses désagréables dans notre vie quotidienne. La plupart du temps, ces événements se produisent puis prennent fin et nous n’y pensons plus. En revanche, selon Bessel van der Kolk, un événement traumatique est un événement que le corps revit de manière répétée.

L’amygdale

L’amygdale, enfouie au plus profond du cerveau, fait partie du système limbique. Elle nous aide à percevoir et à contrôler nos émotions. Elle est responsable de notre réaction de peur. Lorsqu’une menace est détectée, l’amygdale donne l’alerte et déclenche une réaction de combat, de fuite ou de paralysie. Un événement traumatisant peut entraîner une surréaction de l’amygdale longtemps après la fin de l’événement. Dans ce cas, la personne est trop vigilante, elle est constamment stressée et susceptible de voir des menaces là où il n’y en a pas. Ce phénomène est également appelé hypervigilance.

Une amygdale hyperactive peut rendre une personne plus vulnérable à divers symptômes tels que les troubles anxieux, l’inquiétude excessive, l’irritabilité, les difficultés de concentration et les maux d’estomac, pour n’en citer que quelques‑uns. Un des principaux symptômes du trouble anxieux est la crise de panique, qui peut se manifester par de l’essoufflement, l’accélération du rythme cardiaque, l’oppression thoracique ou des vertiges.

Les personnes qui ont vécu un événement traumatique et dont l’amygdale est hyperactive adoptent parfois des « comportements d’évitement », c’est‑à‑dire qu’elles évitent les personnes, les lieux ou les expériences susceptibles de déclencher le souvenir du traumatisme. Par exemple, les anciens combattants peuvent arrêter de regarder les informations ou de faire défiler les médias sociaux parce qu’ils veulent éviter les histoires de guerre ou d’autres conflits militaires.

L’hippocampe

Lorsqu’on est confronté à une situation dangereuse, l’hippocampe signale la libération de cortisol, ce qui permet de se concentrer sur la survie sans ressentir de douleur si on est blessé. Il détourne également l’énergie du corps vers les fonctions dont il a besoin pour survivre, vers la réponse combat‑fuite et coupe toutes les fonctions non essentielles à ce moment‑là, comme la digestion, afin que toutes les ressources physiologiques puissent être optimisées pour une action immédiate pour survivre.

Lorsque ces systèmes fonctionnent comme ils le devraient, ils reviennent à la normale une fois la menace passée. Cependant, en cas de traumatisme, le cerveau continue de percevoir le danger, et la libération continue de cortisol peut avoir des effets néfastes sur la santé. Des niveaux élevés de cortisol affaiblissent le système immunitaire et rendent une personne plus vulnérable à diverses maladies et infections. Des études ont également montré que les victimes de traumatismes infantiles ont un risque beaucoup plus élevé de développer des problèmes de santé chroniques à l’âge adulte.

Le cortex préfrontal

Le cortex préfrontal est la partie du cerveau responsable de la pensée et du raisonnement poussé. Il nous aide à penser logiquement, à analyser des informations et à résoudre des problèmes. Le cortex préfrontal est également nécessaire à la concentration et à l’attention.

Lorsque cette partie du cerveau est modifiée par un traumatisme, nous avons tendance à prendre des décisions plus risquées, à avoir une plus forte envie de faire de mauvais choix et à avoir moins de capacité à y résister. Une diminution de nos fonctions exécutives (FE) fait qu’il nous est plus difficile d’envisager les conséquences à long terme de nos actions. Les dommages causés au cortex préfrontal peuvent également entraîner des problèmes d’apprentissage, des difficultés à comprendre de nouveaux concepts et une plus grande difficulté à se concentrer.

Guérir d’un traumatisme, renforcer la résilience

Même si les événements traumatiques et les modifications du cerveau qui en résultent peuvent sembler décourageants, il y a une bonne nouvelle, qui peut se résumer en un mot : la neuroplasticité. La neuroplasticité se définit comme les changements physiologiques et la réorganisation constante du cerveau en réponse aux interactions avec notre environnement. Cela signifie que notre cerveau peut guérir des traumatismes que nous avons subis et que nous pouvons continuer à mener une vie heureuse et pleine de sens.

La guérison d’un traumatisme est un processus hautement individualisé, et de nombreux facteurs influent sur la rapidité de récupération d’une personne après un ou plusieurs événements traumatiques. Il est prouvé qu’un soutien affectif solide et un état d’esprit positif sont des facteurs qui aident les gens à se rétablir après un traumatisme.

Voici d’autres éléments qui peuvent aider à guérir après avoir vécu un traumatisme :

– développer des relations stables avec les autres ;

– cultiver une vision spirituelle et s’engager auprès d’une communauté religieuse ;

– rester positif et cultiver l’humour ;

– être capable de s’exprimer librement ;

– être flexible face aux nouvelles situations ;

– se fixer des limites et les respecter ;

– développer sa confiance en soi, être à l’écoute de ses besoins, être capable de les faire comprendre aux autres ;

– identifier ses talents et ses forces personnelles ;

– avoir un exutoire créatif ou un passe‑temps ;

– demander de l’aide quand c’est nécessaire ;

– travailler activement à résoudre ses problèmes existentiels ;

– apprendre à prendre du temps pour soi, à se détendre et à lâcher prise

– offrir un soutien émotionnel aux personnes dont on est proche.

Les personnes qui ont subi des événements traumatiques ont souvent du mal à ressentir de la joie et du plaisir, à établir des liens avec les autres et à apprendre de nouvelles choses, et elles ont tendance à voir diminuer leur capacité à gérer le stress et les émotions en raison des modifications cérébrales évoquées ci‑dessus. Il existe de nombreuses stratégies pour guérir d’un traumatisme, mais cela demande du temps et de la patience. Ci‑dessous quelques stratégies à court, moyen et long terme.

Stratégies à court terme :

– effectuer des exercices de respiration, comme la respiration profonde dans le ventre ou la technique de la respiration carrée ;

– tenir un journal de gratitude ou se concentrer sur les aspects positifs de la vie ;

– faire des promenades dans la nature, surtout lorsqu’on se sent stressé ou débordé.

Stratégies à moyen terme

– faire régulièrement de l’exercice ;

– adopter un régime alimentaire sain ;

– rechercher de nouvelles relations sociales ;

– trouver un passe‑temps.

Stratégies à long terme :

– approfondir sa foi ;

– méditer pour renforcer son équanimité ;

– travailler activement à améliorer sa vie, lentement, à son propre rythme ;

– participer à la vie du quartier, par exemple en se portant volontaire pour travailler avec les personnes âgées ou dans un refuge pour animaux.

Réflexions finales

Ce que les spécialistes comme van der Kolk ont été surpris de découvrir lorsqu’ils ont commencé à approfondir la question des traumatismes, c’est qu’ils étaient très courants. Comme nous serons tous confrontés à des événements stressants, des situations difficiles et des épreuves tout au long de notre vie, le fait de connaître les moyens de renforcer la résilience ne peut que nous aider lorsque ces événements surviennent. Les difficultés de la vie sont aussi des occasions de croissance et de changement – de la douleur, nous pouvons apprendre la sagesse, de la peur, le courage, et de la souffrance, la force, qui nous rend plus forts en tant qu’individus et en tant que communauté.

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