À deux jours de l’ouverture des JO de Paris, le CIO vient d’attribuer les JO d’hiver de 2030 aux Alpes françaises, une réussite pour la délégation française qui obtient une deuxième édition olympique en six ans.
Des Jeux d’hiver en France… à une toute petite condition : éponger les dettes en cas de dépassement du budget. Ce qui implique textuellement pour le CIO la désignation d’un Premier ministre en ligne avec le dossier d’ici le 1er octobre et le vote d’une « loi olympique » spéciale d’ici le mois de mars 2025, impliquant la construction d’une majorité au Parlement.
« Ce ne sont pas les JO d’un gouvernement », a affirmé la ministre des Sports et des JO Amélie Oudéa-Castéra, présente lors de l’annonce des résultats aux côtés de Martin Fourcade, quintuple champion olympique de biathlon, pressenti pour jouer un rôle important dans le futur comité d’organisation. On y voit pourtant une orientation donnée par les JO d’hiver dans les prochains mois, permettant à la France de sortir de l’impasse politique.
La France devra éponger les dettes
Le CIO n’a, pour le moment, pas entièrement donné son feu vert. Le président du CIO, Thomas Bach, a prévenu depuis plusieurs semaines qu’il lui fallait la garantie financière de l’État, c’est-à-dire l’engagement que celui-ci épongera les dettes en cas de problèmes. En d’autres termes, en cas de dérapage budgétaire des JO d’hiver de 2030, la France s’engage à le prendre en charge dans ses dépenses publiques – comme c’est le cas avec les Jeux de Paris 2024.
« La commission exécutive du CIO a décidé de maintenir le caractère conditionnel qui se fonde sur les garanties des Jeux qu’il reste à fournir », a expliqué le 24 juillet le vice-président du CIO John Coates, répétant que le « CIO ne signera pas le contrat de la ville hôte jusqu’à ce que les garanties de livraison soient reçues. »
Une promesse faite par Emmanuel Macron au nom « de la nation française », malgré un niveau d’endettement jugé alarmant par la Commission européenne et l’agence de notation S&P et une période d’instabilité politique sans précédent, sans Premier ministre ni majorité claire au Parlement. Le Président espère s’appuyer sur les JO de Paris et les JO d’hiver pour donner un nouvel élan au pays.
Interrogé sur le montant du budget, le président du comité olympique français (CNOSF), David Lappartient, a évoqué 1,9 milliard d’euros pour l’organisation, et entre 600 millions d’euros et 1,2 milliard d’euros pour les infrastructures. Un budget qui, comme pour chaque Jeux, sera finalement largement dépassé. Le président du CNOSF a aussi expliqué que « beaucoup de sponsors avaient dit qu’ils souhaitaient continuer l’aventure de Paris-2024 », après avoir vanté que la France avait elle de « la neige » et de « la vraie neige ».
Des JO conditionnés au choix d’un Premier ministre
Le futur Premier ministre, qui n’est pas encore connu, devra fournir au CIO la garantie de l’État « avant le 1er octobre », a demandé Thomas Bach. Cette garantie devra être ratifiée par le Parlement « au plus tard le 1er mars ». Elle pourrait prendre la forme d’un article de loi dans un projet de loi de Finances.
« Je confirme mon engagement et mon engagement total et l’engagement total de la nation française », a dit en anglais Emmanuel Macron, ajoutant qu’il allait « demander au prochain Premier ministre non seulement d’inclure cette garantie mais aussi de promulguer une loi olympique », a déclaré le Président de la République lors de la 142e session du CIO réunie au Palais des Congrès de Paris.
« C’est sûr que les majorités vont être difficilement trouvables mais on est sur un sujet sur lesquels on peut en avoir », a assuré David Lappartient, en marge d’une conférence de presse.
Cela peut déjà mettre de côté la désignation de candidats au poste de Premier ministre défendant une écologie radicale et voyant dans les JO d’hiver un désastre écologique. Sandrine Rousseau des Écologistes a, par exemple, à l’annonce de la nomination des Alpes françaises, commenté sur X : « Il n’y aura plus de neige en 2030 ». Cette nouvelle « contrainte » pourrait davantage éloigner une partie de la gauche de la désignation du Premier ministre, afin de pouvoir faire voter cette nouvelle « loi olympique » validant l’obtention des Jeux d’hiver.
Laurent Wauquiez et Renaud Muselier, grands gagnants
Les deux présidents de régions Rhône-Alpes-Auvergne et Provence-Alpes-Côte d’Azur, Laurent Wauquiez et Renaud Muselier sortent comme les grands gagnants de cette nomination et ont promis, dans un dossier de candidature solide, des Jeux durables.
Laurent Wauquiez, qui vient d’être élu député, a promis avec ce projet Alpes 2030 de « redessiner les montagnes de demain » et promis aussi qu’il n’y aura « pas d’éléphant blanc », c’est-à-dire de constructions onéreuses qui restent ensuite à l’abandon. Emmanuel Macron avait loué, lors de son interview sur France Télévisions la veille, les propositions du pacte législatif présenté par le responsable du groupe de la Droite Républicaine à l’Assemblée : « Ça va dans la bonne direction à mes yeux », avait dit le Président. De là, à voir dans le succès de cette nomination, un rapprochement pour une future majorité à l’Assemblée entre les deux hommes, n’est pas loin.
« C’est un grand bonheur » réagissait Renaud Muselier à la décision du CIO. « Je savais qu’on avait la capacité et l’espace pour décrocher ces Jeux. Ce que je n’avais pas prévu, c’est que ça serait aussi tôt » a-t-il expliqué à nos confrères de Var Matin. Le président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur a promis des « Jeux exemplaires ». « N’en déplaise aux ronchons, la pratique des sports d’hiver autrement ne veut pas dire ne plus pratiquer. »
Emmanuel Macron a ajouté en défendant le projet, que la France pourrait s’appuyer sur l’ « actif » des JO 2024. « Nous sommes très conscients que nous sommes à un tournant de l’industrie de la montagne », a-t-il ajouté.
Le bon dossier des Alpes françaises
Les Alpes françaises sont parmi les plus belles montagnes du monde, ce qui explique un ensemble d’infrastructures déjà présentes pour accueillir un grand nombre de touristes. Les Jeux olympiques d’hiver 2030 seraient prévus autour de plusieurs pôles dans quatre départements.
La Savoie, forte de son héritage des JO d’Albertville en 1992, rafle les compétitions-reines de ski alpin dans ses stations huppées de Courchevel et Méribel – qui ont accueilli ces dernières années plusieurs épreuves de Coupe du monde. S’ajoutent le saut à ski pour Méribel et l’épreuve de ski de fond du combiné nordique pour Courchevel. La station de la Plagne obtient les sports de glisse (bobsleigh, skeleton, luge), sur une structure héritée des Jeux de 1992 qui doit être modernisée. Enfin, le village de Bozel accueillera un village olympique relié à Courchevel par téléphérique. Les dirigeants savoyards, comme l’ancien champion de ski alpin Jean-Claude Killy, s’efforcent aussi de convaincre le CIO d’inclure dans la liste la station « incontournable » de Val-d’Isère.
Le biathlon est déjà prévu dans la station du Grand-Bornand avec ses pistes homologuées habituées aux Championnats du monde et la Coupe du monde de cette discipline. Située à 1300 mètres d’altitude, la station défraie toutefois régulièrement la chronique en raison de son recours à la neige artificielle. Le ski de fond se déroulera à La Clusaz sur un site à 1400 mètres d’altitude, avec un accès routier jugé par le CIO « limité mais suffisant pour assurer un service de navette depuis le village ».
Nice doit aussi accueillir la cérémonie de clôture, le lieu pour la cérémonie d’ouverture restant à déterminer entre Albertville, Chamonix et Grenoble. Pour les compétitions, le stade Allianz Rivera, antre du football, serait « transformé en temple du hockey sur glace, avec deux patinoires et plus de 30.000 places », selon le président délégué de la région Christian Estrosi.
Bien sûr le chemin est encore long. « Les plans relatifs au réseau routier olympique reliant les quatre zones doivent être affinés » et les capacités en termes de spectateurs « examinées attentivement pour être réalistes compte tenu des capacités de transport », notait le CIO dans son rapport de juin. « Les infrastructures de transport existantes et prévues peuvent répondre aux besoins des Jeux olympiques, avec quelques réserves toutefois dans les zones de montagne où les routes sont étroites », selon ce document.
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