La CSU, alliée conservateur clé d’Angela Merkel, a essuyé dimanche un camouflet historique lors de régionales en Bavière, fragilisant un peu plus le gouvernement de la chancelière allemande. L’Union chrétienne-sociale, « parti frère » de la CDU de Mme Merkel, qui domine cette région depuis les années 1950, arrive certes en tête avec 35,5%, mais ce score a tout d’une débâcle politique, selon les sondages réalisés à la sortie des bureaux de vote par les chaînes publiques ARD et ZDF.
Elle perd quelque 12 points par rapport à 2013, sa majorité absolue, et va être obligée de chercher une alliance inconfortable avec une ou plusieurs autres formations. Autre mauvaise nouvelle pour Mme Merkel, l’autre membre de sa coalition gouvernementale, les sociaux-démocrates du SPD, subissent une gifle avec 9-10% des voix. Les gagnants du scrutin sont les Verts, 2e avec 18-19%, et l’Alternative pour l’Allemagne (AfD), le parti d’extrême droite anti-Merkel et anti-migrant qui prend 11% des voix, au coude-à-coude avec les Freie Wähler, des conservateurs indépendants (11,5%). Les Libéraux du FDP (5%) ferment la marche.
Rien pour rassurer la chancelière allemande donc, d’autant que son propre parti, la CDU, doit faire face à un scrutin tout aussi ardu le 28 octobre en Hesse, Land que les conservateurs dirigent en coalition avec les écologistes. Ces deux scrutins « affecteront la politique nationale et en conséquence la réputation de la chancelière », a déjà prévenu vendredi le président de la chambre des députés et vétéran respecté de la CDU, Wolfgang Schäuble. La remarque n’est pas anodine: Angela Merkel doit affronter en décembre un vote de militants pour être reconduite à la tête de son parti.
Au pouvoir dans la première économie européenne depuis 13 ans, la chancelière allemande a connu une année très difficile, conséquence politique de sa décision de 2015 d’ouvrir l’Allemagne à plus d’un million de demandeurs d’asile. Même si elle a considérablement resserré l’accueil des migrants, Angela Merkel a été handicapée par l’essor de l’extrême droite aux législatives de septembre 2017. Elle a bataillé six mois durant pour former une coalition gouvernementale, finalement avec des sociaux-démocrates très récalcitrants.
Puis durant l’été 2018, c’est la CSU bavaroise qui s’est rebellée, conduite par son chef, le ministre de l’Intérieur Horst Seehofer, qui a risqué à deux reprises de faire tomber le gouvernement en poussant des thèmes chers à l’AfD afin de regagner le terrain perdu. Dans l’opinion, le désamour des Allemands pour ce gouvernement n’a lui cessé de croître. Le baromètre national publié dimanche par le quotidien Bild crédite le couple CDU/CSU d’un piètre 26%, quand le SPD végète à 17%, au même niveau que des Verts en pleine confiance et juste devant l’extrême droite (15%).
Illustrant cette recomposition du paysage politique, la stratégie droitière déployée ces derniers mois par la CSU pour regagner les voix conquises par l’AfD n’a pas eu l’effet escompté. Selon les enquêtes d’opinion, les citoyens tentés par l’extrême droite n’ont pas été convaincus de revenir dans le giron des conservateurs, et d’autres, plus modérés, se sont tournés vers les Verts. Autre problème pour la chancelière : les intentions du SPD, alors que des voix réclament bruyamment une sortie du gouvernement et une cure de jouvence dans l’opposition.
Face au séisme bavarois, de puissantes personnalités risquent aussi la suite de leur carrière, à commencer par Horst Seehofer, ministre de l’Intérieur et poil à gratter de Mme Merkel. Le chef du gouvernement bavarois, Markus Söder, lui aussi en danger, a rejeté, avant même le scrutin, la responsabilité d’une débâcle sur « Berlin ». Comprendre, M. Seehofer et la chancelière.
D.C avec AFP
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