ENTRETIEN – À la suite des massacres perpétrés le 7 octobre par le Hamas, Israël mène une campagne militaire dans la bande de Gaza, une guerre qui fait rage : sur le terrain, mais aussi dans les médias, en France comme à l’étranger. « Génocide palestinien », « crimes de guerre », « dirigeants belliqueux »… Depuis neuf mois, les accusations contre l’État juif pleuvent, sans relâche, La France insoumise menant le bal assidûment. Dernière polémique en date avec le député Thomas Portes, qui, à l’approche des Jeux olympiques, a déclaré samedi que « la délégation israélienne n’était pas la bienvenue à Paris ». Epoch Times s’est donc rendu à la rencontre de Hen Feder, porte-parole de l’ambassade d’Israël en France, en vue de recueillir ses réponses concernant les attaques dont son pays est la cible : « Certains en France ont une vision de la situation sur le terrain complètement déconnectée de la réalité et influencée par la propagande du Hamas », soutient-il. Il développe.
Epoch Times : Avant toute chose, quel est votre parcours et pourquoi êtes-vous devenu porte-parole d’Israël ?
Hen Feder : J’ai suivi des études de droit à l’université hébraïque de Jérusalem avant de devenir avocat à New York, puis diplomate, désireux de servir et représenter mon pays. C’est pourquoi j’ai rejoint, il y a trois ans, le ministère des Affaires étrangères israélien. Dans ce domaine, les affectations sont imposées. Pour ma première mission, j’ai eu la chance d’être envoyé en France à l’ambassade d’Israël. C’est une immense fierté de me trouver ici. En ces temps marqués par des tensions, les relations entre nos deux pays sont très importantes.
Que vous inspirent les sorties de La France insoumise contre Israël ?
En tant qu’ambassade, nous nous abstenons de commenter la politique intérieure française, car nous cherchons des moyens de collaborer avec tous les représentants élus en France.
Cependant, il est préoccupant et désolant de voir, en 2024, la haine contre les Juifs et Israël exploitée à des fins électorales, et des citoyens, mobilisés par cette détestation de l’État juif, refuser de reconnaître le droit d’Israël à exister. Historiquement, l’antisémitisme a souvent émané de l’extrême droite à travers le monde : les tragédies du siècle dernier en Europe sont là pour le rappeler. Mais depuis le 7 octobre, c’est l’extrême gauche qui emploie une rhétorique similaire, par clientélisme politique, relèvent de nombreux analystes politiques français. Une évolution alarmante.
L’extrême gauche française affirme qu’Israël commet un « génocide » contre les Palestiniens. Que répondez-vous à cette accusation ?
Accuser Israël de commettre un génocide, terme qui renvoie à un crime réellement commis contre les juifs, dont ma famille a été victime, est révoltant. C’est aussi dénaturer ce mot, lourd de symboles, alors même que depuis le début de la guerre, l’État d’Israël a pourtant été très clair : notre combat n’est pas contre les Palestiniens, mais contre le Hamas et ses soutiens. À cette fin, nous cherchons à éviter autant que possible toute perte civile. A contrario, les leaders du Hamas estiment qu’il faut verser le plus de sang possible dans leur combat pour la « cause palestinienne ». Israël est donc engagé dans une guerre contre le terrorisme.
Jean-Claude Samouiller, président d’Amnesty International France, dénonçait en mai sur France Info, « une accumulation de crimes de guerre commis sur la bande de Gaza ». À la fin du même mois, Israël avait de nouveau été accusé d’avoir commis un « crime de guerre », suite à des frappes à Rafah qui ont fait, selon le Hamas, au moins 45 morts. Que répond Israël sur ces accusations-là ?
Certains en France ont une vision de la situation sur le terrain complètement déconnectée de la réalité et influencée par la propagande du Hamas, laquelle présente une image déformée des faits.
Cette tragédie à Rafah, par exemple, relève de la responsabilité du Hamas. L’intention de Tsahal était d’éliminer deux hauts représentants du groupe terroriste. Une opération qui s’est révélée un succès. Cependant, selon l’enquête menée par l’armée israélienne, l’incendie qui s’est déclenché à cette occasion l’a été à cause des munitions du Hamas stockées dans la zone de la frappe, à proximité du camp de réfugiés. L’indignation mondiale devrait donc se concentrer sur le fait que les terroristes entreposent leurs armes près des tentes de réfugiés, plutôt que de blâmer Israël. Le Hamas exploite le sang de son propre peuple comme une arme contre Israël.
Quid de cette accusation selon laquelle Israël commet des frappes massives résultant dans la mort de civils plutôt que des attaques ciblées ?
Les opérations à Gaza au cours des derniers mois ont été menées avec une grande précision dans l’objectif, justement, de limiter les pertes civiles, conformément aux directives de Benjamin Netanyahu. Par exemple, l’opération à Rafah venant d’être évoquée était une frappe très ciblée conduite par notre armée de l’air. Comme le Premier ministre l’a déclaré, un seul mort civil, c’est une victime de trop.
Au cours des neufs derniers mois, nous avons éliminé entre 15.000 et 20.000 terroristes. Même les plus hautes estimations fournies par le Hamas, qui avance environ 39.000 morts sans distinction entre terroristes et civils pour faire pression sur la communauté internationale, montrent que notre approche évite au maximum les pertes civiles.
Bien entendu, en temps de guerre, des victimes civiles, aussi tragiques soient-elles, surviennent inévitablement. Toutefois, comparées aux guerres précédentes menées à travers l’histoire, celles-ci sont proportionnellement faibles par rapport au nombre de terroristes éliminés et au contexte urbain. Pendant ce temps, je le rappelle, le Hamas cherche de son côté à maximiser le nombre de morts. C’est une situation dramatique, mais c’est bel et bien la réalité à laquelle nous sommes confrontés.
Quels sont les objectifs poursuivis par Israël depuis son offensive déclenchée à la suite des massacres du 7 octobre ?
La libération des otages et la destruction des capacités militaires du Hamas. Progressivement, nous atteignons ces deux buts. Nous œuvrons nuit et jour à la libération des otages, tandis que le Hamas voit progressivement sa capacité à combattre Israël s’affaiblir.
L’occasion de rappeler une réalité : si le Hamas se refuse à tout accord, c’est parce qu’il ne peut justifier son existence et survivre qu’en maintenant des otages en captivité et en perpétrant des attaques contre Israël. De son côté, Israël ne peut tolérer à ses frontières la présence d’un groupe terroriste qui a publiquement exprimé son intention, après le 7 octobre, de commettre un 8 octobre, puis un 9 octobre… en d’autres termes, de tuer autant d’Israéliens que possible.
Lorsque tous les otages auront été libérés et que la menace représentée par le Hamas à nos frontières aura été éliminée, alors la guerre prendra fin.
Même en cas de libération des otages par le Hamas, Israël continuerait donc cette guerre jusqu’à sa destruction ?
Oui, car après le 7 octobre, nous ne pouvons plus accepter une telle menace à nos frontières. Aucun pays au monde n’accepterait la présence de milliers de terroristes armés prêts à recommencer leurs massacres indéfiniment.
Le procureur général de la Cour pénale internationale (CPI) a demandé des mandats d’arrêt contre, d’une part, le Premier ministre israélien et son ministre de la Défense Yoav Gallant et, d’autre part, trois hauts dirigeants du Hamas. Comment jugez-vous cette décision ?
Notons d’abord que ces mandats ont été émis par le procureur général de la CPI et non par la CPI elle-même, qui ne les a pas encore acceptés.
Nous jugeons cette décision du procureur très regrettable. Établir une équivalence morale entre le gouvernement israélien, dirigés par des politiques élus démocratiquement et menant une guerre contre le terrorisme, et les terroristes du Hamas responsables du 7 octobre est absurde et inadmissible.
De plus, si la CPI émettait des mandats d’arrêts, cela irait à l’encontre de ses propres règles, en particulier le principe de « complémentarité » : cette cour est censée intervenir uniquement dans les pays où le système judiciaire est défaillant, ce qui n’est pas le cas d’Israël, doté d’un État de droit robuste. Il est donc évident que cette décision du procureur est motivée politiquement.
C’est pourquoi nous espérons que les juges de la CPI respecteront le principe fondamental de cette juridiction pénale internationale, rendant inutile toute poursuite. Par le passé, Israël a déjà jugé et emprisonné un président (Moshe Katsav) et un Premier ministre (Ehud Olmert). Si des erreurs ou des crimes sont commis par des élus israéliens, notre système judiciaire, civil ou militaire, est parfaitement apte à les traiter.
Dans son interview sur LCI le 30 mai, Benyamin Netanyahou a affirmé qu’Israël, par sa guerre menée contre le Hamas, combattait également les ennemis de la France. Un discours également tenu par Nikki Haley, ancienne candidate républicaine à l’élection présidentielle des États-Unis et ex-ambassadrice américaine à l’ONU, à l’occasion de son déplacement en Israël à la fin du mois de mai : « Israël combat les ennemis de l’Amérique », a-t-elle soutenu. En quoi est-ce le cas ?
Il existe un axe qui commence avec l’Iran, puis ses proxys en Irak, en Syrie, au Liban, au Yémen et à Gaza avec le Hamas. Nous parlons des Frères musulmans qui œuvrent depuis des années à répandre leur doctrine islamiste à travers le Moyen-Orient et à multiplier les attaques terroristes en Occident, y compris en France et aux États-Unis.
Le massacre du 7 octobre, qui a été perçu comme un succès par le Hamas et les partisans de la destruction de l’État d’Israël, a favorisé une réémergence de la haine contre Israël et les juifs, ainsi qu’un regain de vigueur chez ceux qui cherchent à abattre le monde occidental. C’est cette connexion qui était évoquée. De son côté, Israël ne peut accepter que le Hamas triomphe, car cela signifierait la réalisation de leur objectif revendiqué dans leur charte : la destruction de l’État juif. Toutefois, les ambitions des Frères musulmans vont bien au-delà de ce qui se passe en Israël.
Concrètement, comment l’ambassade d’Israël en France œuvre-t-elle à la libération des otages ?
En France, nous travaillons jour et nuit pour trouver des solutions politiques et diplomatiques en ce sens. Dans ce cadre, nous avons accueilli des dizaines de familles d’otages et facilité des rencontres avec des décideurs politiques. Il est important de souligner le soutien des élus français, qui les ont reçues, usant de leur influence pour aider à la libération des otages. Deux Français, Ohad Yahalomi et Ofer Kalderon, sont toujours retenus captifs par le Hamas, et 43 Français ont été tués par ce groupe terroriste depuis le 7 octobre, sans compter les soldats détenant aussi la nationalité française morts sur le terrain.
En tant que porte-parole de l’ambassade, je peux vous assurer que nous poursuivrons nos efforts sans relâche jusqu’à la libération complète des otages.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.
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