La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a annoncé le 29 janvier qu’elle voulait « relancer le moteur de l’innovation » de l’Union européenne (UE).
Elle a souligné que son projet, qui prévoit des allègements réglementaires pour les entreprises, ne signifiait pas un renoncement aux engagements environnementaux mis en place depuis 2019. « Je veux être très claire, l’Union européenne maintient le cap concernant les objectifs du Pacte Vert », a-t-elle affirmé.
Alors qu’elle alertait en novembre 2024 que « notre liberté et notre souveraineté dépendent plus que jamais de notre puissance économique », la présidente de la Commission dit vouloir assouplir la pression fiscale sur les entreprises, mettre en place un choc de simplification des normes et une baisse du coût de l’énergie.
Sa nouvelle feuille de route, intitulée « Boussole de compétitivité », donne les lignes directrices pour les cinq années à venir, en mettant toujours l’accent sur la neutralité carbone en 2050 et en donnant quelques concessions à l’industrie.
« Relancer le moteur de l’innovation dans l’UE »
La publication de cette « boussole de compétitivité » intervient sous la pression de Donald Trump annonçant de nouvelles taxes douanières pour l’Europe et des investissements géants dans l’intelligence artificielle.
En réponse, la présidente de la Commission européenne a déclaré qu’il était « temps de relancer le moteur de l’innovation » en Europe, assurant cependant qu’il n’était pas question de renoncer aux engagements environnementaux du Pacte vert, en particulier la neutralité climatique de l’UE.
« Les objectifs sont gravés dans le marbre : nous devons les atteindre d’ici à 2050. Il est absolument vital et nécessaire que nous y parvenions », a insisté la dirigeante allemande.
Les États-Unis et la Chine ont pourtant creusé un fossé technologique avec l’Europe, enlisée dans la stagnation et la réglementation. L’UE entend revenir dans la course en appliquant les recommandations formulées l’an dernier dans les rapports des anciens chefs de gouvernement italiens Enrico Letta et Mario Draghi. Ils recommandent notamment des investissements de 800 milliards d’euros par an, que les pays du Nord – dont la France – ne sont pas prêts à avancer aux pays du Sud, parce que trop dépensiers.
Des premières propositions concrètes sur l’allègement du fardeau administratif des entreprises, ainsi que des aides à l’industrie propre sont attendues le 26 février, alors que les nombreux textes environnementaux votés ces dernières années sont dans le viseur des entreprises qui multiplient les menaces de délocalisation.
Des dizaines de législations seront ainsi revues pour réduire la charge administrative, en particulier un texte emblématique sur le devoir de vigilance des entreprises envers leurs sous-traitants, un autre sur le reporting social et environnemental, ou encore le règlement Reach pour protéger la santé humaine contre les risques liés aux substances chimiques.
Une nouvelle catégorie de société de taille intermédiaire, entre PME et grand groupe, sera également créée pour alléger le fardeau réglementaire d’environ 30.000 entreprises. Un régime juridique européen spécifique, distinct des 27 juridictions nationales, serait créé pour permettre aux entreprises innovantes d’accéder à des « règles harmonisées » en matière de faillite, de loi du travail, de fiscalité.
Pour les branches les plus en difficulté comme la chimie, la sidérurgie et l’automobile, des plans sectoriels spécifiques sont prévus dès cette année.
Le maintien du Pacte vert mais avec le nucléaire
Le vice-président Stéphane Séjourné a promis de son côté « un choc de simplification sans toucher aux objectifs environnementaux ».
Depuis la guerre en Ukraine, l’Europe a perdu son approvisionnement en gaz russe bon marché et subit un coût de l’énergie très supérieur à ses concurrents internationaux. Pour sauver son industrie, l’UE doit réduire sa dépendance aux énergies fossiles.
« Nous devons développer davantage notre production d’énergie issue de sources renouvelables, et, dans certains pays, du nucléaire », avait déclaré à Davos Ursula von der Leyen, reconnaissant le rôle de l’atome longtemps tabou à Bruxelles.
La « boussole » de la Commission préconise de « faciliter les contrats de long terme d’achat d’électricité » et d’accélérer l’investissement dans le réseau de transport et de stockage d’énergie.
Stéphane Séjourné veut également accélérer la réouverture de mines de métaux rares en Europe et a déjà reçu 170 projets d’exploitation ou de recherches minières, des projets souvent contestés localement par des associations écologistes pour leur impact environnemental.
L’objectif est de réduire les dépendances européennes, notamment envers la Chine. « On va faciliter » l’attribution de permis, affirmait le commissaire chargé de la stratégie industrielle.
L’UE envisage des « flexibilités » sur les amendes CO2
Bruxelles envisage également des « flexibilités » pour épargner les constructeurs automobiles européens menacés par des amendes en cas de non-respect des objectifs d’émissions de CO2 en 2025, selon un document paru le 29 janvier.
« Nous identifierons des solutions immédiates pour préserver la capacité de l’industrie à investir, en examinant les flexibilités possibles afin de garantir que notre industrie reste compétitive, sans réduire l’ambition globale des objectifs pour 2025 », a affirmé la Commission européenne.
Ce passage a été ajouté sous la pression notamment du commissaire européen Stéphane Séjourné qui s’était dit défavorable à des mesures punitives contre les industriels.
« Sur les amendes liées aux quotas de véhicules propres vendus en 2025, je trouverais personnellement bizarre de pénaliser des acteurs que l’on essaye par ailleurs d’aider », alors que les concurrents « notamment chinois, n’ont pas les mêmes contraintes », a déclaré le commissaire à la Stratégie industrielle dans les colonnes du Figaro.
« C’est l’une des premières décisions que nous devons prendre rapidement pour le secteur », a insisté Stéphane Séjourné. La présidente Ursula von der Leyen a elle-même estimé « nécessaire » de faire preuve de « flexibilité et pragmatisme » dans l’application des règles.
De plus en plus de constructeurs européens s’opposent aux amendes qui pourraient les viser en cas de non-respect des objectifs de réduction des émissions de CO2 en 2025.
Une Europe toujours perfusée aux aides publiques
Ursula von der Leyen a aussi souligné que des aides publiques « ciblées et simplifiées » seront mises en place pour encourager la transition verte de l’industrie.
Pour une efficacité maximale, Stéphane Séjourné voudrait viser prioritairement « les 100 premiers sites émetteurs de CO2 » qui représentent plus de la moitié des émissions industrielles en Europe, pour les accompagner à diminuer leurs émissions de CO2, tout en maintenant leur compétitivité.
Des nouveaux labels seront créés pour développer la demande en produits bas carbone. Bruxelles entend par exemple développer l’acier « vert » dont la demande est aujourd’hui quasiment nulle en raison de coûts prohibitifs et alors que le marché mondial très concurrentiel ne suit pas les normes environnementales de l’UE.
Toujours plus d’intégration commune
Le projet de la « boussole compétitivité » prévoit également la création d’une plateforme pour l’achat en commun de matières premières stratégiques. Surtout, Ursula von der Leyen annonce l’introduction dès l’an prochain d’une « préférence européenne dans les marchés publics » pour certaines technologies critiques.
Elle a insisté sur le développement de partenariats internationaux multiples pour rendre les approvisionnements résilients y compris dans les technologies vertes (solaire, éolien), numériques (puces) ou les ingrédients essentiels pour les médicaments.
Le marché unique européen, qui a plus de trente ans, a aidé à faire naître des géants européens dans la chimie, l’aéronautique ou l’automobile. Mais, selon les rapports Draghi et Letta, il souffre d’angles morts : la finance, mais aussi les télécoms, l’énergie ou la défense restent morcelés par des réglementations nationales différentes.
« Supprimer les barrières restantes et élargir le marché unique contribuera à la compétitivité dans toutes ses dimensions », assure la Commission, laissant de côté la compétitivité propres aux États membres et voulant les additionner dans une réglementation commune.
Création de nouveaux produits d’épargne européens
L’unification des marchés de capitaux européens est une priorité pour la Commission européenne, espérant faire en 5 ans ce qui n’a pas été possible en 10.
En effet, pour unifier les marchés de capitaux européens, il faudrait mettre de côté les intérêts nationaux construits par des siècles de réglementations.
L’Europe dispose d’une monnaie unique mais l’inconvénient est que ses start-ups restent incapables d’effectuer des levées de fonds géantes comme leurs concurrentes aux États-Unis. Les pays européens gardent malgré tout des particularités économiques, que l’on soit dans les pays du Nord, du Sud ou les pays de l’Est.
Ursula von der Leyen a dit à Davos vouloir mettre en place une première mesure concrète pour cette unification : la création de « nouveaux produits d’épargne et d’investissement européens », qui seront inclus dans les portefeuilles d’épargne des épargnants dans les différents pays européens.
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