Sauvagement agressée par un trafiquant de drogue en rentrant chez elle, une femme de 43 ans a décidé de témoigner dans le cadre d’une vidéo publiée sur les réseaux sociaux afin de provoquer une réaction de la part des pouvoirs publics lillois.
Dans la soirée du samedi 18 juillet, Cécile, une mère de famille de 43 ans, a été sauvagement agressée près de chez elle, dans le quartier de Lille-Moulins, où elle réside depuis une dizaine d’années. Rouée de coups par un trafiquant de drogue qui n’a pas supporté qu’elle réagisse aux injures et aux provocations dont elle était la cible, la victime a eu la mâchoire brisée.
Bouleversée par la violente agression dont elle a été victime, la quadragénaire a décidé de partager sur les réseaux sociaux une courte vidéo tournée depuis sa chambre d’hôpital.
Une séquence intitulée Appel aux autorités lilloises dans laquelle elle lance un appel à Martine Aubry, le maire de Lille, et à la préfecture de police pour leur demander de réagir avec fermeté et de purger le quartier des Moulins des nombreux trafiquants de drogue qui y sévissent, faisant vivre un véritable enfer aux riverains.
« Je vis dans une zone de non-droit »
« Je me suis fait taper, agresser par un dealer parce que j’ai haussé le ton, à la suite de provocations, en fin de journée, quand je suis rentrée chez moi. J’ai la mâchoire cassée en deux endroits, je vais avoir des plaques dans la mâchoire et je ne pourrai pas chanter pendant très longtemps », explique la Lilloise, chanteuse et comédienne de métier.
« J’ai envie de lancer un appel aux pouvoirs publics. Martine Aubry, est-ce que vous pourriez prendre la mesure de la gravité de la situation dans le quartier de Lille-Moulins, depuis la Porte d’Arras jusqu’à la Porte de Valenciennes, en passant par la Porte de Douai ? – c’est là où j’habite. Madame le maire, êtes-vous capable de prendre des décisions importantes au regard de ces quartiers ? » ajoute-t-elle.
« Je voudrais aussi lancer un appel à la préfecture de police. Je vis dans une zone de non-droit : c’est-à-dire une zone dans laquelle une mafia gouverne, décide, agit, insulte, salit, provoque, harcèle au quotidien. Je demande à la préfecture de prendre des mesures pour que le quartier des Moulins soit sous surveillance perpétuelle. Venir une ou deux fois par jour avec la police amuse les dealers, ça leur donne des sujets de conversation. Je vous assure, je les entends. Et chacun y va de son exploit pour raconter son expérience avec ‘les bleus’ de la Bac ou de la B2R », poursuit Cécile.
La quadragénaire souhaite que les habitants des Moulins parviennent à faire front ensemble pour lutter contre le trafic de stupéfiants qui continue de gangréner leur quartier malgré les descentes effectuées par les forces de l’ordre.
« Je lance aussi un appel aux citoyens de ces quartiers, j’aimerais que nous arrivions à trouver un moyen de s’unir pour dire comme c’est difficile, insupportable, inadmissible. Personne n’a le droit d’agir sans respecter l’autre. »
« Voilà, mon été ne va pas ressembler à ce qui était prévu. Je suis en colère et triste. J’ai mal à la mâchoire. J’espère que les autorités compétentes vont réagir, que je sois la dernière victime de ce fléau », conclut Cécile avec émotion.
Âgé de 21 ans, l’agresseur présumé de la mère de famille aurait été appréhendé et placé en garde à vue le dimanche 19 juillet, rapportent les journalistes de France 3. Il devait être déféré au parquet ce mardi en vue d’un jugement en comparution immédiate.
« Ils sont nombreux, et font la terreur partout ! »
Interrogée par les journalistes de France Télévisions après la diffusion de sa vidéo, Cécile a accepté de revenir à nouveau sur l’agression dont elle a été victime.
« Mon agression n’est qu’un tout petit symptôme de ce problème de fond qui concerne la sécurité. Il faut que ce quartier soit repeuplé et les commerces soutenus pour le faire revivre… Inverser la tendance pour dresser un contre-pouvoir à sa paupérisation et à la terreur de ces mafias puissantes », a-t-elle affirmé.
Selon la quadragénaire, les trafiquants de drogue jouissent d’un véritable sentiment d’impunité et n’hésitent pas à dicter leur loi aux riverains des Moulins.
« Ils sont nombreux, et font la terreur partout ! Tout le monde a peur de s’interposer… Il est important de réhabiliter toutes les habitations vétustes, notamment rue de Mulhouse et rue de Trévise », souligne-t-elle.
Pour Cécile, la topographie particulière de certaines zones du quartier, notamment celle de la Filature, la vétusté, voire l’état de délabrement de plusieurs logements et l’inertie du bailleur social Lille Métropole Habitat (LMH) favoriseraient l’activité des dealers.
« J’ai le sentiment que LMH offre le gîte et le couvert aux trafiquants. Ils passent du bloc 5 au bloc 1. Il y a carrément des guichets de drogue et des dealers dans les entrées, les gens sont obligés de courber l’échine », observe ainsi la chanteuse et comédienne.
« Je souhaite que toutes les composantes de ces problèmes – police, citoyens, commerces, municipalité, propriétaires immobiliers et préfecture – se bougent rapidement, et conjointement », précise Cécile.
Martine Aubry apporte son soutien à la victime et demande davantage de moyens pour les policiers lillois
Le mardi 21 juillet, Martine Aubry a réagi au micro de France 3, expliquant avoir contacté la quadragénaire aussitôt après avoir eu connaissance de la vidéo qu’elle avait publiée sur les réseaux sociaux : « Dès que j’ai vu cette vidéo, j’ai appelé cette jeune femme. J’étais à la fois en colère et très attristée de ce qui lui arrive. »
« C’est malheureusement la situation de tous les habitants de la Filature et des rues avoisinantes. Ça fait à peu près un an et demi qu’on saisit le préfet, qui, d’ailleurs, avait fait intervenir la police il y a environ un an. Ils [les dealers, ndlr] étaient partis de la Filature pour aller à côté, rue de Trévise et rue Jean Jaurès, ce qui n’avait rien arrangé. Il se trouve que j’ai eu une réunion avec le préfet, à ma demande, de toute urgence, début juillet, pour lui demander de mettre fin à cette situation », a ajouté Mme Aubry.
Saluant l’« immense travail » des policiers lillois, Martine Aubry a indiqué qu’ils ne disposaient toutefois pas des moyens suffisants pour mettre un terme définitif aux trafics et qu’elle comptait alerter le ministre de l’Intérieur afin d’obtenir de nouvelles dotations.
« Ce n’est plus possible, c’est l’enfer pour les gens, comme ça l’était dans les quatre tours de Lille-Sud. La direction de la sécurité publique a réagi immédiatement. Ils étaient déjà allés contrôler la veille et l’avant-veille, mais malheureusement pas au moment où cette jeune femme est arrivée », a confié l’édile. « La police fait actuellement un travail remarquable mais simplement, ils n’ont pas assez de moyens, et c’est là que le bât blesse. »
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