ESPRIT DE LIBERTÉ

Philippe Murer : « On nous impose des méthodes de surveillance extrêmement violentes »

mai 23, 2022 19:46, Last Updated: juin 1, 2022 21:27
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Philippe Murer est économiste, spécialiste des questions liées à la souveraineté économique, à l’environnement et à l’énergie. Il a également publié plusieurs ouvrages en lien avec ses travaux, dont le dernier s’intitule Sortir du capitalisme du désastre, aux éditions Jean-Cyrille Godefroy.

Selon Philippe Murer, les sanctions économiques prises contre la Russie sont loin d’avoir porté leurs fruits.

« Emmanuel Macron expliquait il y a quelques semaines que la monnaie russe dévissait, mais elle se renforce désormais, elle est au plus haut depuis cinq ans. Ils ne sont pas parvenus à provoquer l’effondrement du système financier russe, qui a un excédent commercial massif et peu de dettes. »

« Les sanctions ne changent jamais les politiques étrangères des pays et arrêtent encore moins les guerres. Ça n’a jamais été le cas, ce ne sera pas le cas cette fois-ci. Elles créeront une récession en Russie de l’ordre de 5 à 10% cette année, mais la Russie va se redéployer vers des partenaires différents en Asie, en Amérique du Sud et en Afrique. »

Pour l’économiste, les sanctions prises contre la Russie vont toutefois avoir « un impact énorme sur l’économie européenne ». Si l’UE a d’ores et déjà décidé de ne plus acheter de charbon russe à compter du mois d’août, elle réfléchit désormais à un embargo sur les livraisons de gaz et de pétrole russes d’ici la fin de l’année. 

« L’Europe va payer son énergie beaucoup plus cher, puisqu’elle refuse de l’acheter là où elle est proche et abondante. Ça créera une paupérisation massive, nous avons besoin d’énergie pour nous chauffer, nous déplacer, mais aussi pour produire et faire tourner l’économie. »

« Ces sanctions sont un suicide et un échec, l’Europe se tire une balle dans la tête sans parvenir pour autant à infléchir la politique du gouvernement russe. » 

D’après l’économiste, les mesures mises en place par le gouvernement pour protéger les Français contre la hausse des prix de l’énergie ne pourront pas non plus se prolonger indéfiniment « parce que la dette publique de la France devient monstrueuse ». 

Selon Philippe Murer, l’économie française était d’ailleurs déjà « en voie de tiers-mondisation » avant la guerre entre l’Ukraine et la Russie, perdant ses industries au profit de la Chine et des pays de l’Est pour se recentrer sur les métiers de services et le tourisme. 

Une tendance qui risque, selon lui, de se poursuivre malgré les engagements pris par Emmanuel Macron pour mettre en œuvre un grand plan de réindustrialisation sur 5 ans avec 30 milliards d’euros de crédits alloués au développement de la compétitivité industrielle et des technologies d’avenir. 

« On a un début d’effondrement économique très clair. Ce sera plutôt une agonie qu’un effondrement brutal, mais nous allons vers une baisse du pouvoir d’achat et une paupérisation. »

« La France est perdante dans son ensemble dans ce système économique, il n’y en a que quelques-uns qui tirent leur épingle du jeu sur le dos des autres. »

 Alors que la situation économique du pays se détériore et que l’inflation augmente fortement, Philippe Murer estime que les élites, qui ont été profondément marquées par le mouvement des Gilets Jaunes, pourraient être tentées de s’inspirer des méthodes autoritaires du régime chinois et de mettre en place différents outils numériques permettant, le cas échéant, de contenir un nouveau mouvement de colère populaire de grande ampleur. 

« Les élites ont deux choix : soit elles reconnaissent leur échec et optent pour un modèle économique qui favorise le bien-être de la population et le développement, soit elles perpétuent le système actuel qui les enrichit. Pour ce faire, il faut des outils qui permettent de tenir une population très en colère, ces outils correspondent au crédit social chinois. »

« L’échec des politiques de la caste mondialisée oblige à ce genre de mesures violentes et punitives vis-à-vis de la population. C’est parce qu’elles refusent de changer de modèle qu’elles imposent ces méthodes de surveillance, puis des systèmes de récompenses et de punitions. Nous sommes petit à petit en train de sortir de la démocratie pour passer dans des régimes autoritaires. »

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