Un tournant du quinquennat ? Le Conseil constitutionnel doit annoncer vendredi à 18h00 ses décisions sur la réforme des retraites, tandis qu’Emmanuel Macron semble déjà projeté vers la suite, avec une proposition de recevoir mardi les syndicats.
Le chef de l’État a invité les syndicats pour un dialogue « sans préalable », et « quelle que soit la décision du Conseil constitutionnel ». Mais jeudi, lors de la 12e journée de mobilisation, les leaders syndicaux ne paraissaient pas pressés de se rendre à l’Élysée et semblaient davantage tournés vers leur rendez-vous traditionnel du 1er mai. « Il y a une décence à avoir, les gens ne vont pas passer à autre chose comme ça », jugeait le patron de la CFDT Laurent Berger. « On va d’abord lui laisser les 15 jours de réflexion », a abondé son homologue de FO Frédéric Souillot.
Après trois mois de crise politique et sociale, le suspense est entier quant au verdict que va rendre le Conseil constitutionnel, avec le risque que cet épilogue législatif ne calme pas la contestation. Signe d’une grande tension, toute manifestation aux abords du siège de l’institution, situé dans une aile discrète du Palais Royal, est interdite depuis jeudi soir après un bref blocage dans la matinée. Et d’impressionnantes barrières anti-émeutes ont été érigées rue de Montpensier. La Comédie française, voisine du Conseil au sein du Palais-Royal, a annulé ses représentations de vendredi.
« Tenir le cap, c’est ma devise »
Depuis le déclenchement du 49.3 le 16 mars et plus encore depuis le 20 mars, quand le gouvernement est passé à neuf voix d’être renversé à l’Assemblée, le temps politique semble suspendu aux décisions du Conseil. Emmanuel Macron, son gouvernement et sa majorité attendent une validation, même partielle, de la réforme, qui reporte l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans, pour enfin parvenir à surmonter la contestation qui dure depuis janvier et espérer relancer ce second quinquennat un an à peine après la réélection du chef de l’État. « Tenir le cap, c’est ma devise », a glissé le chef de l’État vendredi matin en inspectant le chantier de Notre Dame.
Dans les rayons d’un hypermarché d’Eure-et-Loir, Élisabeth Borne a de son côté été interrompue à plusieurs reprises par quelques manifestants. « On ne veut pas des 64 ans », « 49.3 on n’en veut pas », ont crié certains. Mais la Première ministre a aussi pu engager le dialogue avec des clients, se disant « lucide » sur l’impopularité de la réforme.
Censurer totalement ou partiellement la réforme ?
Les oppositions, politiques et syndicales, espèrent que le Conseil censurera un texte adopté grâce à une procédure parlementaire inédite et controversée. Les décisions du Conseil, chargé de contrôler la conformité des lois à la Constitution, ne sont susceptibles d’aucun recours. La gauche espère un feu vert pour entamer la collecte de 4,8 millions de signatures vers un hypothétique et inédit référendum d’initiative partagée (RIP) destiné à limiter à 62 ans l’âge de la retraite en France. Car les Sages doivent se prononcer sur deux points : la validité constitutionnelle de la réforme et la possibilité de déclencher une longue et complexe procédure référendaire.
Mais quel que soit leur verdict, « le combat syndical est loin d’être terminé », a averti le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, jeudi. Selon le ministère de l’Intérieur, 380.000 manifestants ont défilé jeudi en France (1,5 million selon la CGT), pour la douzième journée de mobilisation depuis janvier, le deuxième plus faible score depuis le début du mouvement. En attendant, un rassemblement est prévu à 17h00 devant l’Hôtel de Ville de Paris, à l’appel de plusieurs syndicats dont la CGT et FO. Plusieurs centaines de jeunes se sont également rassemblés pour manifester dans la capitale et devraient s’y joindre. La police redoute des débordements. Des blocages se sont poursuivis vendredi : perturbation de la circulation autour de Rouen, blocage d’une plateforme alimentaire dans la banlieue de Strasbourg, par exemple.
Le Conseil constitutionnel, présidé par l’ancien Premier ministre socialiste Laurent Fabius, et qui compte deux anciens ministres d’Emmanuel Macron (Jacques Mézard et Jacqueline Gourault), va-t-il censurer totalement ou partiellement la réforme ? Retrancher les fameux « cavaliers » sociaux ou procéduraux (index séniors, voire CDI séniors) dont l’annulation ne semble faire aucun doute, même au sein du gouvernement, car ils n’auraient rien à faire dans un texte financier ? En cas de validation vendredi, Emmanuel Macron devra encore promulguer la loi. Ce devrait être fait « dans les jours suivants », selon l’Élysée. Il devrait aussi prochainement s’adresser aux Français.
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