GéOPOLITIQUE

Sommet de l’IA à Paris : deux visions différentes du monde qui s’opposent

février 12, 2025 17:12, Last Updated: février 12, 2025 19:15
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Le sommet international de Paris sur l’intelligence artificielle s’est terminé sur deux visions du monde très différente, les États-Unis appelant à limiter la régulation pour « ne pas tuer une industrie en plein essor », l’Europe défendant un « modèle de société » basé sur le climat et la « question du genre ».

À la clôture du sommet, 61 pays, dont la Chine, la France et l’Inde (les co-organisateurs), ainsi que l’Union européenne (UE) et la Commission de l’Union africaine, se sont prononcés pour une coordination renforcée de la gouvernance de l’IA.

Une vision très éloignée de celle défendue par les États-Unis qui, comme le Royaume-Uni, ne figurent pas parmi les signataires de cette déclaration, s’opposant aux contraintes européennes sur les entreprises et condamnant l’implication du régime chinois.

Deux visions du monde

Pendant deux jours, dirigeants politiques et patrons de la tech se sont réunis au Grand Palais dans le but d’annoncer une vision commune dans la gouvernance de l’IA. La dernière journée a été marquée par le discours offensif du vice-président américain.

À rebours d’une Europe voulant définir l’IA en termes de régulation lui servant à promouvoir un modèle de société progressiste, le vice-président américain J.D. Vance a refroidi les ardeurs européennes et a souhaité faire « tous les efforts possibles pour encourager les politiques pro-croissance », dérégulées et anti-woke.

Avant de déjeuner à l’Élysée, J.D. Vance avait mis en garde contre les partenariats avec les « régimes autoritaires », en référence notamment à la Chine. « S’associer avec eux (ces régimes, ndlr) revient à enchaîner votre nation à un maître autoritaire qui cherche à infiltrer, s’installer et s’emparer de votre infrastructure d’information ».

La France et l’UE ont appelé de leur côté à un « sursaut » européen face à l’hégémonie des acteurs de la tech américaine et chinoise. Ils veulent aussi s’entendre pour « rendre l’intelligence artificielle durable pour les populations et la planète ». À cette fin, la création d’un observatoire de l’impact énergétique de l’intelligence artificielle piloté par l’Agence internationale de l’énergie a été officialisé, avec le vœu de réunir les entreprises leaders du secteur.

La vision européenne de développement d’une « IA inclusive »

En réponse aux ambitions américaines, Emmanuel Macron a insisté sur le « besoin de règles » et d’un « cadre de confiance » pour accompagner le développement de l’IA, alors que le sommet s’est traduit par un plan d’investissements privés, principalement étrangers, de 109 milliards d’euros en France – dont les contreparties ne sont pas encore connues.

Emmanuel Macron a plaidé pour un « cadre de confiance » qui garantisse le « respect de la vie privée », de la « créativité », notamment des droits d’auteurs, et « évite une utilisation de l’intelligence artificielle pour le contrôle de masse », alors que l’Europe est critiquée pour son contrôle de l’information via l’European Media Freedom Act. En même temps, selon le président, « nous avons besoin de ces règles pour que l’IA avance » et « besoin de continuer à faire avancer une gouvernance internationale de l’IA ».

Le président a donné sa vision de l’IA lors de son passage à la Station F, le 11 février après le sommet : « On veut plus d’innovation en France et en Europe […] mais on veut aussi par cette innovation, porter le modèle de société dans lequel on croit : un modèle pluriel, ouvert, généreux, libre, équitable, qui prenne en compte la question du climat et la question du genre », a déclaré la président, devant les employés des start-up présentes.

Alors que l’Union européenne tente d’avancer ses pions dans cette course à l’IA, la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen a dévoilé un plan d’investissements de 200 milliards d’euros, dont 150 milliards venant de grands groupes.

Il s’agit du « plus grand partenariat public-privé dans le monde pour le développement d’une IA », au sein de l’alliance « EU AI Champions Initiative » qui regroupe plus de 60 entreprises, a souligné la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen. Les États-Unis avaient annoncé la création fin janvier de « Stargate », un plan d’investissements dans l’intelligence artificielle de 500 milliards de dollars, reconduit et augmenté chaque année.

La vision américaine d’une IA dérégulée

Dans son discours, le vice-président américain J. D. Vance a fustigé la « sur réglementation » européenne et mis en garde contre la « censure » gouvernementale de la liberté d’expression. Le vice-président américain a mis en garde contre une « régulation excessive » de l’intelligence artificielle qui « pourrait tuer une industrie en plein essor ».

Il a pointé du doigt les réglementations technologiques phares de l’Europe, comme le règlement sur les services numériques (Digital Services Act, DSA) et le règlement général sur la protection des données (RGPD) ; des « coûts de conformité sans fin » qui nuisent aux investissements d’entreprises américaines en Europe.

« L’Amérique ne peut pas et ne veut pas accepter cela », a souligné J. D. Vance, en s’en prenant au DSA, le règlement européen sur la modération des contenus et à sa lutte contre la « soi-disant désinformation », selon ses mots. « C’est une chose de protéger un enfant des prédateurs pédocriminels, c’en est une autre d’empêcher un adulte d’accéder à une opinion qui va à l’encontre de son gouvernement » a-t-il expliqué.

« L’Amérique veut s’associer à vous tous », a affirmé J. D. Vance devant les chefs d’État présents, « mais pour créer ce type de confiance, nous avons besoin d’un régime réglementaire international qui favorise la technologie de l’IA plutôt que de l’étrangler ».

Londres veut suivre sa propre voie

Le gouvernement britannique a estimé que la déclaration finale du sommet sur l’intelligence artificielle à Paris ne répondait pas suffisamment aux défis posés par l’IA. « Nous étions d’accord sur une grande partie de la déclaration, et nous continuons à travailler étroitement avec nos partenaires internationaux », a déclaré un porte-parole du gouvernement britannique, dans un communiqué.

« Cependant, nous avons estimé que la déclaration ne fournissait pas suffisamment de clarté d’un point de vue pratique sur la gouvernance mondiale, et ne répondait pas suffisamment aux questions difficiles liées à la sécurité nationale et au défi que l’IA lui pose », a ajouté le porte-parole.

Keir Starmer s’est engagé à faire du Royaume-Uni un « leader mondial » de l’intelligence artificielle. Il a annoncé mi-janvier un plan d’action visant à attirer les entreprises du secteur en leur laissant tester au Royaume-Uni leurs innovations avant toute régulation.

« Nous allons suivre notre propre voie : tester et comprendre l’IA avant de la réglementer, afin de nous assurer que lorsque nous le ferons, ce sera de manière proportionnée et sur la base de données scientifiques », avait-il alors déclaré.

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