Le patron des affaires humanitaires de l’ONU discute dimanche en Arabie saoudite de l’accès de l’aide au Soudan avec des émissaires de l’armée et des paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) qui négocient une trêve après trois semaines de combats meurtriers.
Plusieurs « cessez-le-feu » ont été violés dans les secondes suivant leur annonce depuis le début le 15 avril des hostilités au Soudan qui ont déjà fait quelque 700 morts, selon une ONG. L’ONU parle de son côté de 335.000 déplacés et 117.000 réfugiés.
Dimanche encore, des combats ont résonné partout dans Khartoum où les habitants survivent, barricadés sans eau ni électricité et avec des réserves de nourriture et d’argent bientôt à sec. Alors qu’Américains et Saoudiens assurent que les belligérants négocient une trêve en Arabie saoudite, l’armée, dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane, et les FSR du général rival Mohamed Hamdane Daglo ne disent rien des discussions.
Appel aux deux généraux à prendre des « engagements » pour l’aide humanitaire
Le responsable de l’ONU pour les affaires humanitaires, Martin Griffiths, a rejoint les négociations dimanche à Jeddah après avoir appelé mercredi au Soudan les deux généraux à prendre des « engagements » pour laisser entrer l’aide humanitaire et sortir les civils pris sous les feux croisés. De leur côté, Ryad et Washington ont exhorté les belligérants à « s’impliquer activement » mais n’ont annoncé ni le début formel des pourparlers ni leur teneur.
Pendant ce temps, des témoins font état de combats et de raids aériens sur différents quartiers de Khartoum. « On a été survolé par des avions de combat et on a entendu des explosions et des missiles anti-aériens », affirme ainsi à l’AFP Ahmed al-Amin, habitant du quartier de Haj Youssef, dans le nord-est de Khartoum.
Avant d’entrer en guerre, les généraux Burhane et Daglo avaient évincé ensemble les civils du pouvoir avec leur putsch de 2021. Deux ans plus tôt, l’armée avait accepté sous la pression de la rue de limoger le dictateur Omar el-Béchir, au pouvoir depuis 30 ans. Mais la transition a dérapé, et les négociations sous égide internationale pour intégrer les FSR dans l’armée n’ont fait qu’exacerber les tensions, déclenchant les hostilités le 15 avril.
Pour Aly Verjee, chercheur de l’Université de Gothenburg en Suède, les négociations à Jeddah se concentrent sur « le plus petit dénominateur commun de la communauté internationale » : la cessation des hostilités. « Pour l’après, il n’y a pas de consensus apparent ». Pour en discuter, les FSR ont dépêché à Jeddah des proches du général Daglo et de son puissant frère Abderrahim, qui passe pour le financier des FSR via ses mines d’or. Côté armée, sont présents des responsables de haut rang connus pour leur hostilité aux paramilitaires.
Éviter « le morcellement du Soudan »
Ryad, allié et bailleur de fonds des deux camps, et Washington veulent prendre le pas sur les initiatives régionales. Voisine du Soudan, l’Égypte s’est greffée sur cette initiative conjointe en s’invitant dans un comité de liaison censé aboutir à un cessez-le-feu et des couloirs humanitaires sécurisés.
Leur principal concurrent reste l’Igad, le bloc d’Afrique de l’Est emmené par le président sud-soudanais Salva Kiir, médiateur historique au Soudan. L’Union africaine, elle, a perdu ses leviers de pression quand elle a suspendu le Soudan après le putsch de 2021, disent les experts.
Avec l’ONU, ces deux blocs ont malgré tout « salué » les négociations en Arabie saoudite alors que la Ligue arabe a elle appelé à « soutenir » les « négociations indirectes de Jeddah » pour éviter « le morcellement du Soudan ».
Depuis le siège de l’organisation panarabe au Caire, le chef de la diplomatie égyptienne Sameh Choukri a mis en garde contre « un dérapage régional » alors que son pays, en pleine crise économique, a déjà accueilli plus de 60.000 réfugiés. Selon Le Caire, il se rend lundi au Tchad et au Soudan du Sud, pays frontaliers du Soudan ayant eux-mêmes accueilli plus de 57.000 personnes fuyant la guerre, selon le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés.
« Notre sécurité et notre vie passent avant tout »
Des milliers de personnes ont également fui vers l’Éthiopie voisine, essentiellement des ressortissants de pays tiers. « C’est la deuxième guerre que je fuis », affirme à l’AFP Salam Kanhouch, réfugié syrien, dans la localité frontalière éthiopienne de Metema. Ceux qui fuient le font en bravant de longues routes périlleuses car, selon Sara, une réfugiée érythréenne : « notre sécurité et notre vie passent avant tout ». « Nous ne pouvons pas penser à ce qu’on a pu laisser derrière nous », explique-t-elle à l’AFP, demandant à n’être identifiée que par son prénom.
Si la guerre dure, a déjà prévenu l’ONU, jusqu’à 2,5 millions de personnes supplémentaires souffriront de la faim, un fléau qui touche déjà un tiers des Soudanais.
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