Une levée d’hypothèque pour Gérald Darmanin : la juge d’instruction chargée d’enquêter sur des accusations de viol formulées depuis 2017 par une plaignante, Sophie Patterson-Spatz, a prononcé vendredi un non-lieu en faveur du ministre de l’Intérieur.
Le non-lieu vient donc mettre un terme provisoire au dossier très sensible politiquement, une bonne nouvelle pour la majorité, qui a subi ces dernières semaines l’ouragan des accusations visant Damien Abad, éphémère ministre des Solidarités qui n’a pas été reconduit dans le remaniement post-législatives.
Depuis sa nomination à l’été 2020 à l’Intérieur et encore lors de sa reconduction récente, ce dossier de violences sexuelles a en effet été un boulet politique pour M. Darmanin, considéré notamment par des voix féministes comme illégitime à sa place.
La plaignante, Sophie Patterson-Spatz, peut toutefois faire appel. Ni elle ni son avocat, Me Yann Le Bras, qui a indiqué à l’AFP n’avoir pas été notifié de cette décision, n’ont réagi pour l’instant.
Les faits évoqués par la plaignante
Cette Française de 50 ans accuse, depuis 2017, le locataire de Beauvau de viol, harcèlement sexuel et abus de confiance, pour des faits qui se seraient produits à Paris en 2009 et qui auraient débuté au siège de l’UMP, ancêtre de LR.
La plaignante s’était adressée à l’élu, alors chargé de mission au service des affaires juridiques du parti, pour obtenir un soutien alors qu’elle voulait faire réviser une condamnation de 2004 pour chantage et appels malveillants à l’égard d’un ex-compagnon.
Selon elle, M. Darmanin lui aurait fait miroiter au cours d’un dîner puis d’une soirée dans un club échangiste parisien son possible appui, via une lettre qu’il s’engageait à rédiger auprès de la Chancellerie, en lui demandant en échange une relation sexuelle.
Selon son récit devant les enquêteurs, Sophie Patterson-Spatz n’avait aucune envie de cette relation sexuelle, aurait « paniqué », mais se serait sentie contrainte de « passer à la casserole », n’ayant « pas le choix ».
Échange-clé du dossier, dans la nuit du 17 décembre 2009, plusieurs mois après les faits dénoncés, Mme Patterson-Spatz lui écrit ce SMS : « Abuser de sa position. Pour ma part, c’est être un sale con (…). Quand on sait l’effort qu’il m’a fallu pour baiser avec toi. Pour t’occuper de mon dossier ».
Moins de deux heures après, celui-ci répond : « Tu as raison, je suis sans doute un sale con. Comment me faire pardonner ? »
L’enquête classée deux fois par le parquet
Après avoir selon son récit « occulté les faits » pendant plusieurs années, Sophie Patterson-Spatz a « suffoqué » à l’annonce de l’arrivée de M. Darmanin au gouvernement d’Édouard Philippe, en juin 2017. Après avoir ré-analysé cet épisode comme un viol, elle dépose alors plainte.
L’enquête est classée deux fois par le parquet. Une magistrate instructrice refuse d’enquêter, estimant ces investigations suffisantes.
Après de longs démêlés procéduraux, une autre juge d’instruction est saisie à l’été 2020.
Elle a placé M. Darmanin sous le statut de témoin assisté en décembre 2020 et confronté le ministre et la plaignante pendant neuf heures en mars 2021, avant de prononcer vendredi 8 juillet ce non-lieu.
« Pour la quatrième fois en cinq ans, la justice affirme qu’aucun acte répréhensible ne peut être reproché à M. Gérald Darmanin », se sont félicités les avocats du ministre, Me Mathias Chichportich et Pierre-Olivier Sur.
« Notre client s’est toujours astreint à ne pas commenter les décisions de justice et ne fera donc pas davantage de commentaires », ont indiqué Me Chichportich et Sur.
Le ministre a déposé plainte pour dénonciation calomnieuse. Cette plainte « suit son cours », selon les avocats.
« Une vie de jeune homme »
« Il faut quand même mesurer ce que c’est que d’être accusé à tort, de devoir expliquer à ses parents ce qu’il s’est passé parce que, c’est vrai, j’ai eu une vie de jeune homme », avait justifié le ministre en juillet 2020 au journal La Voix du Nord.
M. Darmanin a fait l’objet d’une autre procédure comparable, également classée en 2018 : il avait été accusé d’abus de faiblesse par une habitante de Tourcoing (Nord) qui affirmait avoir été contrainte à des relations sexuelles en échange d’un logement et d’un emploi.
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