Le parti politique allemand de centre droit, l’Union chrétienne-démocrate (CDU), a remporté les élections fédérales de la semaine dernière, mais est confronté à des défis majeurs.
Après avoir devancé le parti populiste Alternative pour l’Allemagne (AfD), dans un scrutin marqué par des difficultés économiques et une récente attaque terroriste présumée à Munich, les défis de l’Union chrétienne-démocrate ne font que commencer. Le parti devra naviguer à travers des eaux politiques agitées, des difficultés économiques et des tensions liées au contrôle de l’immigration, alors que l’AfD se présente comme son principal adversaire. Mais avant tout, le plus grand défi de l’Union chrétienne-démocrate sera de former un gouvernement.
1. Formation d’un gouvernement
L’Union chrétienne-démocrate, dirigée par Friedrich Merz, a remporté les élections grâce à une alliance conservatrice avec l’Union chrétienne-sociale. Les vainqueurs ont tiré profit d’un climat de mécontentement général de la population face à l’inflation, l’augmentation des coûts de l’énergie et des politiques d’immigration, obtenant ainsi 28,5 % des voix.
En Allemagne, il est rare qu’un parti obtienne une majorité absolue au Parlement, ce qui oblige les formations politiques à diriger le pays avec un gouvernement minoritaire, en s’appuyant sur des coalitions parlementaires ad hoc.
La coalition précédente, formée du Parti social-démocrate d’Allemagne (SPD), du Parti libéral-démocrate, à tendance pro-entreprise, et du Parti vert, a perdu du terrain et s’est effondrée en novembre 2024.
Comme prévu, au scrutin du 23 février, aucun parti n’a obtenu la majorité, mais Friedrich Merz a promis d’agir rapidement pour former un gouvernement de coalition. L’un des dénouements possibles est la formation d’une « grande coalition » entre le bloc conservateur et le Parti social-démocrate de centre gauche du chancelier Olaf Scholz, qui a obtenu 16,4 % des voix. La coalition obtiendrait ainsi une faible majorité.
Toutefois, de pénibles mois de négociations pourraient s’écouler avant qu’une coalition ne se forme. Et encore, les négociations pourraient s’avérer infructueuses, obligeant M. Merz à former un gouvernement minoritaire plus faible avec des partenaires à tendance plus à gauche.
2. L’Alternative pour l’Allemagne
L’Alternative pour l’Allemagne (AfD), qui bénéficie du soutien d’Elon Musk et de sa plateforme de réseaux sociaux X, est arrivé en deuxième position avec 20,8 % des voix, son meilleur résultat à ce jour. Toutefois, M. Merz a refusé de s’allier avec ce parti, malgré le fait que cela lui garantirait une majorité solide.
L’AfD a suscité la controverse.
La branche du parti dans l’est de l’Allemagne fait l’objet d’une surveillance accrue après qu’un tribunal allemand a tranché que l’AfD Saxe pouvait être qualifiée de « groupe d’extrême droite » par les autorités.
Les branches régionales de l’AfD dans les États de Saxe et de Thuringe sont perçues comme étant plus conservatrices que la direction centrale du parti. L’organisation de jeunesse de l’AfD, Young Alternative Thuringia, a été classée comme groupe « d’extrême droite » en mars 2024.
La cheffe de l’Alternative pour l’Allemagne, Alice Weidel, a rejeté l’étiquette « extrémiste » attribuée à son parti.
Dans une entrevue avec The American Conservative, elle a affirmé : « Ni moi ni mon parti ne sommes des extrémistes de droite. Vous devez savoir qu’en Allemagne, cette accusation constitue un cri de guerre de la gauche, qui domine le discours public. »
L’AfD a mené une campagne en faveur de contrôles frontaliers renforcés, d’une réduction du nombre de demandeurs d’asile et de l’abandon des objectifs de carboneutralité en matière de climat.
On peut se demander si l’Union chrétienne-démocrate de M. Merz intégrera une partie des messages de l’AfD, ce qui pourrait ne pas être possible si M. Merz doit travailler avec un gouvernement de centre gauche.
Le 24 février, Alice Weidel a affirmé que le prochain chancelier sera incité par les partis de gauche à contracter davantage de dettes.
« [Merz] ne sera pas en mesure de réaliser ce qu’il a promis », a-t-elle déclaré.
« Il fera des compromis avec la gauche pour desserrer le frein à l’endettement, ce qui est exactement le contraire de ce dont le pays a besoin. […] L’État devrait fonctionner comme une entreprise, et lorsqu’une entreprise est surendettée, vous savez ce qu’il arrive. »
3. Mettre un frein à l’endettement
L’Allemagne est la plus grande économie d’Europe, réputée pour sa main-d’œuvre qualifiée et ses exportations de haute qualité. Toutefois, elle est confrontée à des obstacles majeurs qui ont relancé le débat sur la limite d’endettement inscrite dans la Constitution.
Le frein à l’endettement impose une limite à l’emprunt structurel net du gouvernement fédéral, l’ajustant en fonction du cycle économique, en le fixant à 0,35 % du produit intérieur brut.
Environ 60 % des Allemands sont favorables au maintien du frein à l’endettement. L’idée de cette loi sur la responsabilité budgétaire s’inspire de la psyché nationale. Le mot allemand pour « dette » et pour « culpabilité » est le même : « schuld ».
L’économie allemande a connu une contraction pour la deuxième année consécutive en 2024, selon les données publiées par l’office des statistiques du pays le 25 février. Cela soulève la question de la manière dont le gouvernement continuera à dépenser si l’économie ne croît pas.
M. Merz a été invité à desserrer l’étau de l’endettement pour financer la modernisation de l’armée, ce qui entraînerait une hausse des dépenses de défense. Toutefois, une telle réforme nécessiterait le soutien des deux tiers du Parlement.
Cependant, l’AfD, avec ses 20,8 % de voix, et Die Linke (en français « La Gauche »), qui a obtenu 8,8 % des voix, ont obtenu ensemble près d’un tiers des sièges au nouveau Parlement.
L’AfD et Die Linke, qui sont tous deux hostiles aux dépenses militaires engendrées par le conflit entre l’Ukraine et la Russie, pourraient empêcher l’adoption de mesures visant à assouplir les règles fiscales rigides au Bundestag. Toutefois, Die Linke veut lever le frein à l’endettement, mais seulement si les fonds sont destinés à l’aide sociale, et non à la défense.
4. L’immigration
En janvier, M. Merz a promis des contrôles frontaliers renforcés après une attaque au couteau mortelle en Bavière et l’arrestation d’un demandeur d’asile afghan.
Toutefois, le lendemain de son élection, M. Merz a envoyé un message différent en déclarant : « Personne ne parle de fermer les frontières. »
Il s’agit d’un début incertain pour un nouveau gouvernement qui devra faire face à la question délicate de l’immigration, marquée notamment par une vague d’attaques terroristes et de crimes commis par des personnes immigrées.
Depuis l’incident du 13 février à Munich, où un demandeur d’asile afghan a foncé dans la foule avec sa voiture, faisant au moins 30 blessés et 2 morts, jusqu’à l’attaque au couteau qui a coûté la vie à un enfant et un adulte dans la ville bavaroise d’Aschaffenburg, l’Allemagne est secouée par une série d’attaques terroristes présumées perpétrées par des immigrants.
Les partis traditionnels se sont de plus en plus éloignés de leurs positions progressistes historiques sur l’immigration en réintroduisant, par exemple, les contrôles aux frontières.
Selon les sondages, 80 % des Allemands estiment que les taux d’immigration ont été trop élevés au cours de la dernière décennie.
Selon les données officielles sur la criminalité en Allemagne en 2023, 34,4 % des personnes mises en cause dans des délits n’étaient pas de nationalité allemande. Cela représente une hausse de 13,5 % par rapport à l’année précédente, alors que le taux de criminalité chez les citoyens allemands a augmenté de seulement 1 %.
Le pays a connu un changement démographique majeur : la population allemande a augmenté de plus de 3,5 millions de personnes entre 2014 et 2024, uniquement en raison de l’immigration.
En 2015, la chancelière allemande Angela Merkel a accepté d’accueillir plus d’un million de réfugiés syriens en Allemagne.
5. L’économie
L’Allemagne a dû faire face à la perte de gaz russe abordable, aux fermetures d’usines de Volkswagen et à la concurrence féroce des véhicules électriques chinois à des prix avantageux.
La combinaison de crises énergétiques, d’instabilité politique et du déclin de la compétitivité menace le statut de longue date de l’Allemagne en tant que force industrielle majeure de l’Union européenne.
L’Allemagne a récemment rejeté la coalition des Verts qui prévoyait de rendre 80 % de son électricité « verte » d’ici 2030.
Le pays s’est engagé avec ferveur dans la recherche d’énergies renouvelables dépendantes des conditions météorologiques, et se trouve aujourd’hui plus dépendant que jamais des importations d’électricité, tout en tentant de se sevrer du gaz russe acheminé par canalisation.
L’Union chrétienne-démocrate a déclaré qu’elle examinait « la possibilité de relancer les activités dans les centrales nucléaires qui ont été récemment fermées ».
Toutefois, M. Merz semble avoir rejeté cette option.
« Elles sont en train d’être démantelées, elles sont en train d’être décontaminées », a déclaré le chef du parti lors d’une rencontre avec un syndicat de travailleurs conservateurs, selon Euractiv, le 17 janvier.
« Cela ne sera pas résolu, très probablement », a-t-il ajouté, notant que les probabilités de redémarrage « diminuent chaque semaine ».
Avec Reuters
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