ANALYSE – En février, outre-Rhin, les conservateurs de la CDU/CSU sont arrivés en tête des élections législatives anticipées devant le parti populiste AfD et le parti social-démocrate SPD du chancelier sortant Olaf Scholz. Leur leader et futur chef du gouvernement, Friedrich Merz incarne la ligne libérale et conservatrice du parti et s’est montré assez critique de l’héritage de l’ex-chancelière Angela Merkel. Son credo politique pourra-t-il stopper l’ascension du mouvement d’Alice Weidel ?
C’est un retour en grâce des conservateurs allemands à laquelle l’Europe a assisté le 23 février dernier. Le parti de droite traditionnel CDU/CSU porté par Friedrich Merz a décroché la première place en obtenant 28,5 % des voix, permettant ainsi un retour aux affaires de ceux qui avaient échoué face au parti de centre-gauche SPD en 2021. De son côté, le mouvement nationaliste a convaincu 20,8 % des électeurs allemands, score faisant de l’AfD la principale formation politique d’opposition au futur gouvernement. En pleine déroute, les sociaux-démocrates ont réalisé le pire score de leur histoire (16,5 %).
Cette victoire des conservateurs et la performance réalisée par l’AfD en doublant son score de 2021 marquent un changement et plus précisément un virage à droite pour la première économie européenne, mais également un rejet des politiques mises en œuvre par la coalition « feu tricolore », ces dernières années.
Le leader de la CDU/CSU et futur chancelier allemand, Friedrich Merz, libéral-conservateur convaincu, a fait campagne sur les thèmes de l’AfD : la lutte contre l’insécurité, une politique migratoire plus stricte et l’assouplissement des normes environnementales, etc., et entend récupérer une partie de l’électorat de droite ayant rejoint le parti populiste. Une stratégie qui pourrait donner du fil à retordre à l’Alternative pour l’Allemagne (Alternative für Deutschland, AfD) qui ne cesse de progresser depuis son lancement en 2013.
Défenseur d’une ligne dure
Friedrich Merz est historiquement un défenseur de la ligne libérale-conservatrice du parti chrétien-démocrate allemand. Ce dernier est d’ailleurs un admirateur de l’ancien président américain républicain Ronald Reagan, dont il apprécie tout particulièrement cette citation : « Les neufs mots les plus terrifiants de la langue anglaise sont : ‘Je viens du gouvernement et je suis là pour vous aider’ ».
Il est également très critique de la ligne centriste de la CDU autrefois incarnée par l’ex-chancelière, Angela Merkel, et de la politique de cette dernière, plus particulièrement sa politique d’accueil d’un million de réfugiés lors de la crise migratoire de 2015 et celle mise en œuvre en matière de transition énergétique.
Autre élément marquant de ce « coup de barre » à droite, Friedrich Merz, en tant que président du groupe CDU/CSU au Bundestag a fait adopter, au mois de janvier, une motion non-contraignante avec l’AfD sur l’immigration, créant une polémique et faisant réagir son ancienne rivale, Angela Merkel qui a qualifié le vote d’« erreur ».
Par ailleurs, les programmes respectifs du mouvement d’Alice Weidel et de la CDU en vue des dernières élections législatives présentaient plusieurs points communs. Bien que le parti nationaliste ait formulé des propositions plus radicales sur les questions de politique énergétique et d’immigration, allant jusqu’à employer le terme de « remigration » et que leur vision du conflit russo-ukrainien soit très opposée, on retrouve chez les deux formations politiques, une volonté de libéraliser l’économie, de mettre en œuvre une politique migratoire ferme et de réduire les normes environnementales. Le co-leader de l’AfD, Alice Weidel, a d’ailleurs déclaré il y a plusieurs années qu’elle considérait l’ex-Première ministre britannique Margaret Thatcher comme un modèle.
Les rétropédalages pour bâtir une coalition
Cependant, pour le nouvel homme fort de l’Allemagne, endiguer la progression de l’Alternative pour l’Allemagne, risque d’être une tâche ardue.
N’ayant pas obtenu la majorité absolue, les conservateurs sont dans l’obligation de bâtir une coalition avec un autre parti pour être en mesure de diriger le pays. D’ailleurs, des négociations ont d’ores et déjà commencé le 28 février avec les sociaux-démocrates, puisque la CDU, comme tous les autres partis, a refusé de s’allier avec le parti populiste.
Mais ces négociations pourraient certainement être synonymes de renoncements à certaines mesures pour la droite conservatrice allemande, notamment sur les sujets liés à l’immigration et à la protection sociale.
D’ailleurs, même avant le début des pourparlers avec le SPD, le futur chancelier allemand avait fait réagir à la droite de la droite du spectre politique outre-Rhin par une déclaration tenue lors d’une conférence de presse le 24 février, assez éloignée de la fermeté qu’il avait affichée lors de la campagne. « Je veux le redire clairement : aucun de nous ne veut fermer les frontières, personne », a-t-il insisté.
Dès le premier jour, Merz jette toutes les promesses électorales par la fenêtre, ne veut plus fermer les frontières […] C’est une politique contraire à la volonté des électeurs ! », a rétorqué de son côté Alice Weidel.
Pour le moment, Friedrich Merz n’est pas officiellement chancelier. Il a dit vouloir former un gouvernement d’ici Pâques. Les négociations en vue d’une « grande coalition » CDU-SPD pourraient, à l’inverse de la ligne pourtant prônée par l’élu de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, recentrer la droite allemande et renforcer la droite nationaliste.
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