Le Premier ministre espagnol en exercice, Pedro Sánchez, a accru la pression mardi sur le président de la Fédération espagnole de football, dont plusieurs ministres demandent la démission pour avoir embrassé de force sur la bouche, dimanche, une joueuse de l’équipe d’Espagne victorieuse du Mondial féminin de football.
Tout en se gardant d’appeler à la démission de Luis Rubiales, M. Sánchez a qualifié le geste du président de la Fédération royale espagnole de football (RFEF) d’« inacceptable » et ses excuses d’« insuffisantes » et « inappropriées ».
Le chef du gouvernement en exercice, qui s’exprimait pour la première fois sur ce sujet lors d’une conférence de presse après avoir été reçu par le roi Felipe VI pour évoquer l’investiture du prochain Premier ministre, a également appelé M. Rubiales à « aller plus loin » que ses excuses. Jusqu’où ? À un journaliste qui lui demandait s’il souhaitait la démission de M. Rubiales, M. Sánchez s’est contenté de rappeler que la Fédération n’était pas un organisme relevant du gouvernement espagnol, autrement dit qu’il ne pouvait pas s’ingérer dans ses affaires.
Mardi soir, la RFEF a annoncé qu’en raison du « caractère d’urgence » elle tiendrait vendredi une assemblée générale extraordinaire consacrée à cet incident. Quelques heures auparavant, M. Sánchez avait reçu les joueuses de la « Roja » (surnom des équipes nationales espagnoles) au palais de La Moncloa pour célébrer leur triomphe lors du Mondial, échangeant à cette occasion une très brève poignée de main avec Luis Rubiales.
Entre excuses et banalisation
Sur les images tournées sur le podium du stade de Sydney dimanche soir, juste après le sacre de l’équipe d’Espagne, on voit M. Rubiales prendre la tête de l’attaquante Jennifer Hermoso entre ses deux mains, avant de l’embrasser par surprise sur la bouche. « Ça ne m’a pas plu, hein ! », avait réagi la numéro 10 espagnole dans le vestiaire lors d’un direct diffusé sur Instagram, avant de sourire à l’objectif.
Elle avait plus tard expliqué, dans des déclarations transmises à la presse par la RFEF, qu’il s’agissait d’« un geste mutuel totalement spontané en raison de l’immense joie que procure la victoire en Coupe du monde ». « Le président et moi, nous avons une excellente relation, son comportement avec nous toutes a été parfait et c’était un geste naturel d’affection et de gratitude », avait-elle ajouté.
Devant l’ampleur prise par la polémique sur les réseaux sociaux et à l’étranger, M. Rubiales a présenté ses excuses dans une vidéo, invoquant un geste « naturel, normal ». « Dans un moment de plus en plus fusionnel, sans aucune mauvaise intention, sans aucune mauvaise foi, eh bien, il s’est passé ce qui s’est passé », avait-il déclaré. Et d’ajouter que « s’il y a des gens qui ont été blessés par cela, je dois m’excuser, il n’y a rien d’autre à faire ».
La victoire du mondial volée par la polémique
Dans un communiqué diffusé mardi, l’Association des Footballeurs espagnols (AFE), qui regroupe les joueurs et les joueuses, a « exigé que les autorités compétentes adoptent les mesures nécessaires » face à « la gravité » de l’incident. « En vertu du protocole d’action face à la violence sexuelle établi par le Conseil Supérieur des Sports, embrasser de force est qualifié de conduite inacceptable entraînant des conséquences immédiates », souligne l’AFE, exigeant « que s’applique la loi dans le cas de Rubiales ».
« Un moment de joie unique et spécial pour les footballeurs espagnols a été éclipsé par le comportement inapproprié du président de la RFEF, qui a réduit la visibilité de l’énorme exploit sportif réalisé par l’équipe nationale espagnole », ajoute encore l’AFE. L’AFE retourne ainsi l’argument brandi auparavant par M. Rubiales, qui avait évoqué une victoire « gâchée » par la polémique.
Les excuses de M. Rubiales n’ont pas suffi à éteindre le scandale. Plusieurs ministres espagnols, dont la numéro trois du gouvernement, la communiste Yolanda Diaz, ont dénoncé son comportement et réclamé sa démission. « Ce qu’a fait Rubiales est un exemple intolérable du machisme que nous continuons à endurer, nous les femmes », a-t-elle écrit sur X, anciennement Twitter. Ses excuses, ajoutait-elle, « ne servent à rien ». La ministre de l’Égalité, Irene Montero, a déclaré sur X : « C’est très simple. Deux personnes s’embrassent si elles le veulent toutes les deux, s’il y a consentement ». Sollicitée par l’AFP, la Fifa n’avait pas encore réagi mardi.
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