Le soutien européen garantira que l’Ukraine reste dans la lutte, mais la suspension de l’aide des États-Unis met fin à l’accès à plusieurs plateformes d’armement essentielles.
L’Ukraine s’apprête à perdre l’accès à un ensemble d’armes de haute technologie et à d’autres équipements après la suspension de toute aide américaine à la nation en guerre.
Le président des États-Unis, Donald Trump, a brusquement interrompu l’assistance à l’Ukraine le 4 mars, après une confrontation très médiatisée avec le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, la semaine dernière, au sujet des conditions d’un éventuel cessez-le-feu.
Cette suspension affecte chaque dollar d’aide en provenance du Pentagone, y compris le partage de renseignements et d’autres formes d’assistance non militaire, selon un responsable du département de la Défense des États-Unis (DOD).
« À 18 h hier soir, l’ordre de suspendre toute aide à l’Ukraine a été donné au DOD, y compris pour l’aide qui était en cours d’acheminement », a déclaré à Epoch Times le responsable dans un e-mail le 4 mars.
Dans la foulée, des dirigeants européens se sont précipités pour élaborer un nouveau plan visant à accélérer massivement les dépenses de défense en Europe à hauteur d’environ 800 milliards d’euros.
« Nous sommes entrés dans une ère de réarmement, et l’Europe est prête à augmenter massivement ses dépenses, à la fois pour répondre à l’urgence immédiate d’agir pour soutenir l’Ukraine, mais aussi pour investir à long terme et assumer davantage de responsabilités pour notre propre sécurité européenne », a déclaré la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.
On ignore encore combien de temps il faudra avant que la suspension de l’aide américaine ne se fasse sentir sur le champ de bataille. L’Ukraine ne dépend plus autant des États-Unis qu’au début de la guerre, mais elle compte toujours sur Washington pour plusieurs systèmes d’armement essentiels.
Volodymyr Zelensky a écrit sur la plateforme X que l’Ukraine restait engagée dans la recherche d’une paix juste et durable, et a exposé une feuille de route vers un accord avec la Russie, comprenant des échanges de prisonniers ainsi que l’arrêt des attaques aériennes et maritimes.
« Aucun d’entre nous ne veut une guerre sans fin », a-t-il écrit. « L’Ukraine est prête à venir à la table des négociations dès que possible pour se rapprocher d’une paix durable. Personne ne veut la paix plus que les Ukrainiens. »
Plus tard dans la journée, Volodymyr Zelensky a ajouté qu’il s’était entretenu avec les dirigeants de la Croatie, de la Finlande, de l’Allemagne, de la Grèce, du Royaume-Uni et de l’OTAN, et que l’Ukraine recevrait des systèmes de défense aérienne et des missiles supplémentaires de la part de la Commission européenne.

L’aide à l’Ukraine en chiffres
La rupture soudaine de l’aide américaine à l’Ukraine par Donald Trump a secoué les dirigeants internationaux, bien que des rumeurs circulent déjà à la Maison-Blanche sur la signature prochaine d’un accord clé sur les terres rares – lié à un cessez-le-feu.
Quelle que soit l’issue de la situation, la perte de l’aide des États-Unis porterait un coup dur à l’effort de guerre ukrainien, mais elle ne paralyserait pas immédiatement le pays.
L’Europe est en réalité le principal fournisseur d’aide à l’Ukraine, malgré une économie plus petite que celle des États-Unis. Les pays de l’Union européenne ont plus que doublé leurs dépenses de défense depuis qu’elles ont atteint des niveaux historiquement bas en 2015.
Certains pays situés à l’extrême est de l’Europe ont même consacré la majorité de leur budget de défense à l’Ukraine, l’Estonie y consacrant plus de 2 % de son produit intérieur brut total.
Selon l’Institut Kiel pour l’économie mondiale – qui suit les flux d’aide internationale vers l’Ukraine – l’Europe a fourni 139 milliards de dollars d’aide financière, militaire et humanitaire à Kiev entre janvier 2022 et décembre 2024.
Les États-Unis, pour leur part, ont fourni environ 120 milliards de dollars d’aide sur la même période.
Ces chiffres n’incluent pas l’assistance indirecte à des nations alliées qui pourraient bénéficier à l’Ukraine, ni le fait que les États-Unis avaient initialement promis plus de fonds à l’Ukraine qu’ils n’en ont effectivement dépensé.
Au total, le Congrès a approuvé environ 180 milliards de dollars pour l’Ukraine entre 2022 et 2024, mais la totalité de cette somme n’a pas été déployée, en raison de plusieurs facteurs, notamment des contraintes sur les stocks militaires américains et un gel du financement militaire étranger.
En tout, les États-Unis ont dépensé environ 67 milliards de dollars en assistance sécuritaire à l’Ukraine, la majorité de ces fonds étant alloués via le presidential drawdown authority.
Le presidential drawdown authority permet au président de transférer à une nation étrangère des armes et munitions directement prélevées dans les stocks militaires américains, à hauteur d’un montant approuvé par le Congrès.
La valeur de ces armes est ensuite versée aux entreprises américaines de défense pour reconstituer les stocks avec des équipements neufs et améliorés.
Cependant, le Pentagone a fixé des limites minimales obligatoires pour de nombreuses munitions et n’a donc pas pu envoyer autant d’armes à l’Ukraine que prévu initialement, sous peine de faire passer les stocks américains sous ces seuils critiques.
Actuellement, les États-Unis et l’Europe fournissent chacun environ un quart des équipements militaires de l’Ukraine, tandis que le reste provient soit de l’industrie ukrainienne de défense, en plein essor, soit d’achats internationaux d’armement.
L’Ukraine dépend des systèmes d’armement avancés
Si l’Ukraine peut encore maintenir ses stocks d’artillerie et produire ses propres drones sans l’aide des États-Unis, Kiev reste tributaire de plusieurs systèmes d’armement avancés qui ne peuvent être obtenus qu’auprès de Washington.
Parmi eux, le plus important est le système de missiles Patriot.
Le système Patriot a été transféré à l’Ukraine pour la première fois à la fin de l’année 2022. Il a joué un rôle clé en empêchant la Russie d’obtenir la supériorité aérienne, permettant ainsi plusieurs contre-offensives ukrainiennes au cours des deux années suivantes.
Ce système est vital pour l’Ukraine en raison de sa capacité à intercepter des missiles balistiques, y compris des missiles hypersoniques. Cependant, il est exclusivement produit aux États-Unis et est trop précieux pour être déployé à proximité des lignes de front.
Des options existent sur le marché secondaire, mais elles pourraient nécessiter l’approbation des États-Unis.
Par exemple, Israël a commencé à transférer plusieurs systèmes Patriot retirés du service à l’Ukraine début 2025 sous l’administration de Joe Biden. Toutefois, on ignore si leur remise en état, qui devait être réalisée aux États-Unis, a été achevée avant la suspension de l’aide décidée par Donald Trump.
L’Ukraine a également reçu 39 lance-roquettes multiples HIMARS, qui offrent à Kiev une capacité de frappe essentielle contre les forces russes.
En complément des HIMARS, l’administration Biden a secrètement accordé à l’Ukraine l’accès au système de missiles tactiques de l’armée (ATACMS) à la fin de l’année 2024.
L’ATACMS est un missile balistique de courte portée qui a permis à Kiev de frapper des cibles stratégiques russes derrière les lignes ennemies, notamment des bases aériennes, des centres de commandement et des chaînes d’approvisionnement.
De manière controversée, Joe Biden a annoncé fin 2024 qu’il autorisait l’Ukraine à utiliser les ATACMS contre un nombre limité de cibles situées en Russie et près des lignes de front.
Les États-Unis ont également fourni à l’Ukraine une série de missiles antiradar à grande vitesse (HARM) qui sont essentiels pour localiser et détruire les systèmes radar russes utilisés contre les forces aériennes ukrainiennes.
Au-delà des systèmes d’armement, Kiev dépend aussi de Washington pour le partage de renseignements, permettant aux forces ukrainiennes d’identifier les mouvements de troupes russes et de sélectionner leurs cibles.
Il y a également la question de la dépendance de l’Ukraine à certains produits commerciaux américains, notamment Starlink d’Elon Musk, qui est utilisé pour maintenir les communications sur la ligne de front.
Pour l’instant, l’Ukraine conserve son accès à Starlink, mais elle pourrait remplacer ce système américain par les satellites européens OneWeb.
Les États-Unis ont aussi fourni à l’Ukraine des centaines de véhicules de combat blindés, des dizaines de chars, des milliers de roquettes et de drones à courte portée, ainsi que des millions d’obus d’artillerie. Toutefois, ces équipements sont désormais plus faciles à remplacer via la production nationale ukrainienne ou les sources européennes.

À ce sujet, le ministre danois de la Défense, Troels Lund Poulsen, a déclaré aux journalistes le 4 mars que l’Europe devait agir rapidement et investir massivement pour maintenir la défense de l’Ukraine en l’absence des armes avancées américaines.
« Il y a certaines choses dont les Ukrainiens dépendent entièrement vis-à-vis des Américains », a déclaré M. Poulsen.
« Cela inclut notamment les missiles utilisés dans le système de défense aérienne Patriot, qui est américain. Cela place l’Europe dans une situation où nous devons vraiment en faire davantage par nous-mêmes pour aider l’Ukraine. »
La Maison-Blanche n’a pas répondu à une demande de commentaire avant la publication de cet article.
Avec Associated Press et Reuters
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