« C’était devenu invivable » : émigrer en Israël pour fuir l’antisémitisme malgré la guerre à Gaza

Par Epoch Times avec AFP
13 mars 2025 16:50 Mis à jour: 13 mars 2025 16:52

Poussée par un climat d’antisémitisme devenu selon elle « invivable » en France, Sonia a réalisé son projet d’émigrer en Israël, en pleine guerre à Gaza déclenchée par l’attaque de l’organisation terroriste Hamas le 7 octobre 2023 sur le sol israélien.

« Le quotidien, c’était ‘cache ta kippa’, ‘ne demande pas trop fort si c’est casher’ : il fallait tout le temps brider les enfants parce que j’avais peur qu’on se fasse agresser. Peut-être qu’on devenait un peu parano », raconte Sonia (prénom d’emprunt).

Le nombre de Français à émigrer en Israël a doublé en 2024

« C’était devenu invivable », dit cette mère de famille de 27 ans depuis son appartement à Netanya, ville au nord de Tel-Aviv, où elle a emménagé avec son mari et ses enfants.

En France, elle vivait en région parisienne et faisait le guet devant l’école une heure avant la sortie des classes. Signe de cette détresse toujours présente, elle a demandé à l’AFP de modifier son prénom.

Aujourd’hui, malgré une trêve fragile dans la bande Gaza après 15 mois de guerre entre Israël et l’organisation terroriste Hamas à Gaza, Sonia dit se sentir « cent fois plus protégée ». Un sentiment partagé par son beau-père, Gabriel, qui a suivi le mouvement et, par discrétion, préfère ne pas donner son vrai prénom. Il témoigne combien « c’est dur de laisser un pays » et de tout recommencer en Israël, sa « terre d’exil » dont il ne parle pas la langue.

Ils font partie des 2170 Français (+96,9% en un an) à avoir fait en 2024 leur aliyah, la « montée » en Israël dans la tradition juive. Toute personne de confession juive, ainsi que les enfants et petits-enfants de juifs, peuvent bénéficier de la « loi du retour » et obtenir la nationalité israélienne.

Des personnes circulent à vélo dans une rue vide pendant la fête juive de Yom Kippour à Tel Aviv, le 11 octobre 2024. Yom Kippour, ou jour du Grand Pardon, qui commence au coucher du soleil le 11 octobre, est le jour le plus sacré du calendrier juif. (Photo SHARON ARONOWICZ/AFP via Getty Images)

« Changement dramatique » en France

Après l’attaque sans précédent du Hamas et le début de la guerre, « il y a eu un changement dramatique » en France, où vit la première communauté juive d’Europe (environ 400.000 membres estimés), « du jamais vu en 25 ans de métier », assure Ariel Kandel, directeur de l’association d’aide à l’intégration des juifs de France et des pays francophones Qualita.

Les manifestations pour dénoncer l’offensive israélienne de représailles dévastatrice dans la bande de Gaza, organisées en Europe et notamment en France, avaient été accusées par leurs détracteurs de complaisance vis-à-vis du Hamas, d’antisionisme virulent, voire d’antisémitisme.

La guerre à Gaza a aussi provoqué de vifs remous sur des campus universitaires aux États-Unis et ailleurs. Au total, Israël a accueilli 32.297 nouveaux immigrants en 2024, contre 47.200 l’année précédente, selon le ministère de l’Aliyah et de l’Intégration. La baisse est drastique (-39,9%) pour ceux venus de Russie, premier réservoir. Pour les États-Unis et le Canada, l’agence Nefesh B’Nefesh recense une hausse de 60% des demandes d’aliyah du 7 octobre 2023 au 6 octobre 2024.

À ce jour, « il y a eu plus de 4400 nouveaux » immigrants, la majorité a entre 18 et 33 ans, et 43% d’entre eux sont célibataires, explique Yael Katsman, de l’agence. Ils sont ingénieurs, professionnels de santé, de l’éducation, du droit, et environ 65% des familles sont orthodoxes.

« Vivre dans une société où je n’ai pas vraiment à m’inquiéter de l’antisémitisme »

« Je n’avais jamais envisagé déménager en Israël » mais « j’ai été effondré par le fait qu’une attaque aussi brutale ait lieu », résume depuis le New Jersey Aryeh Wiesel, joint par téléphone. « Je n’aurais non plus jamais imaginé que les gens soient pour le Hamas, et cela m’a simplement donné envie de vivre dans une société où je n’ai pas vraiment à m’inquiéter de l’antisémitisme », ajoute-t-il. D’ici l’été, ce diplômé en agriculture de 26 ans devrait partir pour Tel-Aviv, sans ses animaux de compagnie ni travail mais avec ses orchidées et « quelques connections ».

C’est une « situation douce-amère » mais une manière de « renforcer ses racines », raconte le jeune homme dont les grands-parents sont partis de Hongrie et Roumanie après la Shoah pour Israël, avant d’émigrer aux États-Unis. Marisa Douenias n’envisageait pas non plus « de vivre dans un autre pays ».

Cette Américaine de 34 ans élevée dans le judaïsme réformé a d’abord lutté en ligne contre l’antisémitisme. Puis, en juillet 2024, l’ex-consultante pour l’agence fédérale de santé publique a débarqué avec ses valises et le sentiment de participer « à la construction de l’État d’Israël ».

« J’étais déjà venue, donc j’avais une petite idée de ce qu’était la guerre. Mais je n’étais pas préparée » à ces nuits où « vous êtes réveillés par les sirènes » d’alerte anti-aérienne, dit-elle.

À ses yeux, « la seule chance » de sortir du conflit avec les Palestiniens est de « parvenir à une certaine coexistence ». « Quiconque parle d’un avenir sans juif ni musulman sur cette terre n’est pas sérieux, aucun des deux groupes n’ira nulle part », estime-t-elle. Mais la perspective de la guerre reste dans les esprits. « J’ai trois garçons. Je sais qu’ils vont faire l’armée. C’est vrai qu’en tant que maman, ça me traumatise un peu », dit Sonia. Mais, ajoute-t-elle, « j’ai fait ce choix de venir ici, donc je signe le contrat avec tout, les avantages et les inconvénients ».

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