Ah, le sucre… Il suffit d’une petite bouchée pour qu’il entre dans notre circulation sanguine et amène de l’énergie brute à notre corps. De nos jours, il est commun d’entendre des chercheurs comparer les qualités addictives du sucre à celle de la cocaïne.
Nous ne pouvons pas nous empêcher d’en manger. Nos corps sont programmés pour l’apprécier. Pensez-y : avez-vous déjà vu un nourrisson refuser une friandise ?
Sans surprise, le marché mondial du sucre et des autres sucreries représente plus de 100 milliards d’euros. Les marchés utilisant le sucre, comme les boissons, les confiseries, pâtisseries, l’hygiène buccale et les sirops médicalisés, le chiffrent quant à eux à près d’un trillion (1000 milliards) d’euros. Près de 75 % de toutes les produits alimentaires manufacturés utilisent une forme ou une autre de sucre raffiné, selon une étude publiée dans le Journal of the Academy of Nutrition and Dietetics.
Une startup israélienne vise ces marchés avec une solution plus saine. Le pari de cette entreprise est que notre attachement au sucre raffiné reste stable en terme de dosage, bien que les mises en garde des associations de santé sur une consommation excessive nous incitent quant à elles à la modération.
DouxMatok, qui veut dire double-sucrerie en hébreu, a créé une nouvelle forme de sucre ayant le même pouvoir sucrant avec moitié moins de calories. Il s’agit du même sucre, mais il est physiquement modifié pour optimiser la sensation de satiété de notre langue, de façon à ce que nous en consommions moins et préservions notre santé.
Pour fabriquer le sucre DouxMatok, la compagnie attache au sucre habituel, par une liaison covalente, une molécule de dioxyde de de silicium (une des substances les plus communes sur Terre) de la taille d’un micron, qui est tout à fait apte à la consommation.
Ceci augmente grandement la surface d’adhésion de la particule. Lorsque le sucre se dissout sur la langue, les papilles gustatives sont exposées à plus de goût sucré, entraînant par là notre contentement.
Cette technologie nous permettrait de continuer à manger le chocolat et les gâteaux que nous aimons, tout en expérimentant moins les effets secondaires indésirables du sucre ; parmi eux le gain de poids, l’obésité et le diabète de type 2.
Ce produit a déjà reçu son autorisation de mise sur le marché pour l’alimentation aux États-Unis et dans d’autres pays.
Avez-vous déjà essayé de compter le nombre de cuillères à café de sucre que vous ajoutez à votre café, ou combien votre barre chocolatée, vos truffes en chocolat ou vos cookies en contiennent ? La recommandation quotidienne de sucre a récemment été divisée par deux, à 10 % du nombre total de calories, ce qui donne 12 cuillères à café pour un adulte moyen consommant 2000 calories par jour.
Avec tout ce sucre autour de nous, nous avons vite fait d’en dépasser 12 cuillères à café. L’Américain moyen consomme par exemple plus de 22 cuillères à café de sucre par jour, selon l’American Heart Association.
Il se pourrait aussi que 12 cuillères à café soit bientôt trop. L’Organisation Mondiale de la Santé a récemment recommandé de réduire notre consommation de sucre à six cuillères à café par jour, ou 5 % du total du nombre total de calories.
Un sucre magique ?
Alors comment fonctionne le sucre DouxMatok ? Le Dr. Robert Margolskee, directeur et président du Monell Chemical Senses Center basé à Philadelphie, remarque que lorsqu’il s’agit du goût, la forme et la géométrie spatiale comptent.
Il compare le concept de DouxMatok au fait de prendre un morceau de sucre candi et à le pulvériser. « Mettez le sur votre langue et cela aura un goût très doux, » dit-il. Mangez le sucre candi tel quel et il ne sera probablement pas aussi doux.
Les êtres humains ont près de 10 000 papilles gustatives. La plupart sont sur la langue, mais certaines sont situées sur le palais et dans la gorge. Quand de la nourriture entre en contact avec nos cellules réceptrices, un message est envoyé à notre cerveau via des connections nerveuses.
Margolskee explique que pour toute nourriture, il y a une probabilité aléatoire de trouver un récepteur de goût, avec un facteur lié à la concentration.
Selon le fondateur de DouxMatok Eran Baniel, le sucre DouxMatok trompe le cerveau en lui faisant croire qu’il a consommé plus de sucre qu’en réalité.
Ce n’est bien sûr qu’une façon de voir les choses, mais Margolskee dit que DouxMatok n’est pas une tromperie. D’une perspective scientifique, il s’agirait même d’une évidence. « Si vous voulez limiter votre prise de sucre, commencez par ne pas avaler le sucre que vous ne sentez pas. »
L’entrée dans l’industrie alimentaire
DouxMatok a été fondée il y a deux ans par Baniel, un scientifique ayant travaillé dans le développement de produits pharmaceutiques. La compagnie est actuellement à la recherche d’une offre de capital-risque de série A1 pour intensifier la recherche, développer des applications culinaires, sécuriser la propriété intellectuelle, et viser plus de profit.
À la conférence d’investissement israélienne AgriVest 2015, Baniel a déclaré que la compagnie avait pu amener son produit sur le marché en 18 mois (avec un capital d’amorçage de 1,6 million d’euros).
Il a aussi présenté des résultats positifs d’analyses sensorielles, montrant que le sucre DouxMatok n’a pas d’arrière-goût, et présente une amertume légèrement inférieure à celle du sucre classique.
Les analyses sensorielles sont une méthode objective pour mesurer des différences dans l’apparence, la saveur, la texture et l’arôme. Ils sont aussi critiques pour déterminer le potentiel d’acceptation du consommateur, explique Margolskee.
Le plus grand défi auquel fait maintenant face la compagnie est de savoir si oui ou non son produit sera accepté par l’industrie agroalimentaire.
Parlant à la conférence Foodbytes à Brooklyn en avril, Baniel a annoncé avoir envoyé des échantillons à l’industrie alimentaire, et qu’il commençait à recevoir les résultats. Il sont positifs pour les yaourts et les céréales en Israël et en Europe, pour les biscuits et gâteaux au Royaume-Uni, et pour le jus de myrtilles aux USA.
Quand ils ont amené pour la première fois du sucre DouxMatox à un chocolatier de la grande distribution, le fabricant de chocolat est « devenu pâle comme un linge », la taille du chocolat ayant été réduite de 40%. Qu’est-ce qui va remplacer le sucre dans notre recette ? « Ils vont nous faire faire du remplissage, » s’exclame-t-il.
Bien que le sucre DouxMatok coûte autant ou moins à produire que du sucre classique, utiliser plus de cacao ou d’autres ingrédients pourrait être trop onéreux pour le chocolatier.
Près d’un an plus tard, le fabricant de chocolat a de nouveau contacté DouxMatok, selon Baniel, et voulait négocier. « Le rôle des substances de remplissage est complexe, » dit Baniel.
Alors que l’intérêt du consommateur quant à la taille des portions va en grandissant, certaines entreprises d’alimentation pourraient considérer les offres de DouxMatok sans avoir besoin de substances de remplissage.
Et dans le cas où l’industrie alimentaire voudrait réduire le sel ou utiliser d’autres formes de sucres comme l’aspartame, la saccharine, le sucralose (Splenda) ou encore le sirop de maïs à haute teneur en fructose (HFCS), le processus de DouxMatok fonctionne aussi pour ces substances.
Si DouxMatok peut percer dans l’industrie agroalimentaire et être accepté comme ingrédient d’alimentation, nous pourrions alors avoir affaire à la prochaine compagnie technologique milliardaire.
Boîte à infos : Comment l’arôme fonctionne-t-il ?
L’arôme est composé de trois éléments,et le goût est seulement un d’entre eux.
Le premier est composé des récepteurs de goût localisés principalement sur la langue et détectant les cinq goûts du sucré, acide, salé, amer et umami (savoureux).
En second vient le sens de l’odorat, sous la forme de 400 protéines réceptrices olfactives localisées principalement dans les voies supérieures du nez, travaillant à détecter les parfums émanant de la nourriture.
Un article de littérature médicale suggère qu’entre 75 et 95 % de ce que nous pensons devoir au goût, viendrait en fait de l’odeur.
Si vous avez un rhume sévère et que vos voies nasales sont bloquées, lorsque que vous mangez une fraise, vous pouvez en sentir le sucré, mais vous ne saurez pas qu’il s’agit d’une fraise. La fraise est en fait une odeur.
Le troisième élément est l’irritation chémoréceptrice, qui s’opère par le nerf trijumeau. Il s’agit d’un système de milliers de terminaisons nerveuses localisées dans le nez, la bouche, la gorge et les yeux.
Elle est responsable de la sensation de brûlure que nous ressentons lorsque que nous mangeons quelque chose d’épicé, comme le poivre ou le gingembre, ou des boissons gazeuses. Ces sensations peuvent être agréables en petites quantités, mais l’irritation chimique est en fait un système d’alarme servant à prévenir le corps de dangers potentiels.
Toutes les nourritures ingérées sont un stimuli chimique pour le corps. Cela enclenche une cascade d’événements cellulaires et moléculaires qui peuvent être convertis en signaux électriques qui sont dirigés vers le centre aromatique du cerveau pour identifier l’arôme.
L’arôme est quelque chose de bien plus complexe que ce que nous pouvons y penser au premier abord.
Version originale : This Startup Modified Sugar to Make the Brain Happy With Fewer Calorie
Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?
Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.