Ancien ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner a rejoint le géant chinois de l’ultra fast fashion Shein fin décembre. L’ancien ministre assure vouloir aider le groupe à « aller plus loin en matière d’impact social et environnemental », alors que la Chine utilise des opérations de greenwashing pour améliorer son image écologique.
Selon la Fédération française du prêt-à-porter féminin, il s’agit d’une tentative manifeste de lobbying visant à freiner les efforts législatifs en cours, alors qu’un texte encadrant la fast fashion doit être voté au Sénat.
En juin 2024, la Commission européenne a réclamé des informations à Shein afin de vérifier leur conformité aux règles européennes pour des produits ne respectant pas les normes sanitaires, et récemment, des députés britanniques se sont dits « horrifiés » par le manque de transparence du groupe chinois.
Christophe Castaner est le dernier d’une longue liste de personnalités politiques françaises recrutées par de grandes entreprises chinoises pour faire leur communication en France.
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Le recrutement controversé de Castaner par Shein
Comme plusieurs anciens ministres avant lui, Jean-Pierre Raffarin (Plastic Omnium, CGTN), Jean-Marie Le Guen (Huawei) ou encore Jean-Louis Borloo (Huawei), le géant chinois Shein s’achète la notorieté de Christophe Castaner pour redorer son image et utiliser son influence au sein de la classe politique française.
Le recrutement de l’ancien ministre de l’Intérieur est intervenu en décembre « à la veille d’un examen par le Sénat de la loi anti ultra fast fashion » a dénoncé la Fédération française du prêt-à-porter féminin, qui déplore “le soutien explicite ou implicite apporté à Shein par d’anciens responsables politiques. »
« Cet alignement témoigne d’une tentative manifeste de greenwashing de la part de cette entreprise, qui inonde le marché de vêtements de mauvaise qualité, et de lobbying visant à freiner les efforts législatifs en cours », accuse la fédération.
Une opération de greenwashing ?
Le géant asiatique Shein, spécialisé dans la vente en ligne de vêtements à très bas prix, a annoncé le 6 décembre la mise en place de comités stratégiques destinés à l’accompagner dans sa démarche de responsabilité sociétale (RSE).
Les trois premiers membres de ce premier comité régional, destiné à conseiller le groupe dans la zone Europe, Afrique, Moyen-Orient (EMEA), sont trois Français : l’ancien ministre de l’Intérieur Christophe Castaner, l’ex-secrétaire d’État aux droits des victimes Nicole Guedj et l’ancien patron de la fédération française de l’assurance, ex-dirigeant du Medef, Bernard Spitz.
Christophe Castaner est actuellement président du conseil de surveillance du port de Marseille-Fos et du conseil d’administration d’Autoroutes et Tunnel du Mont Blanc.
« L’engagement de ces figures publiques auprès d’une entreprise dont les impacts environnementaux et sociaux sont unanimement dénoncés constitue un signal alarmant à l’heure où des mesures concrètes sont attendues pour contrer les dérives de l’ultra fast fashion », estime la fédération française du prêt-à-porter féminin dans un communiqué.
Yann Rivoallan, président de la fédération estime que « nous ne pouvons pas laisser les intérêts d’entreprises comme Shein piétiner les efforts de toute une industrie pour adopter des pratiques responsables ». « Ces partenariats honteux entre des politiques et un géant destructeur ne doivent pas influencer notre avenir commun », ajoute-t-il.
Shein soupçonnée d’avoir recours au travail forcé
Shein, fondée en Chine en 2012 et basée à Singapour, est considérée comme un emblème des dérives sociales et environnementales de la mode à petits prix. En vendant des produits bon marché fabriqués principalement en Chine, Shein a connu une croissance explosive depuis leur entrée sur le marché européen, menaçant au passage des milliers d’emplois dans le secteur de la mode.
Selon un rapport du Congrès des États-Unis, intitulé « Fast Fashion et génocide des Ouïghours : Conclusions provisoires », publié en juin 2023, Shein est accusée d’avoir exposé les consommateurs à des produits fabriqués en Chine dans des camps de travaux forcés, dans leurs chaînes d’approvisionnement en coton en Chine.
Plus d’un million de Ouïghours et autres minorités musulmanes sont actuellement détenus dans des camps d’internement chinois, où ils sont soumis au travail forcé, à la torture, aux abus sexuels, à l’endoctrinement politique, à l’avortement forcé et à la stérilisation forcée, une persécution qualifiée de génocide par le gouvernement américain.
Shein accusé de détruire l’environnement
En novembre 2023, des députés français ont dénoncé les pratiques de l’entreprise chinoise de « fast fashion », qu’ils accusent d’être « l’emblème de la mode qui détruit l’environnement et les droits humains », après avoir engagé une procédure à son encontre.
« Chaque fois que l’on crée des objets jetables, on crée des êtres humains jetables », a déclaré le député PS Dominique Potier, qui a obtenu contre Shein la saisine du « point de contact national de l’OCDE », une instance adossée à l’Organisation de coopération et de développement économiques.
La procédure questionne plusieurs aspects de la chaîne de production de l’entreprise de vente en ligne. Parmi eux, « le respect par le groupe Shein des droits de l’homme », les conditions de travail de ses employés, mais également « les possibilités d’incidences négatives sur l’environnement » ainsi que sur « la santé des consommateurs », peut-on lire dans un communiqué publié par le point de contact de l’OCDE.
En juillet 2023, le gouvernement avait assuré « combattre avec détermination » le modèle économique de la fast fashion « destructeur pour notre planète », pointant du doigt la « responsabilité extrêmement forte » de Shein.
L’Assemblée vote des mesures de pénalités contre la fast fashion
L’Assemblée nationale a voté en mars à l’unanimité des mesures visant à freiner la fast fashion, avec une interdiction de la publicité pour la vente de vêtements à prix cassés inondant le marché et un « malus » environnemental renforcé pour les rendre moins attractifs.
La proposition de loi devait être examinée en décembre par le Sénat. Ce texte fera de la France « le premier pays au monde à légiférer pour limiter les dérives de l’ultra fast-fashion », avait salué l’ancien ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu.
Dans un contexte de baisse du pouvoir d’achat, la saturation du marché par des vêtements peu coûteux, constamment renouvelés et massivement importés, a ébranlé le secteur, où les fermetures de magasins et les redressements judiciaires se multiplient.
La députée Horizons Anne-Cécile Violland a pointé l’impact environnemental : « L’industrie textile est la plus polluante, elle représente 10% des émissions de gaz à effet de serre », a-t-elle souligné, mentionnant aussi la pollution des eaux.
Avec dans le viseur, des pratiques de production intensive poussées à leur paroxysme par l’emblématique entreprise chinoise Shein et ses « 7200 nouveaux modèles de vêtements par jour » en moyenne.
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