La Suède, dont l’image s’est fortement dégradée à l’étranger après plusieurs profanations du Coran autorisées sur son sol, a décidé jeudi de relever son niveau d’alerte terroriste, estimant que la menace d’attentats « persistera pendant longtemps » dans le pays.
« J’ai décidé aujourd’hui de relever le niveau de la menace terroriste d’un niveau élevé à un niveau critique », c’est-à-dire à 4 sur une échelle de 5, a dit la cheffe du Service de la sûreté suédoise (Säpo), Charlotte von Essen, lors d’une conférence de presse, soulignant que le pays était actuellement une « cible prioritaire » de potentiels attentats. « Au cours de l’année, la menace qui pèse sur la Suède s’est progressivement aggravée », a-t-elle ajouté, faisant remarquer que sa décision n’était pas liée « à un événement spécifique ». Les renseignements suédois conseillent à la population de « continuer à vivre comme à leur habitude » et de faire particulièrement attention à la désinformation et aux rumeurs.
C’est la première fois en sept ans – le niveau d’alerte avait été relevé à 4 pendant quelques mois entre le 18 novembre 2015 et le 2 mars 2016 – que la Suède rehausse son niveau d’alerte. À l’époque, la décision avait été prise, entre autres, car le groupe de l’organisation terroriste État Islamique proférait régulièrement des menaces terroristes contre le continent européen.
« L’image d’un pays hostile aux musulmans »
Ces derniers mois, la situation sécuritaire du pays nordique, habituellement placide, s’est particulièrement dégradée après des profanations du Coran sur son sol. Fin juillet, deux hommes avaient mis le feu à un exemplaire du Coran devant le Parlement à Stockholm, réitérant un geste déjà réalisé un mois auparavant devant la plus grande mosquée de la capitale suédoise. Ces actions ont suscité de vives tensions dans le monde musulman, et l’ambassade de Suède à Bagdad a été incendiée avant d’être rapatriée temporairement à Stockholm.
Ces incidents « ont contribué à donner à la Suède l’image d’un pays hostile aux musulmans », a déclaré Ahn-Za Hagström, directrice du Centre national d’évaluation de la menace terroriste, lors de la conférence de presse. L’hostilité exprimée envers la Suède avait alors mené le pays à intensifier ses contrôles aux frontières.
La semaine dernière, un cocktail Molotov a été lancé contre l’ambassade suédoise à Beyrouth, sans que le projectile n’explose. Et au cours du week-end, le groupe terroriste Al-Qaïda a appelé à commettre des attaques terroristes dans le pays scandinave.
Plusieurs pays ont en outre mis à jour leurs recommandations aux voyageurs souhaitant se rendre en Suède. Dimanche, la diplomatie britannique a affirmé que les attaques terroristes y étaient aujourd’hui « très probables », relevant que les autorités suédoises avaient déjà « réussi à déjouer un certain nombre de projets d’attentats et procédé à un certain nombre d’arrestations », des affirmations non confirmées côté suédois. Les États-Unis avaient également conseillé aux voyageurs le 26 juillet d’exercer une « prudence accrue » en Suède à cause du risque de « terrorisme ».
Les autorités suédoises réfléchissent aux moyens de limiter l’organisation de manifestations prévoyant de brûler le Coran tout en respectant la liberté d’expression. Mais la majorité parlementaire semble aujourd’hui hostile à un tel changement.
Des allégations d’enlèvements d’enfants musulmans
L’image de la Suède comme hostile aux musulmans ne date pas d’hier : début 2022, les autorités suédoises, accusées d’« enlèvements » systématisés d’enfants musulmans à leur famille, avaient dénoncé une vaste campagne de désinformation en ligne. Selon ces allégations, devenues rapidement virales, le pays nordique enlèverait des enfants musulmans pour les confier à des familles chrétiennes, dans lesquelles ils seraient forcés de boire de l’alcool et manger du porc.
Interrogé par l’AFP en février 2022 à ce sujet, le ministre de l’Immigration avait nié, pointant du doigt « des forces malveillantes qui veulent exploiter la frustration (…) et semer la défiance et la division dans la société suédoise ». Ces mêmes « forces » ont été évoquées jeudi. « Nous savons que les groupes extrémistes et les puissances étrangères utilisent volontiers ce type de situation dans laquelle se trouve aujourd’hui la Suède », a noté Susanna Trehörning, cheffe adjointe en charge du contre-terrorisme à Säpo.
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