Combien un député coûte-t-il au contribuable ?

Par Etienne Fauchaire
13 juillet 2024 17:01 Mis à jour: 13 juillet 2024 17:01

Les 30 juin et 7 juillet dernier, les Français se sont rendus aux urnes pour élire leurs 577 députés à l’Assemblée nationale. Les représentants de la Nation nouvellement élus entameront la XVIIe législature à partir du jeudi 18 juillet, selon le calendrier institutionnel. Un timing opportun pour mettre un coup de projecteur sur les coulisses dorées de l’Assemblée et se pencher sur le montant que coûte un député au contribuable.

458.243 euros d’indemnité parlementaire sur une législature

Les membres de la chambre basse du Parlement ne perçoivent pas de salaire : on parle d’indemnité parlementaire, puisqu’ils sont autorisés à poursuivre une activité salariée à temps partiel à côté de leur mandat.

Augmentée le 1er janvier 2024, celle-ci s’élève désormais, selon le site de l’Assemblée nationale, à 7637,39 euros bruts mensuels, et comprend trois principaux éléments : l’indemnité parlementaire de base, indexée sur le traitement des fonctionnaires occupant les plus hauts postes de l’État (5931,95 euros), l’indemnité de résidence (177,96 euros) et l’indemnité de fonction (1 527,48 euros).

Après retenues sur indemnités, des prélèvements obligatoires principalement liés aux assurances sociales, cette rémunération revient, nette, à 5953,34 euros par mois. Des indemnités spéciales bénéficient également aux titulaires de certaines fonctions (présidents, questeurs, vice-présidents…).

1.024.080 euros de frais de mandat et de secrétariat sur une législature

Depuis janvier 2024, les députés peuvent également compter sur une indemnité mensuelle de frais de mandat, une allocation mensuelle de 5950 euros pour couvrir les dépenses liées à leur fonction non prises en charge par l’Assemblée nationale : location d’une permanence, déplacements, correspondance, frais de communication, de représentation (qui peuvent également inclure la visite chez le coiffeur ou bien l’achat de costumes).

Chaque dépense doit néanmoins faire l’objet d’un justificatif et chaque élu sera contrôlé au moins une fois par législature.

Pour les assister dans leur fonction, les élus disposent par ailleurs d’une enveloppe s’élevant à 11.118 euros par mois qui leur permet de recruter jusqu’à cinq collaborateurs. À ce titre, le député a la qualité d’employeur. C’est lui qui recrute, licencie, fixe les conditions de travail et le salaire de son personnel.

1.137.000 euros de dotation sur une législature pour le taxi et les moyens de communication

Les parlementaires voient leurs déplacements défrayés par le palais Bourbon. Pour les déplacements à Paris et en région parisienne, « l’Assemblée dispose d’un parc d’une douzaine de voitures avec chauffeur que les députés peuvent utiliser, dans la mesure de leur disponibilité, pour leurs déplacements liés à leur mandat parlementaire et effectués à partir du palais Bourbon dans Paris ou à destination des aéroports ».

Toutefois, tous les déplacements des députés en taxi ou en VTC, en autopartage ou en vélopartage, en France ou à l’étranger, dans le cadre de leur mandat, sont remboursés sur présentation d’un justificatif de dépense, dans la limite du plafond de la dotation matérielle des députés. Pour un député métropolitain, cette dotation annuelle s’élève à 18.950 euros. Les sommes non consommées peuvent être reportées d’une année sur l’autre.

Cette enveloppe permet également de prendre en charge d’autres dépenses telles que l’achat d’équipement informatique et téléphonique, les frais de téléphonie, ou encore les impressions de documents.

Autres frais de circulation pris en charge

En ce qui concerne les voyages en avion, l’Assemblée nationale prend en charge chaque année pour les députés métropolitains 80 vols entre Paris et leur circonscription, à condition qu’il existe une liaison aérienne régulière. De plus, elle finance douze trajets annuels vers n’importe quelle destination en France métropolitaine, que ce soit pour le député ou son conjoint.

En parallèle, les trajets sur le réseau métropolitain de la SNCF, en première classe, sont également défrayés, de façon illimitée.

Enfin, les députés ont droit à une carte nominative leur donnant l’accès illimité au réseau de transport parisien de la RATP (86,40 euros par mois).

Avantages matériels

Chaque député dispose d’un bureau individuel dans l’enceinte du palais Bourbon, équipé d’un équipement informatique et téléphonique pour eux-mêmes et un collaborateur.

Par ailleurs, 242 députés bénéficient d’un bureau doté d’un lit et d’un cabinet de toilette. Pour les autres, à l’exception de ceux élus à Paris ou dans les départements de la petite couronne, ils peuvent accéder à l’une des 51 chambres de la résidence de l’Assemblée nationale. « Si celle-ci est complète quand l’Assemblée siège, ils peuvent bénéficier d’un remboursement partiel de leurs nuitées d’hôtel à Paris. Le prix de la nuitée, taxe de séjour incluse, est pris en compte dans la limite de 200 euros. Les frais de petit-déjeuner et de parking sont remboursés intégralement, en sus de ce plafond », est-il indiqué sur le site de la chambre basse.

Chômage et retraite des députés

En 2018, un fonds spécifique a été mis en place pour assurer le chômage des députés, géré par la Caisse des Dépôts et consignations. L’allocation sociale des élus est aujourd’hui alignée sur le régime des salariés : elle correspond à 57 % du montant de l’indemnité parlementaire (4353,31 euros par mois).

Pour avoir droit à l’allocation, une cotisation d’au moins six mois est requise. La période d’indemnisation ne peut excéder 18 mois, mais peut être portée à 22,5 mois pour les anciens députés âgés de plus de 53 ans, et à 27 mois pour ceux de 55 ans et plus.

Cette allocation est financée par une contribution de tous les députés en exercice, qui s’élève à 1 % de leur indemnité parlementaire nette. Pour la percevoir, il ne faut pas être démissionnaire, ne pas avoir continué à occuper un poste de fonctionnaire et ne pas avoir atteint l’âge légal de départ à la retraite.

Enfin, pour leur retraite, après cinq ans de mandat, le montant net de la pension d’un député s’élève actuellement à 684,38 euros, selon Contribuables Associés. Depuis le 1ᵉʳ janvier 2020, le taux de cotisation sur l’indemnité est de 10,85 %.

Quel revenu pour les élus exerçant des activités parallèles ?

En vertu de la loi contre le cumul des mandats, tout député est interdit d’exercer une fonction exécutive locale : maire, adjoint au maire, président ou vice-président de conseil régional ou départemental, ou président ou vice-président de métropole.

Cependant, un député peut être élu au sein d’un conseil municipal, départemental ou régional, à condition de ne pas exercer de fonction exécutive, en tant que conseiller municipal, départemental ou régional.

Les indemnités qu’il touche pour un mandat local sont plafonnées : elles ne peuvent dépasser plus d’une fois et demie son indemnité parlementaire de base, soit 2910,02 euros par mois.

En juin 2022, parmi les 569 députés, la moitié cumulait un autre mandat. Dans près de 40 % des cas, il s’agissait d’un mandat de conseiller municipal, et dans 20 % des cas, d’un mandat de conseiller régional, rapportait France Inter.

De plus, un député peut augmenter ses revenus en travaillant dans le secteur privé. Cependant, pour les activités de conseil, de consultant ou d’avocat, il n’est autorisé à exercer ces professions qu’à condition que cela s’inscrive dans la poursuite d’une activité exercée avant le mandat. Elles doivent également être pratiquées sans tirer avantage du statut de député.

En 2022, selon la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, 17 % des députés avaient déclaré exercer au moins une activité professionnelle en parallèle de leur mandat, dont la majorité (81 %) dans le secteur privé.

De quoi favoriser l’absentéisme, régulièrement pointé du doigt ?

Sanctions pour absentéisme

En France, la critique sur l’absentéisme de certains représentants de la Nation, manifestement affairés ailleurs, revient régulièrement dans la presse. Sont-ils sanctionnés ou passent-ils à travers les mailles du filet ?

Le règlement du palais Bourbon prévoit bien des sanctions pour les élus trop souvent hors de l’Hémicycle. Il existe une première disposition, celle de l’article 159, toutefois jamais encore appliquée à ce jour. « Le fait d’avoir pris part, pendant une session, à moins des deux tiers des scrutins publics auxquels il a été procédé en application du 3° de l’article 65, ou de l’article 65‑1, entraîne une retenue du tiers de l’indemnité de fonction pour une durée égale à celle de la session ; si le même député a pris part à moins de la moitié des scrutins, cette retenue est doublée. »

Une autre sanction est prévue pour ceux qui s’absentent plus de deux fois par mois en commission. Ceux-là risquent une réduction de 25 % de leur indemnité de fonction, sauf en cas d’exceptions justifiées. « Au‑delà de deux absences mensuelles et réserve faite des réunions de commission se tenant alors que l’Assemblée tient séance ou de la présence au même moment du député dans une autre commission permanente, chaque absence d’un commissaire à une commission convoquée, en session ordinaire, lors de la matinée réservée aux travaux des commissions en application de l’article 50, alinéa 3, donne lieu à une retenue de 25 % sur le montant mensuel de son indemnité de fonction », dispose l’article 42 du règlement de l’Assemblée nationale. L’indemnité de fonction d’un député étant de 1527,48 euros bruts mensuels, cela équivaut, aujourd’hui, à 382 euros.

En avril 2019, Aurélien Taché, alors député de La République en marche (LREM), avait été sanctionné pour quatre absences non justifiées lors de la Commission des affaires sociales. Son indemnité parlementaire avait donc été réduite de 25 %, conformément au règlement. L’ancien macroniste a ensuite été réélu sous les couleurs de la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes) lors des élections législatives de 2022, et est parvenu à conserver son siège lors du dernier scrutin, sous l’étiquette du Nouveau Front populaire. Appartenant désormais à La France insoumise, celui-ci s’est dernièrement illustré en lançant un « fermez-la » sur X le 12 juillet à Jacques Attali, alors que ce dernier dénonçait « un programme absurde imposé au reste de la gauche » par LFI.

Incohérence

Critiqué pour ses fréquents dérapages, le mouvement d’extrême gauche, qui se veut fer de lance contre la fraude fiscale et pour la justice sociale face « aux riches qui coûtent trop cher », l’est tout autant sur ses contradictions. Ainsi, le député Carlos Martens Bilongo, réélu, fait l’objet d’une enquête pour blanchiment de fraude fiscale. L’Insoumis, propriétaire de deux appartements, est également accusé d’avoir bénéficié, après son élection en juin 2022, d’un logement social à Villiers-le-Bel, qu’il sous-louait à l’une de ses sœurs.

De la même façon, l’ancienne députée LFI Rachel Kéké, battue au dernier scrutin, s’était retrouvée au cœur de la tourmente en septembre 2023 après les révélations indiquant qu’elle vivait également dans un logement social à Chevilly-Larue, malgré son mandat. Une « nouvelle polémique des fachos », avait alors dénoncé Jean-Luc Mélenchon, qui estimait, pour sa part en 2018, « ne pas être si bien logé » dans son appartement à près d’un million d’euros dans le très prisé Xe arrondissement de Paris.

Dans la foulée, l’élue à l’Assemblée Danièle Obono avait, elle aussi, déploré que les députés ne perçoivent pas une « indemnité suffisante » pour se loger, se voyant alors qualifiée de « totalement hors sol » par l’élu parisien LR Pierre Liscia.

À titre de comparaison, selon les derniers chiffres de l’Insee (2022), les salariés du secteur privé perçoivent en moyenne 3466 euros bruts par mois, soit un revenu net de 2630 euros en équivalent temps plein, tandis que les travailleurs du secteur public, fonctionnaires ou non, empochent en moyenne 2430 euros nets par mois, selon les données de 2021.

Si les cadres touchent en moyenne environ 4490 euros nets mensuels, les employés reçoivent environ 1880 euros et les ouvriers 1940 euros. Chez les fonctionnaires, le salaire moyen avoisine les 2500 euros nets par mois, et celui des autres agents de la fonction publique, à l’exclusion du personnel médical, est d’environ 1990 euros.

Soutenez Epoch Times à partir de 1€

Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?

Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.