ANALYSES

Comment l’Italie est devenue le bon élève de l’Europe sur la croissance, l’immigration et les relations internationales

mars 6, 2025 6:28, Last Updated: mars 6, 2025 15:00
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L’Italie a fait preuve d’une rigueur budgétaire inédite en 2024, avec un déficit public à 3,4 % du produit intérieur brut (PIB), un ratio inférieur aux prévisions de la coalition conservatrice dirigée par Giorgia Meloni, qui tablait sur 3,8 % du PIB, après un déficit de 7,2 % en 2023.

La croissance économique a également été revue à la hausse par l’Institut national des statistiques (Istat), l’Italie a vu son PIB augmenter de 0,7 % en 2024. Cela se traduit par un excédent de près de 10 milliards d’euros, soit 0,44 % du PIB, très supérieur à l’engagement de Rome pris à Bruxelles. L’Italie se montre ainsi plus vertueuse que la France, autre pays épinglé par Bruxelles pour la dérive de ses déficits.

En un peu plus de deux ans, la Première ministre Giorgia Meloni a hissé l’Italie au 4e rang des exportateurs mondiaux depuis son élection avec une coalition des droites. Le chômage est à son plus bas niveau historique avec un record d’emplois en CDI (+ 700.000 en 2024) et, promesse de campagne, une immigration illégale qui a diminué de 64 %.

Contrairement à son allié, le Premier ministre hongrois Viktor Orban, Giorgia Meloni a réussi à s’imposer comme interlocutrice de la présidente de la Commission Ursula von der Leyen, notamment grâce à son positionnement pro-ukrainien. C’est une des seules dirigeantes européennes dont le parti a remporté les élections européennes de juin 2024, ce qui permet de renforcer son influence à Bruxelles.

La Première ministre italienne est aussi une interlocutrice privilégiée de Donald Trump en Europe, après avoir été la seule dirigeante européenne à avoir été invitée à l’investiture du président américain, ce qui a renforcé son influence au sein du G7.

L’Italie se montre plus vertueuse que prévu en 2024

« Les finances publiques se portent mieux que prévu », s’est félicité le ministre de l’Économie Giancarlo Giorgetti. Cependant, « le défi sera désormais la croissance dans un contexte très problématique qui n’est pas seulement italien mais qui concerne toute l’Europe”, a-t-il nuancé.

Rome s’est engagé à ramener le déficit public dès 2026 à 2,8 % du PIB, en dessous du plafond de 3 % fixé par le pacte de stabilité européen. Visée comme la France par une procédure européenne pour déficit public excessif, l’Italie a su redresser ses comptes et réduire sa dette publique qui frôle les 3000 milliards d’euros.

Giorgia Meloni avait promis un budget 2024 sobre et sans excès, décidée à serrer la vis afin de donner des gages sur la rigueur des comptes à Bruxelles. Le pari a été tenu avec des recettes fiscales qui ont augmenté de 3,7 % en 2024 et les dépenses, qui s’étaient accrues de 4,8 % en 2023, ont diminué de 3,6 %, selon l’Istat.

Pour le président fondateur d’Italy-France Group, Edoardo Secchi , »l’Italie a renoué avec la croissance, après 16 ans d’attente », a-t-il déclaré sur Epoch Times. « Je dirais que grâce à Giorgia Meloni, mais surtout aux réformes menées par son prédécesseur, Mario Draghi, l’Italie se porte mieux » a-t-il ajouté.

La nouvelle discipline budgétaire du gouvernement italien

Le gouvernement italien de Giorgia Meloni s’était donné des objectifs ambitieux de discipline budgétaire pour diminuer son déficit.

Ces engagements figurent dans un plan de redressement des comptes publics sur sept ans. Le plan italien de réduction des déficits « adopte une ligne sérieuse, prudente et responsable et s’inscrit dans la continuité de l’action que le gouvernement mène depuis ses débuts », assure le ministre de l’Économie Giancarlo Giorgetti.

À la recherche de nouvelles ressources, Rome a sollicité une « contribution de solidarité » auprès des entreprises ayant engrangé de gros bénéfices, comme les banques, les assurances ou encore les groupes énergétiques. Pas question toutefois d’instaurer une nouvelle « taxe sur les surprofits » des banques, assure le ministre de l’Économie, qui a négocié avec elles des moyens de contribuer volontairement aux finances publiques.

Giorgia Meloni s’était attiré les foudres du monde des affaires en août 2023 avec une taxe de 40 % sur les « surprofits » des banques. Après un mouvement de panique à la Bourse de Milan, le gouvernement avait fait marche arrière et nettement édulcoré son projet pour se diriger vers une participation volontaire.

Des perspectives de croissance conditionnées par le contexte international

L’activité de l’agriculture, la sylviculture et la pêche a connu en 2024 une hausse de 2 %. Celle de la construction s’est accrue de 1,2 % et celle des services de 0,6 %.

Gros point noir, la production industrielle a chuté de 3,5 % l’an dernier, dans un contexte de crise du secteur manufacturier. Quant au commerce extérieur, les importations ont reculé de 0,7 % et les exportations ont progressé de 0,4 %.

Face à la menace d’une hausse des droits de douane américains et la récession qui frappe l’Allemagne, son principal partenaire commercial, le gouvernement Meloni se montre prudent pour l’avenir.

« Pour 2025 et 2026, nous devrons certainement mettre à jour les prévisions macroéconomiques, nous le faisons chaque année, nous devons le faire d’autant plus maintenant », a prévenu le ministre de l’Économie Giancarlo Giorgetti. Pour 2025, le gouvernement de Giorgia Meloni prévoit pour le moment une croissance de 1,2 % et pour 2026 une hausse du PIB de 1,1 %.

Interrogée sur la réponse à donner à la politique protectionniste de l’administration Trump, Giancarlo Giorgetti a indiqué qu’elle « peut être bilatérale », prenant le contrepied de Bruxelles qui prône une action unie de ses 27 États membres.

« La Commission exerce son rôle et doit le faire. Ce que je remarque, c’est que chaque pays de l’UE agit également pour son propre compte. C’est un fait », a-t-il fait valoir.

Le succès de la politique migratoire sous l’ère Meloni intéresse l’UE

L’ouverture de centres d’accueil pour migrants en Albanie décidée par la Première ministre italienne Giorgia Meloni s’inscrit dans sa politique visant à enrayer l’immigration illégale.

Arrivée au pouvoir en octobre 2022, Giorgia Meloni s’est concentrée sur les trafiquants qui organisent les départs des côtes nord-africaines, notamment de Libye et de Tunisie, vers l’Italie. Rome finance et forme les garde-côtes libyens et italiens dans le cadre d’une initiative européenne pour intercepter et renvoyer les migrants cherchant à traverser. Giorgia Meloni a estimé que des investissements européens en Afrique permettront de ralentir les départs.

Rome a aussi pris pour cible les ONG de secours aux migrants en Méditerranée. Selon Giorgia Meloni, les navires des ONG encouragent par leur présence les départs de migrants, et elle les accuse d’être financées par les trafiquants.

En parallèle, le gouvernement a fortement accru le nombre de visas de travail pour les ressortissants hors de l’UE, notamment dans les secteurs de l’agriculture et du tourisme, tout en simplifiant les procédures. Giorgia Meloni a aussi promis des réformes pour éviter que des réseaux criminels exploitent des failles dans le système.

Devant ces résultats, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a déclaré que l’UE devrait étudier davantage l’idée de « centres de retour » de migrants en dehors de ses frontières, affirmant qu’elle pourrait « tirer des leçons » de l’expérience italienne.

Depuis le début de 2024, 54.129 migrants sont arrivés sur les côtes italiennes, contre 140.481 au cours de la même période l’année dernière, selon le ministère de l’Intérieur. L’agence européenne Frontex a déclaré que les traversées irrégulières des frontières avaient diminué de 64 % de janvier à septembre en Méditerranée centrale.

Giorgia Meloni bien placée dans les relations avec Trump

Forte d’une soirée à Mar-a-Lago, d’une invitation à l’investiture de Donald Trump et d’un bon rapport avec Elon Musk, Giorgia Meloni apparaît comme la dirigeante européenne d’importance la plus proche du président des États-Unis.

Par conséquent, Giorgia Meloni pourrait être un éventuel « pont » entre la Maison-Blanche et l’UE, alors qu’elle avait déjà su construire une relation solide avec le président sortant Joe Biden, qui avait salué son soutien à Kiev face à l’invasion russe.

Après sa rencontre avec Donald Trump qui l’a qualifiée de « femme fantastique », elle a affirmé qu’ils étaient « prêts à travailler ensemble », minimisant notamment ses sorties sur le Groenland et le canal de Panama, destinées selon elle à la Chine.

« Giorgia Meloni a de meilleures relations avec Trump que tout autre dirigeant européen [important]. Cependant, je ne parlerais pas de relation spéciale », estime Teresa Coratella, du groupe de réflexion European Council on Foreign Relations.

« Nos adversaires espèrent que le président Trump s’éloignera de nous, mais le connaissant comme un dirigeant fort et efficace, je parie que ceux qui espèrent des divisions se tromperont », avait déclaré Giorgia Meloni lors de la CPAC en février, sur fond de dissension entre l’UE et les États-Unis.

Giorgia Meloni « remplit un grand vide dans le débat européen actuel sur l’attitude à tenir vis-à-vis de Trump ou d’Elon Musk », alors que l’UE est à la peine pour discuter avec Trump et les membres de son administration.

Trump a en effet mis en avant son « excellente relation » avec le président français Emmanuel Macron, mais les deux hommes sont à l’opposé sur l’échiquier politique. Quant au Premier ministre nationaliste hongrois Viktor Orban, il partage les idées de Trump mais est à couteaux tirés avec Bruxelles.

Cependant, quatrième exportateur mondial, l’Italie pourrait être l’un des pays européens les plus touchés par l’augmentation des tarifs douaniers entre l’UE et les États-Unis, à moins d’un accord bilatéral.

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