Crise au Liban: réunion du gouvernement après des manifestations

Par Epoch Times avec AFP
12 juin 2020 14:19 Mis à jour: 12 juin 2020 14:31

Le gouvernement au Liban tenait vendredi une réunion d’urgence consacrée à l’effondrement de la monnaie nationale, après une nuit de manifestations contre l’attentisme des autorités face au naufrage économique.

La forte dépréciation de la livre libanaise s’est accompagnée ces derniers mois d’une explosion de l’inflation, sans oublier les fermetures de commerces et les licenciements massifs.

Ces difficultés économiques ont été l’un des catalyseurs d’un soulèvement inédit, déclenché en octobre 2019 pour dénoncer une classe politique quasi-inchangée depuis des décennies et accusée de corruption et d’incompétence.

En réaction à l’effondrement de la livre et de leur pouvoir d’achat, les Libanais sont descendus dans la rue jeudi soir, brûlant des pneus et bloquant des routes dans plusieurs villes y compris dans la capitale Beyrouth, jusque tard dans la nuit.

-Un homme balaie le verre à l’extérieur de la succursale locale d’une banque libanaise après qu’elle a été vandalisée par des manifestants, sur la place al-Nour dans la ville portuaire du nord du Liban, Tripoli, le 12 juin 2020. Photo par IBRAHIM CHALHOUB / AFP via Getty Images.

Ils ont crié leur colère contre le gouverneur de la Banque centrale Riad Salamé, critiqué pour son incapacité à enrayer la dépréciation, et contre le gouvernement de Hassan Diab qui a succédé en janvier à celui de Saad Hariri poussé à la démission par le mouvement de contestation.

« Riad Salamé, Game Over », a titré le quotidien Al-Akhbar, proche du puissant mouvement chiite armé Hezbollah, qui domine la politique libanaise. « Révolution de la faim », a écrit en Une le quotidien Al-Joumhouria.

Réunion du gouvernement

M. Diab a entamé dans la matinée une « réunion urgente » de son gouvernement, en présence de M. Salamé et d’une délégation du syndicat des bureaux de change, selon l’agence de presse étatique ANI.

Une autre réunion du gouvernement se tiendra à la présidence de la République dans l’après-midi.

M. Salamé est engagé dans un bras de fer inédit avec le gouvernement, et selon des experts le Hezbollah cherche à l’évincer.

Le gouverneur de la Banque centrale est aussi fustigé par les manifestants pour des politiques financières qui ont favorisé un endettement excessif de l’Etat, au profit disent-ils des politiciens et des banques.

Celles-ci ont aussi provoqué l’ire de la population après avoir imposé des restrictions draconiennes sur les retraits en dollars ou les transferts à l’étranger.

-Un manifestant libanais anti-gouvernement lève les bras devant une structure en bois en feu lors d’une manifestation contre les conditions économiques désastreuses au centre-ville de Beyrouth, le 11 juin 2020. Photo par ANWAR AMRO / AFP via Getty Images.

« Plusieurs courants participant aux rassemblements veulent renverser le gouverneur de la Banque centrale et le tenir responsable du problème financier », souligne le politologue Imad Salamey. « Le Hezbollah cherche à changer le gouverneur de la Banque centrale. »

Dans la nuit, des partisans du Hezbollah, d’ordinaires hostiles à la contestation, ont rallié les rassemblements.

Négocier avec le Fonds monétaire international (FMI)

Jeudi, la livre libanaise a atteint sur le marché parallèle le seuil historique des 5.000 livres pour un dollar, selon des changeurs.

Des médias locaux ont même évoqué un taux de 6.000 livres pour un dollar, alors qu’officiellement la monnaie nationale est indexée depuis 1997 sur le billet vert au taux fixe de 1.507 livres pour un dollar.

La Banque centrale a toutefois démenti les informations « sans fondement » sur « des taux de change à des niveaux éloignés de la réalité ».

Vendredi, des manifestants ont brièvement bloqué plusieurs autoroutes, notamment celle reliant la capitale aux régions du nord, avant leur réouverture par l’armée.

Les autorités libanaises négocient avec le Fonds monétaire international (FMI) pour débloquer des aides financière, sans lesquelles le pays ne pourra pas enclencher la relance économique.

45% de la population vit sous le seuil de pauvreté

La crise économique est la plus grave depuis la fin de la guerre civile (1975-1990). Le chômage touche plus de 35% de la population active et plus de 45% de la population vit sous le seuil de pauvreté, selon le ministère des Finances.

Déclenché le 17 octobre 2019, le soulèvement a vu certains jours des centaines de milliers de Libanais dans la rue crier leur exaspération, dénonçant la défaillance des services de base et une dégradation des conditions de vie.

Face aux « lourdes pertes » et à « l’effondrement du pouvoir d’achat », l’association des commerçants de Tripoli a appelé à une « grève générale » vendredi avec la fermeture de tous les commerces de la ville.

 

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