Ce samedi 17 juin, à l’occasion de la victoire du Stade toulousain contre les joueurs de la Rochelle en Top 14, le chef de l’État, entouré des joueurs vainqueurs dans leur vestiaire, s’est laissé aller en buvant une bière corona cul-sec. Même si Emmanuel Macron nous a habitués à des comportements excentriques depuis sa première campagne présidentielle en 2016-2017, divisant ses adversaires, intellectuels et les Français, on peut s’interroger sur les motivations derrière les mots et la posture affichés par le président.
Emmanuel Macron : une attitude qui détonne en politique
Cela serait peu dire d’affirmer que l’actuel locataire de l’Élysée n’en est pas à son premier coup d’éclat. Depuis 2017, ce dernier a multiplié les extravagances dirons-nous, se manifestant par des propos politiquement incorrects ou abracadabrants ou encore des participations à des évènements assez éloignés de la fonction présidentielle. Rappelons-nous le débat de l’entre-deux tours en mai 2017, répondant à la candidate de l’ex-Front National, Marine le Pen, il qualifia son programme de « poudre de perlimpinpin ». Quelques mois après son élection, en septembre de la même année, en marge d’un discours à Athènes et en plein débat sur la réforme du code du travail, le président de la République avait déclaré : « je ne céderai rien aux fainéants », propos qui avait suscité de vives réactions de la part de toute la classe politique mais aussi fait couler beaucoup d’encre. « Je traverse la rue et je vous trouve un emploi ». Voilà ce qu’avait affirmé un an plus tard, Emmanuel Macron, en s’adressant à un jeune en recherche de travail, avant de surenchérir dans le politiquement incorrect en juin 2018 en pleine préparation d’une intervention, fustigeant le « pognon de dingue dans les minimas sociaux ». Dernière sortie choc du président, le 24 mai dernier en conseil des ministres, il a comparé la montée des violences au sein de la société à un « processus de décivilisation ».
Au niveau de la participation dans lesquels la présence d’un chef d’État est inattendu, on ne peut manquer de citer l’interview du président de la République par les célèbres youtubeurs McFly et Carlito en mai 2021, au cours duquel Emmanuel Macron a notamment dû participer à un « concours d’anecdotes ».
Des réactions mitigées à ces comportements
Bien sûr, comme écrit plus haut, ces comportements d’Emmanuel Macron depuis 2017 n’ont pas manqué de faire réagir, aussi bien la classe politique que les médias ou les intellectuels. En réaction à la polémique des « fainéants » en septembre 2017, le chef de file des insoumis, Jean-Luc Mélenchon avait alors tweeté ironiquement : « Abrutis, cyniques, fainéants, tous dans la rue le 12 et 23 septembre ! ». « Décidément chez Macron l’insulte au peuple est une deuxième nature » avait quant à lui réagi le leader du parti les Patriotes, Florian Philippot. À la suite des propos sur le « pognon de dingue » en 2018, certains avaient qualifié de « méprisant » l’attitude du président, avant de considérer l’interview à McFly et Carlito « d’abaissement de la fonction présidentielle » et le récent cul-sec de « puérile ».
« Il y a chez Macron cette attitude, non pas audacieuse mais ridicule et puérile, qui l’amène à accepter de relever publiquement des paris crétins du genre « cap’ / pas cap' » jusqu’à brandir le portrait de youtubeurs quelques secondes avant de rendre hommage à Samuel Paty… » a récemment tweeté l’auteur Sylvain Grandserre.
Si certains sont très critiques à l’égard des mots ou des comportements d’Emmanuel Macron, d’autres louent son « franc parler » à l’instar de François de Rugy en 2018 quand le chef de l’État incitait un jeune chômeur à « traverser la rue » ou nuancent ce qui peut être interprété comme un abaissement de la fonction de président de la République française. Livrant son analyse sur le plateau de BFMTV en mai 2021, la journaliste politique Laetitia Krupa jugeait l’entretien d’Emmanuel Macron par Mcfly et Carlito de « pas tellement transgressif », citant en exemple Joe Biden qui recevait le même jour à la Maison-Blanche des youtubeurs.
Une stratégie bien rodée depuis le début
Au-delà des critiques positives ou négatives formulées à l’encontre des comportements d’Emmanuel Macron, on ne peut s’empêcher d’y voir une stratégie très bien rôdée depuis le début. En réalité, Emmanuel Macron a mis en place la stratégie que nous appellerons du « renard face au corbeau ». Le président de la République, tout comme le renard de Jean de la Fontaine est dans l’extrême séduction. Selon le contexte et son humeur, il va conforter son électorat ou aller chercher celui qui ne lui est pas encore acquis en employant des formules chocs. S’il parle en 2017 et 2018 de « fainéants » et de « pognon de dingue » ce n’est pas seulement pour faire parler de lui mais aussi pour conforter ses électeurs centristes, centre-droit d’obédience libérale peu favorable à l’État providence et à la dépense sociale excessive. De la même manière que l’interview accordée aux deux jeunes youtubeurs est une manière de consolider son électorat jeune et le cas échéant d’en séduire davantage. Le terme « décivilisation » qu’il a récemment utilisé serait alors une opération séduction auprès d’électeurs rarement courtisés, ceux du Rassemblement national. On peut imaginer que le récent cul-sec dans le vestiaire des joueurs toulousains va très certainement le rendre davantage sympathique et moins rigide, en particulier dans cette après réforme des retraites. Il faut reconnaître que cette stratégie du renard face au corbeau a plutôt fonctionné. En 2022, il est arrivé largement en tête du premier tour de l’élection présidentielle avec 27,85 % des voix, soit 3,5 % points de plus qu’en 2017. Et depuis plus d’un mois, sa popularité a remonté de 6 points dans les sondages, passant de 26 % à 32 % d’opinions favorables.
Le président est donc un flatteur habile, mais a aussi ses limites. À l’image du renard de Jean de la Fontaine, il est seulement et simplement dans la séduction. Le renard a complimenté le corbeau, pris son fromage et s’en est allé. Emmanuel Macron a multiplié les appels du pied, une fois à la gauche, une autre fois à la droite, pour finalement conduire vers une forme d’immobilisme, et quittera sans doute l’Élysée en 2027 sans s’être fondamentalement occupé des maux dont la France souffre depuis quatre décennies.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.
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