De nombreux Israéliens apprécient le plan de Donald Trump pour Gaza, mais certains craignent qu’il ne fonctionne pas

Près de la moitié des Israéliens sont favorables à ce projet et le jugent pratique. Un tiers l'apprécie mais ne pense pas qu'il fonctionnera

Par Dan M. Berger
17 février 2025 20:55 Mis à jour: 17 février 2025 21:48

Dave Bender, un apiculteur du nord d’Israël, remarque que le ressenti de son cœur et l’analyse de son cerveau sont en opposition en ce qui concerne le plan du président Donald Trump pour Gaza.

Dans ce projet, les Palestiniens se réinstalleraient ailleurs et les États-Unis prendraient le contrôle du territoire, le nettoieraient et le réaménageraient pour en faire un jardin international.

« Mon cœur me dit de suivre le plan, car tout vaut mieux que le point que nous avons tous atteint, et les perspectives d’un changement radical du paradigme pour le meilleur sont encourageantes », a expliqué à Epoch Times M. Bender, qui fait partie de l’équipe de sécurité de sa communauté.

« Mon cerveau, lui, voit toutes les embûches et le refus catégorique de l’Égypte et de la Jordanie d’accueillir des [Palestiniens], aussi hypocrite que cela puisse être. »

La grande majorité des Israéliens juifs partagent le cœur de M. Bender, et beaucoup d’entre eux ont les mêmes doutes que sa tête, selon un sondage réalisé par l’Institut de politique du peuple juif (JPPI : Jewish People Policy Institute), un groupe de réflexion de Jérusalem.

Le JPPI a réalisé ce sondage après la suggestion publique de Donald Trump, le 25 janvier, de relocaliser les Palestiniens, mais un jour avant sa conférence de presse à la Maison-Blanche, le 4 février, où il a lancé l’objectif plus ambitieux d’un réaménagement de Gaza par les Américains.

Un autre sondage, réalisé après la déclaration de la Maison-Blanche par la chaîne israélienne Channel 12 a également révélé que 69 % des Israéliens étaient pour et 18 % contre, a déclaré Shmuel Rosner, chercheur principal au JPPI.

Le sondage du JPPI a révélé que 43 % de l’ensemble des Israéliens considéraient que le plan avait un aspect pratique et méritait d’être mis en œuvre. Parmi les Israéliens juifs, 52 %, soit une étroite majorité, sont de cet avis.

En outre, 30 % estiment que le plan n’est « pas pratique mais souhaitable ». Au total, plus de huit Israéliens juifs sur dix soutiennent le plan.

Quelque 13 % des Juifs et 14 % de l’ensemble des Israéliens considèrent le plan comme une « distraction ».

Une majorité d’Arabes israéliens – 54 % – le considère comme « immoral », et 3 % des Juifs partagent ce point de vue.

Si l’on considère une analyse de la répartition par tendance politique, le plan est très populaire parmi les conservateurs.

À droite, 81 % des personnes interrogées considèrent que le plan est à la fois souhaitable et faisable, et au centre-droit, 57 %.

Au centre et au centre-gauche, une majorité est favorable au plan, mais seulement 31 % le jugent faisable.

Seule la gauche – un groupe relativement restreint représentant 7 % des Juifs israéliens – a exprimé une majorité de réserves quant à l’aspect pratique ou à la moralité du plan.

Et 27 % des Juifs de gauche ont fait état d’une opposition morale à ce projet.

Une répartition par grands partis politiques laisse apparaître les mêmes clivages.

Parmi les électeurs du parti conservateur Likoud du Premier ministre Benyamin Netanyahou, 71 % jugent le plan faisable et souhaitable.

Au sein du parti centriste de l’Unité nationale, 51 % le trouvent souhaitable mais pas faisable. Enfin, 62 % des électeurs du parti travailliste de gauche considèrent que le plan est soit une « distraction », soit « immoral ».

Le JPPI a constaté une évolution significative chez les Israéliens juifs vers un large soutien à la relocalisation des Palestiniens.

Dans les années 1990 et au milieu des années 2000, le soutien à l’idée d’une relocalisation des Palestiniens de Judée et de Samarie, également appelée Cisjordanie, était de l’ordre de 40 à 50 % parmi les Israéliens juifs, selon le JPPI.

Avi Cohen, 69 ans, de Tel Aviv, entrepreneur dans le domaine des logiciels pour le graphisme, l’impression et l’édition, a déclaré qu’il faisait partie des 30 % de personnes qui apprécient le plan mais qui ne le trouvent pas faisable.

« Si c’était possible, j’y serais favorable. Mais je ne pense pas que les gens seront d’accord », a-t-il déclaré à Epoch Times, faisant référence à la fois aux Palestiniens et aux pays voisins où les Palestiniens pourraient être accueillis, comme le souhaite le président Trump.

« Cela m’a semblé fantastique lorsque je l’ai entendu », a-t-il confié. Il a constaté que les réactions étaient généralement positives, « mais surtout similaires à ce qu'[il] pense ».

« Personne ne croit vraiment que cela arrivera. »

M. Cohen reconnaît la nécessité d’un tel projet.

« Les gens pensent que quelque chose doit changer. Nous ne pouvons pas soutenir cela, des voisins dont le seul but ou le but principal est de nous tuer. »

L’une des solutions serait un changement d’attitude chez les Palestiniens. « Mais cela ne s’est pas produit au cours des 100 dernières années », a-t-il rappelé.

« Les Palestiniens ne se soucient pas de la vie. La culture veut qu’elle passe après d’autres choses, comme l’honneur, la religion et la terre. C’est très difficile. Si vous ne pouvez pas faire de compromis sur quoi que ce soit, que reste-t-il ? La guerre. »

Les Arabes israéliens sont différents, a observé M. Cohen. « Ils s’identifient aux objectifs et au peuple palestiniens, mais ils comprennent la situation. Ils sont traités équitablement en Israël, pas complètement, mais mieux que dans les pays arabes. Ils comprennent que nous pouvons vivre ensemble. »

Ils ont été aussi choqués que les Israéliens juifs par l’attaque terroriste du Hamas du 7 octobre 2023, qui a fait 1200 morts et plus de 250 personnes kidnappées.

M. Cohen a raconté qu’il avait récemment été hospitalisé pour une maladie. Il a été frappé par le fait que 30 % des professionnels de la santé en Israël sont des Arabes. Il a reçu d’excellents soins.

« Quand on est confronté à des problèmes de santé, on oublie les foutaises et les problèmes. On voit les gens tels qu’ils sont. »

Les Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza subissent toutefois un « lavage de cerveau », a-t-il poursuivi, car on leur apprend dès l’enfance à haïr les Juifs dans les écoles. « On leur dit que nous sommes des colonisateurs, que nous n’avons aucun droit d’être ici. »

Yoav Peretz, 33 ans, employé dans le secteur de la technologie et habitant la région de Gezer, entre Tel-Aviv et Jérusalem, est du même avis.

« La question centrale est l’éducation à Gaza », a-t-il souligné à Epoch Times. « La véritable solution consiste à inverser l’endoctrinement de la population. Mais ça pourrait prendre des années, voire des générations. »

Pour M. Peretz, il est naturel que les Israéliens soient d’accord avec la proposition de M. Trump.

« C’est comme si l’on demandait à quelqu’un qui vit à côté du pire voisin possible s’il serait heureux que quelqu’un vienne le déloger de l’immeuble. Naturellement, il trouverait cela super. »

Toutefois, « de nombreux Israéliens sont sceptiques quant à sa faisabilité », a observé M. Peretz.

Il pense que l’Égypte et la Jordanie ne veulent pas accepter les Palestiniens parce qu’elles se souviennent comment les Palestiniens ont déstabilisé la Jordanie dans les années 1970 et le Liban dans les années 1970 et 1980, entraînant une guerre civile.

« À titre personnel, je crois que la coexistence est possible », a affirmé M. Peretz. « Je vis avec des Arabes, je travaille avec des Arabes, nous avons des amis issus de la communauté arabe et certains des enseignants de la maternelle de mes enfants sont issus de la communauté arabe. »

Il comprend lui aussi le dilemme.

« La coexistence n’est pas une idée farfelue, mais quand la haine est si profondément enracinée, la coexistence est impossible. C’est également vrai pour certains groupes de la société israélienne. »

« Nous ne pouvons pas vivre aux côtés d’un voisin dont le narratif fondamental est basé sur la négation même de notre existence, notre famille et notre société. »

Micol Nizza, 43 ans, de Jérusalem, guide touristique mise au chômage par l’impact de la guerre sur le tourisme, travaille aujourd’hui à l’Autorité de recherche et de développement de l’Université hébraïque.

« La proposition du président Trump [de] transférer les Palestiniens est folle », a-t-elle affirmé à Epoch Times. « Si les gens veulent partir, ils doivent le faire et on peut peut-être les aider [à partir]. Mais on ne peut pas les forcer à partir. »

« Les pays arabes ne veulent pas d’eux et n’en ont jamais voulu. Dans le passé, ils ont été placés dans des camps de réfugiés au Liban et en Jordanie. »

Pour Mme Nizza, les propositions de M. Trump pourraient perturber le fragile cessez-le-feu et l’accord sur les otages récemment conclu entre Israël et le groupe terroriste du Hamas.

« De plus, je pense que cette déclaration peut mettre en péril l’accord en cours et la phase 2, mettant ainsi en danger les [otages] kidnappés. »

Laurie Rimon, 70 ans, qui vit dans le kibboutz de Kfar Blum, dans le nord d’Israël, a simplement déclaré à Epoch Times : « Je doute que cela fonctionne. La plupart des idées de Donald Trump ne sont pas réalisables. »

Elle pense que le déplacement des Palestiniens déstabilisera les pays voisins et rendra les frontières encore plus problématiques qu’elles ne le sont aujourd’hui.

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