Plusieurs établissements pénitentiaires ont été visés par des attaques coordonnées depuis ce week-end. Au total, 21 véhicules ont été tagués et / ou incendiés, et la prison de Toulon a été visée par des tirs à l’arme automatique – qui n’ont pas fait de victime.
Ces nouveaux incidents interviennent au lendemain d’actions coordonnées contre plusieurs établissements pénitentiaires en France, principalement des incendies de véhicules, Des enquêtes ont d’abord été ouvertes par les parquets locaux. Le Parquet national antiterroriste (Pnat) a ensuite annoncé se saisir de l’enquête pour association de malfaiteurs terroriste criminelle. Elle est ouverte pour « tentative d’assassinat en relation avec une entreprise terroriste commise sur une personne dépositaire de l’autorité publique » pour les tirs à l’arme automatique à Toulon, et pour dégradation en bande organisée en relation avec une entreprise terroriste pour les autres incendies.
Dans un communiqué, le Pnat explique s’être saisi de l’enquête à cause de la « nature de ces faits, les cibles choisies et le caractère concerté d’une action commise sur de multiples points du territoire, ainsi que l’objectif qu’ils poursuivent de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation tel que revendiqué sur les réseaux sociaux par un groupe baptisé DDPF ».
Le 16 avril, le garde des Sceaux, Gérald Darmanin, a attribué ces attaques au « narcotrafic ». « La République est confrontée au narcotrafic et prend des mesures qui vont déranger profondément les réseaux criminels », a-t-il écrit sur X. Un constat partagé par le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, évoquant que la piste de «narco-racailles» est l’une «des plus crédibles».
Au stade actuel de l’enquête, « pas de piste privilégiée » pour le procureur antiterroriste chargé de l’enquête, même si la piste du narcotrafic semble la plus évidente. Une source proche du dossier a indiqué que toutes les hypothèses étaient examinées, de la piste des narcotrafiquants à celle de l’ultragauche.
Les dégradations continuent et des personnels sont directement ciblés
De nouvelles dégradations ont ciblé le 16 avril l’institution pénitentiaire, avec notamment l’incendie de trois véhicules dans un parking sécurisé de la prison de Tarascon, dans les Bouches-du-Rhône.
Un des véhicules appartenait à un agent de la prison en service, un autre à une entreprise intervenant au centre de détention, et le troisième, totalement détruit, n’avait pas encore été identifié, selon le procureur, évoquant au moins deux départs de feu.
Lors des actions recensées depuis dimanche, des inscriptions « DDPF », pour « défense des droits des prisonniers français » ont été retrouvées, ainsi qu’une inscription « DDFM » sur la prison de Toulon.
Par ailleurs, toujours dans les Bouches-du-Rhône, un autre véhicule, appartenant à un surveillant de la prison d’Aix-Luynes, a été incendié dans la nuit de mardi à mercredi devant le domicile de celui-ci, a déclaré à l’AFP Jessy Zagari, délégué régional FO Pénitentiaire, syndicat majoritaire dans la région Paca. « Ce groupe terroriste DDPF identifie et cible les personnels pénitentiaires », s’est-il indigné, dénonçant « des actes de menace et d’intimidation ».
Un ciblage que semble confirmer un autre événement recensé mercredi matin, avec des inscriptions « DDPF » retrouvées taguées dans le hall d’immeuble d’une surveillante pénitentiaire incendié en Seine-et-Marne, selon une source policière.
La réaction du garde des Sceaux et des agents pénitentiaires
« Il y a manifestement des gens qui essaient de déstabiliser l’État en intimidant », a dénoncé de son côté le garde des Sceaux, Gérald Darmanin, sur CNews/Europe 1, en évoquant l’incident de Tarascon.
« Ils le font parce que nous prenons des mesures contre le laxisme qui existait peut être jusqu’à présent dans les prisons, qui a mené notre pays à des difficultés extrêmement graves, des réseaux de drogue qui continuent à partir des cellules carcérales, on commande des assassinats, on blanchit de l’argent, on menace des policiers, des magistrats, des agents pénitentiaires et on s’évade, comme c’est le cas » de Mohamed Amra en 2024, a-t-il poursuivi. « C’est une intimidation grave et on essaie de voir si l’État va reculer, c’est ça qui se passe », a-t-il ajouté.
Cette succession d’actes crée un climat de crainte et d’inquiétude chez les agents pénitentiaires.
« Là c’est la première fois de ma carrière que je me retourne en sortant de mon service et que je fais attention à ce qui se passe sur le parking », a témoigné une surveillante du nord de la France exerçant depuis 22 ans.
Désormais « quand je rentre chez moi, je ferme à clé », a témoigné cette femme de 47 ans, qui a requis l’anonymat pour raisons de sécurité et fait part de son « doute sur la capacité de l’État à faire en sorte d’assurer notre sécurité ».
Le fait que ces actes surviennent « de façon coordonnée » rend « les choses bien plus difficiles à digérer », renchérit l’un de ses collègues, âgé de 34 ans.
« Ces attaques ciblées, lâches et odieuses, visent à terroriser celles et ceux qui incarnent l’autorité de l’État et assurent au quotidien la sécurité de tous, même au prix de leur propre tranquillité », a fustigé le syndicat Ufap Unsa Justice dans un communiqué, appelant à une » action réelle et déterminée, menée conjointement par les ministres de la Justice et de l’Intérieur ».
Dominique Gombert, secrétaire général adjoint de FO Justice, évoque « une volonté de semer la terreur ».
« Pas de piste privilégiée », selon le procureur antiterroriste
Le procureur de la République antiterroriste, Olivier Christen, a indiqué jeudi matin qu’il n’y avait « pas de piste qui soit privilégiée », dans l’enquête ouverte sur les attaques. « Des éléments commencent à remonter telle ou telle orientation », a-t-il concédé sur Franceinfo, des soupçons s’étant portés notamment sur la piste du narcobanditisme.
Le « terrorisme par intimidation […] pourrait être la qualification retenue », a souligné le procureur : son « objectif est de faire pression sur la population ou sur les pouvoirs publics pour qu’ils fassent, ou ne fassent pas, quelque chose ».
Interrogé sur RTL, le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, a évoqué la piste des « narco-racailles » et « un mode opératoire qui fait penser à des pieds nickelés ».
Dans la plupart des actions recensées depuis dimanche, de mystérieuses inscriptions « DDPF », apparemment pour « défense des droits des prisonniers français », ont été retrouvées. Le groupe Telegram à ce nom a été fermé « à la demande de l’autorité judiciaire », a indiqué le procureur antiterroriste.
Un groupe DDPF a publié des menaces sur Telegram
Un groupe revendiquant la « défense des droits des prisonniers français », ou DDPF, sigle retrouvé aux abords de prisons prises pour cibles ces derniers jours, a publié mercredi sur Telegram une vidéo montrant un agent pénitentiaire et un véhicule en feu, accompagnée de menaces.
Sur ce canal, créé le 12 avril, a été publiée mercredi une vidéo de 18 secondes montrant un agent pénitentiaire en uniforme sortant d’une voiture, une boîte aux lettres avec un zoom sur le nom inscrit dessus, puis un plan d’une voiture. Elle se termine par un plan de nuit d’une plaque noire portant le sigle « DDPF » avec en arrière fond des flammes dévorant un véhicule.
Sous cette vidéo est publié un extrait d’une interview donnée par ce même agent, présenté comme étant affecté au centre pénitentiaire d’Aix – Luynes 2, avec ce commentaire comportant des fautes d’orthographe : « voiture en feu », puis le nom de l’agent qui « abusent de leur pouvoir ». S’en suit un court texte menaçant les proches de l’agent et enjoignant le personnel à « changer de cap ».
Dans sa chaîne Telegram, le groupe présenté comme DDPF indique qu’il « ce (ndlr, orthographe du texte conservée) déploiera dans toute la France pour mettre en lumière notre cause et notre combat « . Mardi, un message disait: « Sachez que nous sommes pas des terroristes, nous sommes là pour défendre les droits de l’homme à l’intérieur des prisons ».
Ces menaces interviennent près d’un an après la mort de deux agents pénitentiaires lors de l’évasion sanglante de Mohamed Amra, mais aussi après plusieurs agressions de surveillants, parfois à leur domicile.
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