La prestigieuse compagnie londonienne fondée en 1950, par d’anciens danseurs des ballets russes, l’English National Ballet est pour la première fois invitée à danser à l’Opéra de Paris. Dirigée depuis deux ans par la talentueuse ballerine d’origine espagnole Tamara Rojo, la compagnie présente l’un des plus célèbres ballets de son répertoire : Le Corsaire, dans la version de Marius Petipa et Constantin Sergeyev, revue par Anna-Marie Holmes.
Cette fantaisie créée en 1856 à Paris, dans la chorégraphie de Joseph Mazilier, a été introduite en Russie par Jules Perrot, avant d’être reprise en 1899 par Marius Petipa pour en faire un grand ballet spectaculaire et haut en couleurs. L’argument, inspiré d’un poème de Lord Byron, situe l’action dans l’ancienne ville turque d’Andrinople.
Passions et révoltes
Le fougueux corsaire Conrad est amoureux de la belle Médora, pupille du marchand d’esclaves Lankedem et convoitée par le très puissant Pacha. Ali, un compagnon de Conrad et Gulnare, la belle esclave, s’invitent dans l’intrigue.
Enlèvements, scènes de naufrage et de révolte, empoisonnements et réconciliations emportent les interprètes dans un récit épique et romanesque, relatant les amours contrariées des deux héros. La chorégraphie, d’une grande exigence technique, permet de mettre en valeur tous les artistes de la compagnie.
L’essor de l’orientalisme
Le terme « orientalisme » ne se cantonne pas à un style, mais désigne plutôt un climat qui est apparu dès le XVIIe siècle et se développe dans la peinture française aux XVIIIe et XIXe siècles. Il connaît une évolution importante au XIXe siècle avec les nombreux récits de voyageurs et l’Orient devient l’un des thèmes les plus importants chez des peintres comme Delacroix et Ingres et une profonde inspiration pour de nombreux auteurs comme Gautier, Flaubert et Stendhal. Par ailleurs, en littérature, l’orientalisme doit son essor à l’esthétique romantique (nostalgie des civilisations disparues, rêve d’exotisme, de voyages et de dépaysement), qui glorifie un Orient associé au pourtour méditerranéen et le plus souvent fantasmé.
La musique du ballet au fil des siècles
L’essentiel de la musique du Corsaire a été composé par Adolphe Adam (1803-1856). Ce fut sa toute dernière œuvre et curieusement, elle fut peu considérée comme musique de danse de grande envergure.
Dans la toute première version de Joseph Mazilier, le rôle de Conrad n’était pas dansé. C’est la première production russe, montée par Jules Perrot en 1858 qui a doté d’une chorégraphie le rôle alors interprété par le jeune Marius Petipa. C’est l’une des raisons pour laquelle de nouveaux morceaux musicaux ont été ajoutés. Quand Petipa lui-même s’empare du Corsaire, à quatre reprises, des musiques additionnelles sont composées, notamment, par Cesare Pugni (1802-1870). Il a réalisé entre autre une nouvelle production pour le Bolchoï en 1888, dans laquelle il a inséré des musiques de compositeurs aussi divers que Grieg, Chopin ou Tchaïkovski qui ne figurent pas dans la partition jouée à l’opéra. En revanche, il y a le harpiste Albert Zabel (1834-1910), qui a écrit le solo de harpe de la « vision » du Jardin animé au troisième acte. À la demande de Petipa, le tableau sera complété par une composition commandée à l’élève d’Adam, Léo Delibes (1836-1891). On trouve même des pages d’artistes issus de l’aristocratie, avec des variations composées par le duc Pierre Gueorgievitch d’Oldenbourg (1812-1881) et le baron Boris Fitinhof-Schell (1829-1901).
Laurretta Summerscales, une vedette émergeante
C’est à la fin du ballet Le Corsaire que Tamara Rojo a annoncé, en janvier dernier devant le public, la promotion de la magnifique vedette émergeante Laurretta Summerscales en danseuse principale : l’équivalent de danseuse étoile. Un cadeau d’anniversaire pour la jeune danseuse qui a eu tout juste 25 ans. Laurretta Summerscales excelle dans sa technique, son sens musical et son expressivité théâtrale. Cette semaine, les amoureux de la danse française auront l’occasion de la découvrir et de tomber sous ses charmes, du 21 au 25 juin au Palais Garnier.
INFOS PRATIQUES
Palais Garnier, Le Corsaire. Ballet en un prologue et trois actes
Six représentations du 21 au 25 juin 2016
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