Donald Trump est dur lorsqu’il parle de la Chine. Wilbur Ross et Peter Navarro, surnommées « faucons » du commerce, ont été assignés par le futur président américain aux postes clés de son administration, qui a également menacé d’imposer un tarif général sur les marchandises provenant de Chine et a osé discuter avec la présidente de Taiwan, un geste politique qui,d’un autre temps, aurait été considéré comme une offense diplomatique majeure. Selon James Rickards, auteur du livre « Road to Ruin », Donald Trump envisage de nouvelles relations commerciales mutuellement bénéfiques avec la Chine, et ces préparatifs sont sa manière de poser une nouvelle base.
« [Il] dit à la Chine : ’ Voilà où nous allons commencer, qu’est-ce que vous avez à nous proposer ? Êtes-vous disposés à être plus flexible sur l’investissement étranger direct, êtes-vous prêts à traiter les entreprises américaines en Chine d’une façon plus équitable, êtes-vous prêts à arrêter le vol de la propriété intellectuelle ?’ Si la Chine fait des concessions sur ces points, il pourra dire : ‘Bon, maintenant mon tarif est [plus bas].’ C’est l’art de faire des affaires ; les gens ne l’ont pas compris par rapport à Trump », a expliqué James Rickards à la BBC. Toutefois, comme dans toute affaire de négociation, l’autre partie dispose également de sa propre monnaie d’échange. Par exemple, la Chine pourrait nuire aux entreprises américaines qui exportent en Chine ou qui opèrent dans ce pays.
Alors, qui aura le dessus dans les négociations ? Selon un rapport de la société de recherche Geopolitical Futures (GPF), si une guerre commerciale devait avoir lieu, les États-Unis subiraient quelques dommages mais finiraient par remporter une victoire. « La Chine serait affectée par des mesures protectionnistes des États-Unis d’une manière plus importante que n’importe quelle mesure de rétorsion économique dont dispose la Chine pourrait affecter les États-Unis », déclare le rapport.
Qu’est-ce qui est en jeu ?
Le point le plus important pour les deux pays sont les relations symbiotiques entre la Chine en tant qu’exportateur et les États-Unis en tant qu’importateur, entre les ouvriers chinois qui fabriquent des produits bon marché et les consommateurs américains qui les achètent. Selon le U.S. Census (recensement des États-Unis), en 2015, les États-Unis ont importé pour 483 milliards de dollars de marchandises en provenance de Chine. Depuis que l’Empire du Milieu a adhéré à l’OMC en 2001, les États-Unis ont été le principal importateur de produits chinois ( à l’exception d’une année seulement).
Dans le pire des scénarios, environ 15 millions d’ouvriers chinois dans le secteur d’exportations pourraient perdre leur emploi si les Américains cessaient complètement d’importer de la Chine. Ce serait un vrai cauchemar pour le régime chinois, qui dépend de l’emploi pour préserver la stabilité sociale du pays et préserver ainsi son propre pouvoir.
D’autre part, les États-Unis dépendent de la Chine pour des importations bon marché. Par exemple, plus de 90 % de parapluies et bâtons de marche importés par les États-Unis proviennent de Chine, ainsi que 22% de tous les produits importés par ce pays. Importer ces produits d’une autre source ou les produire localement ne serait pas facile et aurait de grandes chances de gonfler leur prix. Cependant, dans la balance, ce ne serait qu’une petite nuisance en comparaison avec de 15 millions de chômeurs chinois en plus.
« La dépendance américaine des produits chinois n’est qu’une question de commodité», souligne le rapport de la GPF. Les analystes trouvent que les États-Unis disposent d’une capacité de production suffisante pour compenser un éventuel manque de produits manufacturés. Selon la Réserve fédérale (Fed), en octobre 2016, l’utilisation totale de la capacité industrielle des États-Unis n’était qu’au niveau de 75,1%. « Bien sûr, augmenter la capacité de production ne serait pas facile. Un des obstacles est le fait que de nombreux groupes industriels ont vu leurs capacités s’atrophier après des années de mauvaise performance. Mais ces industries sommes comme des muscles qui s’atrophient lors de mauvaises périodes et se renforcent lors de bonnes », explique le même rapport.
Un exemple est l’industrie du meuble. En 2015, 17% des meubles achetés par les Américains provenaient de Chine, tandis que l’utilisation de la capacité de leur production aux États-Unis n’était qu’au niveau de 75% pour la majeure partie de l’année. Si les États-Unis augmentaient la production jusqu’à 100%, ce qui est peu probable, ils pourraient remplacer toutes les importations chinoises, mais à un prix plus élevé. Il en serait de même pour beaucoup d’autres industries, du textile au caoutchouc synthétique, avec, en plus, l’avantage de diminuer le taux de chômage américain.
Le pouvoir du monopole
Dans les discussions sur le commerce avec la Chine, on entend souvent que la Chine détient un monopole pour les éléments de terres rares (REE), un composant essentiel pour de nombreux produits numériques. Il serait à craindre, dans un scénario de mauvaises relations entre la Chine et les États-Unis, que cette dernière arrête ses exportations vers les États-Unis, comme elle l’a fait avec le Japon en 2010.
Selon la GPF, ce n’est qu’un autre exemple classique de la même question du prix plutôt que de la disponibilité. En 2016, la Chine a produit 89% des REE dans le monde. Toutefois, les États-Unis avaient leur propre entreprise Molycorp Inc. qui produisait des REE jusqu’en 2015, lorsqu’elle a dû faire faillite à cause de la concurrence des produits chinois à bas prix.
La GPF estime que la production potentielle de Molycorp suffirait à satisfaire la demande des États-Unis en REE, mais de nouveau à un prix plus élevé que celui des importations chinoises actuelles, et avec un certain décalage de temps. « Le résultat ne serait pas catastrophique et, en fait, engendrerait une capacité de production des REE aux États-Unis ou dans un autre pays, comme l’Australie, d’où les États-Unis pourraient importer », indique le même rapport.
Représailles
Qu’est-ce qui arriverait en cas de riposte chinoise consistant à imposer des droits de douane sur les produits américains exportés vers la Chine ? Selon la GPF, il y a un antécédent, et cela ne s’est pas bien terminé pour la Chine. Lorsqu’en 2009 le président Obama a imposé un tarif de 35% sur les pneus chinois pour les voitures et les camionnettes, la Chine a riposté en imposant un tarif sur la viande de poulet provenant des États-Unis.
L’impact des tarifs américains sur les pneus était limité : vers 2015, les importations en provenance de Chine ont chuté de 50%, mais ont été simplement remplacées par des produits provenant de Corée du Sud et d’autres pays. Cela montre les limites de la recréation d’emplois aux États-Unis, ainsi que le fait que l’approvisionnement des États-Unis ne dépend pas de Chine.
Il en va de même pour des sociétés multinationales qui pourraient transférer leur production vers d’autres pays asiatiques si la Chine leur rend la vie difficile. De l’autre côté, les tarifs américains ont gravement affecté l’industrie du pneu en Chine. « L’utilisation de capacité chinoise dans la production de divers segments de pneus a chuté de 50 à 60%. Des centaines d’usines de pneus ont fermé leurs portes et les fabricants chinois gardent des prix de ventes très agressifs pour rester compétitifs sur le marché », indique le rapport de la GPF.
Et les poulets américains ? Leur exportation a doublé entre 2011 et 2016, tandis que la production totale de volaille aux États-Unis a augmenté pendant cette période. « Il est probable que les futures mesures de rétorsion donneraient des résultats similaires : un impact à court terme pour les États-Unis, suivi d’une reprise », conclut le rapport.
Un compromis possible
Bien que des sociétés comme Apple pourraient déplacer leur production ailleurs, cela prendrait du temps et aurait un prix. Starbucks, qui effectue en Chine 5,7% de ses ventes mondiales, ne pourrait tout simplement pas remplacer un marché de plus d’un milliard de consommateurs. Il en va de même pour Boeing, qui a gagné 13,1% de son bénéfice en 2015 grâce aux exportations vers la Chine, le marché d’avions qui connaît la croissance la plus rapide.
Cependant, il y a aussi de nombreuses multinationales chinoises qui opèrent aux États-Unis (par exemple, FOSUN) ou misent sur les États-Unis comme leur futur grand marché (Alibaba). Selon le rapport de la GPF, dans le cas d’une guerre commerciale totale, les deux pays seraient perdants, mais ce sont les États-Unis qui prendraient le dessus. Donald Trump le comprend, c’est pourquoi il demande à la Chine de négocier un meilleur accord pour l’Amérique. Si la Chine comprend également qu’elle est dans une position plus faible, elle sera en mesure d’éviter un scénario perdant-perdant.
Version anglaise : How the US Could Win a Trade War With China
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