L’exposition « Trésors des collections : fossilisations exceptionnelles », qui démarre samedi au musée de paléontologie Paléospace de Villers-sur-mer (Calvados), présente des pièces rares et encore jamais montrées en Europe, comme le crâne d’un tarbosaure.
« Cette exposition est baptisée ‘fossilisations exceptionnelles’ car très peu de fossiles parviennent jusqu’à nous dans cet état : des animaux entiers, des empreintes de parties molles, et même les couleurs révélées aux ultra-violets », s’émerveille Laurent Picot, docteur en paléontologie et responsable scientifique du musée.
[ÉVÉNEMENT] Un Tarbosaurus au Paléopace !
Samedi, le Paléospace dévoile sa nouvelle exposition temporaire : Trésors des collections : les fossilisations exceptionnelles. L’invité vedette ? Un crane de Tarbosaurus bataar, unique en Europe.https://t.co/itgdMLOLkz#calvados pic.twitter.com/fYlHjanouO— Ville de Villers-sur-Mer (@Villers_sur_Mer) April 5, 2023
Parmi les pièces exposées, miracles physicochimiques en provenance entre autres de Chine, du Liban ou du sud de la France, une première mondiale : la trace des onze derniers mètres parcourus par une limule (un arthropode marin en forme de fer à cheval) avant de mourir, et de se fossiliser à son tour, ainsi que le premier crâne d’un tarbosaure visible en Europe.
« C’est un mini film du jurassique »
« C’est un mini film du jurassique », estime Karine Boutillier, directrice du musée et paléontologue, « il faut imaginer les dernières secondes de cette limule : elle tombe au fond de l’eau à l’agonie, probablement par manque d’oxygène ou d’excès de sel, et elle se déplace sur une dizaine de mètres avant de mourir, c’est ce que nous voyons sur cette plaque, c’est exceptionnel par la longueur de la trace, parce qu’on en voit le début et la fin ». Le gisement où elle a été trouvée, la carrière de Solnhofen en Allemagne, était il y a 150 millions d’années immergé sous plusieurs mètres d’eau de mer.
Cette anoxie (manque d’oxygène) ou un milieu très salé, fatals à cette limule, « ont permis à nombre de ces fossiles de nous parvenir en aussi bon état : dans des conditions aussi néfastes à la vie, même les bactéries ne survivent pas et ne peuvent donc pas détruire les ‘parties molles’ », explique M. Picot.
Quant au crâne de tarbosaure, « son état de conservation est bien supérieur à la normale, de par son volume, ses os en connexion et parce qu’il est en 3D, quasiment entier y compris sa dentition », détaille le chercheur. « Le tarbosaure est un théropode asiatique inédit en Europe et cousin (seule la position des yeux diffère) du Tyrannosaurus Rex, qui n’existe qu’aux États-Unis », précise-t-il. Le dernier témoignage de ce bipède carnivore, qui pouvait mesurer jusqu’à 15 mètres et aurait existé entre -72 et -66 millions d’années (crétacé), a été trouvé en Asie, acheté et donné au musée par un mécène, comme la trace de limule. Il s’agit d’un fossile « classique » : ne nous restent que les os du squelette, qui sous l’effet de conditions particulières de températures et de pression, se sont transformées en pierre.
Les autres pièces de l’exposition, prévue jusqu’au 7 janvier 2024, ont un intérêt scientifique majeur avec leur parties molles : poisson, crocodile, tortue, requin, libellule laissent apparaître le fantôme de leurs entrailles, leurs yeux, leurs nageoires, et même les poches à encre de seiches de 100 à 200 millions d’années.
Ouvert en 2011, le Paléospace, qui accueille 30.000 visiteurs par an, profite à plein de la présence à quelques kilomètres de l’affleurement des Vaches Noires, d’où les amateurs ramènent en permanence une multitude de fossiles à identifier, analyser, exposer. Mais cette manne pourrait s’arrêter : une interdiction de prélèvement est actuellement à l’étude au Parlement. Son comité scientifique rassemble quinze des plus grands paléontologues français et un pôle de recherche y sera bientôt créé pour pouvoir consacrer plus de temps à l’étude des quelques 27.000 fossiles de sa collection en permanente évolution.
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