Jeudi 29 septembre, les troupes indiennes ont mené un raid contre des « bases terroristes » en territoire pakistanais, dans la région du Cachemire que les deux nations se disputent depuis près de 70 ans. L’incursion, qui pour la première fois a été officiellement revendiquée par le gouvernement indien, a permis de mener des frappes « chirurgicales » en réponse à l’attaque terroriste du 18 septembre, qui a coûté la vie à 18 soldats indiens dans une base militaire indienne au Cachemire.
Le lieutenant général Ranbir Singh, porte-parole de l’armée indienne, a justifié les frappes devant la presse en indiquant qu’elles faisaient suite « à des informations précises et crédibles » indiquant que des militants pakistanais se préparaient à attaquer des villes indiennes, dont Jammu. « Notre opération s’est focalisée sur l’objectif d’empêcher les terroristes de réussir leur plan d’infiltration et de détruire et mettre en danger la vie des citoyens de notre pays », a expliqué le militaire cité par CNN.
Les porte-parole pakistanais, après avoir d’abord nié l’existence des attaques par les commandos indiens, ont ensuite parlé de simple tirs d’artillerie trans-frontaliers responsables de deux morts et quelques blessés, avant de reconnaître implicitement la présence au sol de troupes indiennes en affirmant que l’Inde « dissimule ses pertes ».
Attente de représailles
Vendredi 30 octobre, le ministre de l’Intérieur indien a émis une alerte nationale pour relever le niveau de protection des installations stratégiques, des complexes industriels, ainsi que des aéroports, monuments historiques, bâtiments gouvernementaux. Dans son alerte, le gouvernement indien cite comme cibles potentielles Delhi, ainsi que les provinces frontalières avec le Pakistan : Pendjab, Rajasthan, Punjab, Jammu et Cachemire, Gujarat et plus au Sud le Maharashtra et sa capitale, Bombay. D’après le Times of India, une chasse à l’homme a commencé suite à des informations crédibles sur le risque d’une frappe « spectaculaire » dans la capitale indienne Delhi, par des fedayeen (musulmans kamikaze) infiltrés.
« Ceux qui hurlent à la télévision devraient venir vivre ici avec leurs enfants. Alors ils comprendraient le coût de la guerre. »
Dès samedi 1er octobre, en anticipation de représailles au nord-est de l’Inde, le gouvernement a fait évacuer plus de 10 000 civils de la zone frontalière avec le Pakistan dans la province du Cachemire indien. « Il y a de la peur dans l’air, et les villageois sont prêts à s’enfuir redoutant une vengeance des Pakistanais après les frappes », explique Nazir, un habitant de la province, au New-York Times. Son village est proche de la base militaire indienne touchée par une attaque pakistanaise à la mi-septembre. « Ceux qui hurlent à la télévision devraient venir vivre ici avec leurs enfants. Alors ils comprendraient le coût de la guerre. »
Guerre des mots
Le 22 septembre déjà, le gouvernement indien avait fait monter la tension lorsque Vikas Swarup, porte-parole du ministère des Affaires étrangères indien, avait suggéré que Delhi pourrait remettre en cause le Traité sur les eaux de l’Indus, un dispositif stratégique de partage de la gestion des ressources hydriques entre Inde et Pakistan. « Pour qu’un tel dispositif fonctionne, la confiance mutuelle et la coopération sont importantes », avait prévenu M. Swarup, cité par le Chicago Tribune, quand il lui avait été demandé si l’Inde prévoyait de dénoncer le Traité. Le Pakistan a immédiatement répondu par la voix de Sartaj Aziz, conseiller aux Affaires étrangères du Premier ministre Nawaz Sharif : révoquer le Traité serait « un acte de guerre », a-t-il prévenu, en annonçant que l’aide des Nations unies et de la Cour Internationale de Justice serait immédiatement sollicitée dans un tel scénario. Le Traité permet en effet au Pakistan de contrôler 80% des eaux du bassin de l’Indus, eaux servant l’Inde en amont, puis le Pakistan en aval. Un contrôle de ces fleuves par l’Inde permettrait donc théoriquement, via la construction de barrages et de réservoirs, d’assécher le territoire pakistanais. Et pragmatiquement d’exercer des pressions sur Islamabad.
De l’autre côté de la frontière, sur le seul mois de septembre le ministre de la Défense Khawaja Asif a par deux fois menacé d’utiliser l’arme nucléaire : « Nous détruirons l’Inde si elle ose nous imposer la guerre », indiquait le ministre lors de sa dernière intervention, citée par l’Indian Express. « L’armée pakistanaise est entièrement préparée à répondre à tout dérapage indien. Nous n’avons pas créé d’armes atomiques seulement pour les montrer dans des défilés militaires. Si une telle situation arrive, nous les utiliserons et détruirons l’Inde. »
Vendredi 30 septembre, le Secrétaire général des Nations unies a proposé sa médiation aux deux parties : « Le Secrétaire général exhorte les deux parties à faire preuve de retenue et de prendre des mesures immédiates pour désamorcer la situation », a dit son porte-parole dans une déclaration à la presse. Une proposition qui n’a pas empêché des échanges de tirs le samedi 1er octobre.
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